Le sorgho « souffre depuis de très nombreuses années d’un déficit d’image vis-à-vis des producteurs, organismes stockeurs, et transformateurs », selon Jean-Luc Verdier, d’Arvalis. Les surfaces cultivées ont été divisées par deux depuis 1992, et atteignent en 2006 environ 56 000 ha, contre 70 000 ha en 2002. De nombreuses études techniques menées depuis longtemps par l’institut montrent que le sorgho a autant sa place que les autres cultures dans l’assolement : d’un point de vue marge brute par rapport au maïs irrigué ou au tournesol sec, par ses faibles besoins en eau, mais aussi d’un point de vue agronomique. C’est en conduisant une étude auprès des acteurs de la commercialisation et de la collecte que la filière du sorgho répond en partie à cette question : « Ces entretiens ont permis de connaître la perception de chacun, mettant en exergue les blocages qui pouvaient exister. Les flux commerciaux par région ont été clairement identifiés et les différents marchés du sorgho ont été caractérisés et analysés » explique Jean-Luc Verdier. Les trois grands bassins de production, le Sud-ouest, la vallée du Rhône et la zone atlantique ont chacun des flux commerciaux bien identifiés.
![]() Trois grands bassins de production ont été identifiés. Les surfaces ont beaucoup diminué depuis 1992, malgré l'intérêt de la culture (© D.R.) |
Débouchés commerciaux
Les acteurs de la filière ont été interrogés sur leur perceptions afin de cerner les blocages et les perspectives d’évolution. L’auteur rapporte ainsi que « l’Italie, qui est aussi un gros importateur » est caractérisé de « marché incertain », les industriels italiens préférant s’approvisionner de plus en plus auprès des Peco (Pays d’Europe Centrale et Orientale). L’oisellerie quant à elle, est « un marché de niche mais sans grand potentiel de développement. Les deux seuls marchés pouvant véritablement se développer sont l’export vers l’Espagne et le marché des fabricants d’aliments du bétail », explique Jean-Luc Verdier. Tout d'abord l’Espagne, pays traditionnellement gros importateur de sorgho, semble être une bonne source de débouchés: " le niveau des importations actuel est en effet au-dessous que ceux atteints par le passé et le sorgho reste compétitif grâce à des frais d’approche peu élevés". Un problème d’instabilité de ce marché est par contre mis en avant par les personnes sondées, lié à la concurrence des sorghos du continent américain qui bénéficient de droits d’entrée réduits. Mais les industriels espagnols des aliments du bétail, qui utilisent en grande proportion le sorgho dans la fabrication de leurs aliments, « se disent prêts à consommer plus de sorgho français » …à condition d’avoir des disponibilités » rapporte l'auteur de l'étude.![]() Le développement commercial du sorgho ne se fera que par l'augmentation des surfaces de production (© Arvalis) |
Les fabricants d’aliments de bétail, second gros potentiel selon l'auteur, semblent moyennement intéressés par le sorgho. Les raisons : « Méconnaissance de la matière première, manque de disponibilité ou manque de compétitivité. Certains pensent par exemple qu’il y a toujours des tanins dans le sorgho alors que depuis une vingtaine d’années toutes les variétés cultivées en France le sont sans tanins ! » explique Jean-Luc Verdier. La création d’un débouché industriel pour la production d’éthanol serait-elle alors envisageable ? Non plus, selon les résultats de l’étude : « Les quelques usines en France sont largement approvisionnées par le maïs, le blé ou la betterave » commente l’auteur. Le sorgho pourrait donc prendre des parts de marché au maïs dans la fabrication des aliments du bétail, dans la mesure où celui-ci se concentrait plus sur le marché des débouchés non alimentaires.
Produire plus
Mais trois conditions sont nécessaires pour réussir, selon l’auteur: « Que le sorgho soit à un prix compétitif par rapport au maïs, à une disponibilité suffisante pour garantir un approvisionnement des usines, et une bonne qualité sanitaire par l’absence de mycotoxines ». Sur ces trois conditions, seule celle de la disponibilité ne semble pas atteinte : « C’est actuellement le principal facteur limitant évoqué par les fabricants d’aliments et qui ne peut se débloquer que par une augmentation progressive de la production » ajoute Jean-Luc Verdier.
Des problèmes de désherbage pour le sorgho Une ombre au tableau pour les producteurs : le désherbage qui pose problème depuis l’interdiction de l’atrazine. « Depuis deux à trois ans, les printemps sont secs et l’efficacité des désherbages est mauvaise » explique Yvon Parayre. Il ajoute: « Les deux matières actives « Trophée » et « Mikado » sont actuellement en attente d’homologation sur sorgho. Il s’agit d’un dossier crucial à la fois pour les producteurs, les selectionneurs et tous ceux qui ont foi en cette culture. Le maximum est fait pour activer ce dossier auprès du ministère ». |