La crise n'explique pas tout

La crise n'explique pas tout

 


Des investissements dans le parc matériels
et des décisions parfois risqués en fonction
 du contexte économique. (© Terre-net Média)
A Paris, le 2 février dernier, Thierry Lemaitre du Cer France Alliance 277 déclarait lors du colloque « Producteurs de grandes cultures : actifs et réactifs » (1) : « Le développement d’une exploitation fonctionnant toujours par un report sur les annuités futures du coût des investissements engagés, ce report se paie cash si les prévisions sont démenties. Ce qui aboutit à des exploitations en difficultés à court terme malgré des performances prometteuses à long terme ». Autrement dit, c’est parce que des excédents de trésorerie ont servi à financer une partie des investissements qu’ils ne sont plus disponibles pour compenser le déficit de recettes les années suivantes lorsque la conjoncture déprime. Alors même que les annuités sont plus élevées.

Cette absence d’anticipation, très pénalisante pour les exploitants qui ont opté en 2008 pour des stratégies de développement dynamiques, explique cet hiver l’engouement de ces derniers pour les prêts de trésorerie accordés dans le cadre du plan d’urgence à l’agriculture.

Simulations

Après un exercice 2007 exceptionnel au terme duquel de nombreuses exploitations se sont lancées dans des programmes d’investissements favorisés par des taux d’intérêts faibles et une abondance de trésorerie, Thierry Lemaitre, de Cer France, a étudié les conséquences de l’évolution de la variation des fonds de roulement de ces entreprises sur cinq campagnes successives, à systèmes de productions constants.

Les exploitations testées ont été réparties en cinq groupes et les deux scénarios retenus diffèrent entre eux par :

  • la succession de quatre années « normales » et d’une année de crise avec une baisse de prix de 20 %.
  • et pour le second, plus erratique (projection), la succession de trois années pivots (équivalentes à 2008 avec des prix inférieurs à 15 %), d’une année de crise importante (-30 %) et d’une année haute équivalent à celle de 2008.

Ne figurent dans notre article que les résultats du groupe intitulé "Grandes cultures- Dev".

 

Lire aussi Compétitivité des exploitations céréalières en Europe - La structure familiale de la main-d’oeuvre et le suréquipement pénalisent les céréaliers français
Du premier scénario simulé (normal - cf diagramme), il ressort que la succession d’années normales ponctuées d’une année de crise permet aux exploitants de faire face à leurs engagements financiers (dans notre exemple, hausse des disponibilités de 86.000 euros au terme des cinq ans - voir diagramme ci-dessous). Le « cash flow » dégagé chaque année n’a pas été employé pour faire face aux échéances d’emprunts.

 

Du second scénario, il ressort que la succession d’années moyennes (des prix inférieurs de 15 % à ceux de 2008) ponctuée par une année de crise avec des prix inférieurs à 30 %, ne permet pas aux exploitants de faire face à leurs engagements financiers assis sur des exercices comptables prévisionnels trop optimistes. Année après année, le fonds de roulement baisse. Il met en péril l’exploitation (baisse de 55.000 euros). Sans filet de sécurité, l’avenir de l’exploitation est en jeu, puisque la trésorerie excédentaire en 2008 a été employée pour autofinancer une partie des investissements.

Plus le programme d’investissements est important, plus les variations de fonds de roulement constatées sont importantes (pour le groupe "Grandes Cultures Dynamique" - non tratié ici: +45.000 euros et -134.000 euros).

Caractéristiques de l’échantillon de l’exploitation retenue (2006-2008) : 135 ha,


(© Cer France)

En 2008, année de référence, cash flow: 200.000 €
Prélèvements : 102.000 €
Remboursement : 71.000 €
Nouvel emprunt : 83.000 €
Variation de fonds de roulement: 28.000 €

 

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Les trois outils de pilotage de l’exploitation pour apprécier la compétitivité d'une exploitation

Hormis la valeur ajoutée, les experts du Cer France et d’Arvalis appuient leurs simulations sur deux ratios.

Le cout de production ramène à l’unité l’ensemble des facteurs de production nécessaires pour l’élaboration et la commercialisation des biens. Il apprécie la compétitivité de l’entreprise, détermine les enjeux de cette compétitivité et donne des indications sur les déclencheurs de décision.

Le seuil de commercialisation, complémentaire du précédent, est le niveau à partir duquel la vente des produits couvre l’ensemble des engagements financiers et des besoins personnels devant être couverts par l’activité agricole. Le seuil de commercialisation repose aussi sur des objectifs plus subjectifs inhérents à un projet privé ou encore patrimonial. Il peut être différent au cours d’une même campagne ou être à cheval sur deux d’entre elles.

’absence d’épargne de précaution, destinée à faire face à des « coups durs », mais aussi de mesure fiscale adéquate pour en constituer une (la Dpa pour aléas économique vient seulement d’être adoptée) accentuent les conséquences financières d’un retournement de conjoncture. 

L’étude de CerFrance a le mérite de revenir aux fondamentaux pour gérer au mieux son exploitation en replaçant la notion de valeur ajoutée au cœur du processus décisionnel pour prendre les bonnes décisions d’investissements. « Cet indicateur permet de visualiser les enjeux assignés à un projet technique pour trouver un avenir à une exploitation dans des conditions de prix instables », assure Thierry Lemaître. Ainsi, tout travail de simulation doit dorénavant être centré autour de la valeur ajoutée potentielle, autrement dit la richesse à créer et reproductible et non pas, sur le Cash flow disponible.

Estimée en « année moyenne », la valeur ajoutée reflète les performances économiques des exploitations et permet d’estimer les capacités de remboursement des prêts anciens et nouveaux, après avoir déduit une marge de sécurité pour faire face aux aléas conjoncturels.

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