Les premiers foyers de "nématode du bois de pin", connu au Portugal comme la "maladie du pin", ont été signalés en 1999 dans la région de Setubal (sud-ouest), un des principaux ports du pays. Le ver serait, selon les spécialistes, arrivé à Setubal à bord d'un navire en provenance d'Amérique du Nord ou d'Extrême-Orient.
Au Portugal, ce parasite, qui assèche les arbres en bloquant la circulation de leur sève, s'attaque essentiellement au pin maritime, deuxième espèce forestière du pays (après le chêne-liège) avec 710.000 hectares plantés. Avec un chiffre d'affaires annuel de 1,5 milliard d'euros, la filière représente près de 55.000 emplois mais elle subit aujourd'hui les contrecoups de l'épidémie.
Depuis l'apparition du nématode, le prix du pin portugais a "chuté de 30 à 40%", affirme Nuno Calado, secrétaire général de l'Unac, principale confédération de producteurs forestiers de la région sud.
Une zone tampon, large de 20 km, a également été créée le long de la frontière avec l'Espagne.
Dans ce périmètre, particulièrement surveillé, les conifères sains entourant le pin malade sont abattus dans un rayon de 50 mètres. "Neuf ans ont passé, de l'argent a été dépensé, des arbres ont été coupés, et non seulement le problème n'est pas réglé, mais il s'est aggravé", affirme Nuno Calado.
Le nématode se propage grâce à un insecte-vecteur, "une sorte de scarabée" qui ne vole que de novembre à mars, explique M. Calado. Pour éradiquer le ver, "il aurait été crucial d'abattre tous les arbres malades avant le 1er avril, mais cela ne s'est jamais produit, par manque de moyens", dénonce-t-il. Les autorités portugaises refusent pour leur part tout alarmisme, et soulignent que le taux de mortalité de la maladie du pin se limite entre 12 et 18%. Pourtant, selon Domingos Patacho de l'organisation écologiste Quercus, "le pin maritime risque d'avoir disparu du pays dans dix ans car c'est déjà ce qui se passe dans la région de Setubal".
Face à l'extension de l'épidémie, la Commission européenne a interdit fin juin l'exportation de pins portugais non traités.
Selon une estimation de l'Association des industries du bois et du mobilier du Portugal, cet embargo partiel coûtera aux producteurs forestiers 123 millions d'euros, soit près du cinquième des exportations de pins portugais. Par ailleurs, les coûts additionnels du traitement du bois "mettent en cause la viabilité de beaucoup de petites et moyennes entreprises", souligne Sara Pereira, ingénieur forestier à la Confagri, organisme regroupant les coopératives agricoles portugaises.
Enfin, producteurs et écologistes sont convaincus que, si l'embargo partiel n'est pas "rigoureusement appliqué", la "maladie du pin" pourrait s'étendre à l'Espagne voisine. Un risque qu'a déjà pris en compte la Commission européenne, qui, selon sa délégation à Lisbonne, prépare un renforcement des mesures au Portugal et en Espagne "au cas où des foyers étaient détectés à moins de 20 km de la frontière espagnole".