L’Unifa revenait sur la campagne des livraisons d’engrais 2008-2009 lors d’une conférence de presse le 13 octobre. Les statistiques font apparaître « des niveaux de baisse ahurissants, nous ramenant à la moitié des volumes des années 70 », s’alarme Jean-Luc Pradal, directeur commercial et marketing de Gpn.
Les livraisons d’engrais diminuent ainsi de 24 % par rapport à la dernière campagne, avec des records de baisse pour les engrais simples phosphatés (- 58,9 %), les engrais simples potassiques (- 52,5 %) et les engrais composés (- 50,1 %). Gilles Poidevin, délégué général de l’Unifa, met en avant une conjonction de facteurs pour expliquer ce phénomène : le prix élevé des engrais, la chute du prix des céréales et le stockage des produits achetés à prix élevés par les distributeurs.
La tendance reste plus ou moins stable s’agissant des livraisons d’azote. « Par contre, les livraisons de phosphate régressent aux niveaux de 1900-1905 et celles de potasse aux niveaux des années 20, alors que les rendements sont multipliés par cinq ou six ! », alerte Gilles Poidevin. « Pour ces deux catégories, les producteurs ne raisonnent plus, ils font l’impasse. »
Les prix des céréales ont augmenté jusqu’en mars 2008 puis ont diminué régulièrement pour atteindre leur plus bas niveau en novembre de la même année. Un effet ciseau entre prix des produits agricoles végétaux et prix de vente des fertilisants a stoppé net les livraisons quasiment nulles entre novembre 2008 et mai 2009. Le cours des produits fertilisants atteint aujourd’hui un niveau inférieur à celui de 2006. « Ils redeviennent très compétitifs par rapport aux cours des céréales. »
Vers des soldes phosphore et potassium déficitaires
Philippe Eveillard, responsable agriculture, environnement et statistiques de l’Unifa, met en avant « des soldes qui évoluent à la baisse alors qu’ils ne tiennent pas compte des pertes par érosion (P), ruissellement et lessivage (K) ». « Ils fournissent pourtant une indication pour juger de l’évolution possible des réserves des sols en éléments nutritifs, sachant que le bilan très négatif de cette campagne ne viendra pas corriger la tendance. » Cependant, les moyennes masquent les disparités entre exploitations avec et sans élevage, au sein des grandes régions, et même entre parcelles au sein d’une exploitation.
Philippe Eveillard précise que « la base de données d’analyses de terre Inra –Infosol sur la période 1990-2004 signale des teneurs médianes jugées faibles en phosphore assimilable pour 60 % des cantons en France ». Selon lui, « les sols s’épuisent, notamment dans les régions céréalières dont les cultures exportent du phosphore dans leurs grains ».
« Le solde en K2O a été divisé par cinq en 20 ans », déplore Philippe Eveillard, « alors qu’il ne tient pas compte de la perte liée au ruissellement et au lessivage. » Des soldes négatifs concernent les régions à dominante de polyculture élevage, sur une bande allant du sud-ouest au nord-est de la France. La base de données d’analyses de terre Inra –Infosol montre également une tendance à la diminution des teneurs médianes de potassium échangeable dans les sols entre 1990 et 2004.
