Le bilan de santé de la filière féculière, une révolution en 2012

Le bilan de santé de la filière féculière, une révolution en 2012

Le thème de la première table ronde au congrès du l'Unpt
portait sur la relation partenariale producteurs-transformateurs
pour surmonter le "bing-bang" de 2012 (© Terre-net Média)
En 2012, les producteurs de pommes de terre féculières s’attendent à un séisme. La filière parle même de bing-bang. Partant d’une situation réglementée (prix plancher, quota par entreprise, aide de 16€/t de pommes de terre) (1), ils vont devoir s’organiser pour s’affranchir des aides couplées, pour faire face à la fin des quotas de transformation et pour rester compétitifs lorsque le volet du bilan de santé de la Pac sera appliqué à cette filière.

Ce bilan de santé est en fait pour la production de pommes de terre féculières un nouveau rendez-vous entre les producteurs et les industriels. Ils sont même pieds et poings liés et chacune des parties en est bien consciente. Le découplage total des aides (soit l’équivalent d’un quart du revenu à l’hectare) pourrait en effet conduire les producteurs à se détourner de cette culture si les prix ne sont pas assez rémunérateurs et par conséquent ne pas fournir aux industriels les quantités de tubercules nécessaires pour rentabiliser leur outil industriel.

Quid des Dpu « Pommes de terre »

Les pommes de terre de consommation n’ont pas été les oubliées du congrès de l’Unpt. Dans le cadre du « volet légumes » du bilan de santé de la Pac, les dirigeants de l’Union souhaitent que ce soient les surfaces cultivées en pommes de terre, actuellement non dotées en Dpu, qui se voient attribuer de nouveaux droits uniques. Ils ont par conséquent demandé au ministère de l’agriculture que les aides à allouer n’accroissent pas le montant des Dpu des portefeuilles actuels des exploitations. Cette hypothèse reviendrait en effet à activer sur les exploitations des Dpu en surnombre et à laisser vierges de droits des hectares non dotés.

Pour rappel, le volet « légumes » du bilan de santé de la Pac prévoit l’attribution de Dpu pour toutes les surfaces en légumes plein champ. Avec une enveloppe de 30 millions d’euros, les nouveaux Dpu à recevoir seraient de l’ordre de 100 euros (montant dégressif selon la superficie éligible).

Coté transformateurs, il est toujours possible de s’approvisionner à l’étranger mais le coût de transport des tubercules plomberait la rentabilité de leur activité.

Dans cette perspective, les producteurs de pommes de terre féculières du Nord Pas de Calais-Picardie réfléchissent à l’organisation à adopter pour négocier les futurs contrats qui les lieront avec l'entreprise Roquette et ses concurrents.

Ne souhaitant pas voir les aides publiques disparaître ou se détourner de la filière, les « patatiers » réfléchissent à un dispositif qui leur permettrait de préserver cette manne d’argent public. Au ministère de l'agriculture, les représentants de la filière féculière lui demandent pourquoi ne pas envisager une forme de recouplage.

De la forme de découplage/recouplage retenue dépendra la nature des négociations et le niveau des prix des futurs contrats. Elles s’annoncent rudes si les soutiens publics ne sont plus attachés à la production et si les aides à la tonne de pommes de terre sont fondues dans le portefeuille de Dpu des exploitations. Pour quel a culture de pommes de terre fécules reste rentable, le prix de vente devra en grande partie compenser la perte de l'aide spécifique de 16€/t. Surtout si les cours du blé sur le marché à terme se redressent. 

« Face à la libéralisation du marché, la réponse la plus moderne est la coopérative, assure l’Unpt. Opter pour une organisation coopérative présente l’avantage d’associer les producteurs au projet, de transférer la propriété de la marchandise après livraison et de limiter le poids des prélèvements obligatoires qui lui seront appliqués. La coopérative sera le porteur du contrat des producteurs ».


 A gauche, Patrick Trillon, président
de l'Unpt (© Terre-net Média)
Cette nouvelle structure à l’étude répond aux objectifs du projet de loi de modernisation agricole de renforcer l’organisation des producteurs pour obtenir des prix rémunérateurs. Les contrats seront portés par la future coopérative ou par les adhérents eux mêmes. Libres à eux de décider.

Ceci dit, la réussite de cette mutation ne peut reposer que sur une stratégie ambitieuse avec la découverte de nouveaux débouchés commerciaux qui permettraient de bien valoriser la fécule de pommes de terre. Il s’agirait par exemple de mettre au point de nouvelles matières plastiques végétales.

Négociations difficiles en vue

C’est à cette condition que les tensions sur le marché de la fécule, aujourd’hui excédentaire, seraient atténuées. Mais dans ce domaine, la filière est confiante car la France est leader (compétitivité, recherche).

La réflexion conduite pour réorganiser la filière « fécule » est selon les dirigeants de l’Unpt un cas d’école pour toutes les autres productions soumises au démentèlement des outils de régulation de la Pac. La coopérative offre un cadre favorable à la contractualisation avec un rapport plus équilibré entre producteurs et transformateurs. Mais des négociants présents au congrès de l’Unpt doutent déjà de la viabilité du projet.

Restructuration de la filière féculière, un cas d’école ? Réactions de deux producteurs de pommes de terre de consommation


Maryse Moreaux, présidente de la section
"Pommes de terre" de la Fdsea59
(© Terre-net Média)
La restructuration de la filière pommes de terre fécules n’est pas transposable en l’état à la filière de pommes de terre de consommation compte tenu de la variété de ses débouchés. Pourtant, le Cnipt est conscient qu’il faille revoir les conditions de contractualisation pour que la valeur ajoutée cesse d’échapper aux producteurs. Les promotions de pommes de terre à 1,5 euros les dix kilos ont été à plusieurs reprises dénoncées.

En fait, il n’y pas d’organisation commerciale idéale. Pour chacun des producteurs, la meilleure stratégie commerciale est d’abord celle qui convient le mieux à sa situation. Maryse Moreaux, agricultrice dans le Nord à Wattignies avec son mari et présidente de la section pommes de terre de la Fdsea59, a opté pour la contractualisation avec l’entreprise MacCain en raison de la proximité de l’usine de transformation. La grille de prix est négociée par le groupement de producteurs du Gappi dont Maryse est membre. Le contrat porte sur un volume déterminé, l’excédent est vendu sur le marché.

Régis Dumont, agriculteur en gaec à Sercus (59) et secrétaire de la même section de la Fdsea59, exporte lui même ses pommes de terre en Espagne et au Portugal. « Mes produits sont mieux identifiés. Et quand on accroche un acheteur grâce à la qualité des tubercules exportés, il est plus facile de tirer ensuite un meilleur prix de ses ventes. Passer par un négociant reviendrait à noyer ma marchandise de qualité au sein de lots plus hétérogènes avec le risque de voir mon prix de vente baisser. Et en plus je devrai payer un intermédiaire supplémentaire. Cette filière d’export en direct nous permet d’être quatre sur l’exploitation grâce aux marges que nous parvenons à dégager. Passer par un intermédiaire nous conduirait à n’être plus que trois. En revanche, si une opportunité se présente, je n’exclus pas de m’associer avec d’autres producteurs qui veulent se lancer aussi dans l’export en direct».


Mathieu Guillaume, chargé de mission à l'Unpt
et Régis Dumont Fdsea59, secrétaire de la section
"pommes de terre" (© Terre-net Média)
« Bien sûr, notre organisation ne convient qu’à ceux qui sont commerçants dans l’âme comme moi, qui acceptent de gérer les problèmes de logistique et qui sont prêts à faire face aux imprévus. La contractualisation convient mieux à ceux qui recherchent une certaine sécurité ou qui sont moins nombreux sur leur exploitation par exemple. Chaque cas est particulier. »

 

 

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