Il suffit de donner la parole aux agriculteurs pour se rendre compte de l’intérêt qu’ils portent à toutes les questions d’actualité. Pour preuve, le T’chat organisé par Terre-net Média et les 107 contributions déjà envoyées lundi à Bruno Le Maire, ministre de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Pêche, à 48 heures de son lancement.
![]() Bruno Le Maire, ministre de l'Agriculture devant la commission ''Agriculture'' au Sénat. (© Terre-net Média ) |
Les questions et les réflexions des agrisurfeurs traduisent avant tout une bonne connaissance du texte de loi présenté au Sénat mais aussi leurs doutes sur son utilité. « Pourquoi faire une loi lma ? Alors qu'au parlement européen on ne nous écoute pas. Encore une fois de plus. Nous allons être pénalisés ! Pourquoi une contractualisation, si elle est mise en place, nous serons pénalisés également ?» (Blue 81 - il s'agit du pseudo utilisé pour le T'chat).
Vivre de leur métier
« Que faire lorsque la discussion de contractualisation ne se fait qu'à sens unique et que les clients abatteurs refusent de contractualiser avec les éleveurs, ou imposent un niveau de contractualisation ne permettant pas aux exploitants de vivre de leur métier? »
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« J'aimerais une autre méthode de calcul du prix de reprise, qui prend en considération une analyse réelle et plus représentative du marché et qui ne pourra en aucun cas ignorer totalement les coûts de production des éleveurs. Est ce qu'un volet de la loi de modernisation agricole va pouvoir soutenir et éclaircir cette situation critique de la production cunicole ? Avec mes remerciements ».
« Un bon entrepreneur sait gérer ses risques, s'il ne sait pas le faire, il n'a qu'a être salarié ! »
« Le jour où il passera à l'acte... »Le t’chat de Terre-net est aussi une occasion de faire part de ses préoccupations et de son malaise, persuadé de n’être ni écouté, ni entendu. Victoire écrit :« Mon mari a perdu un ami il y a deux ans, suicide, évidemment il était agriculteur et depuis mon mari est sous anti-dépresseurs. Le pire c'est qu'il pense que son meilleur ami avait raison et il préférerait en finir plutôt que de devoir mettre la clé sous la porte de sa ferme, qu'il a héritée de son père décédé il y a 20 ans d'un accident de travail. J'ai deux enfants de 6 ans et 6 mois un mari de 35 ans qui travaille 14 heures par jours sans rien gagner. Le jour où il passera à l'acte, je dis quoi à mes enfants ». |
Padebol a porté son intérêt sur ce qui relève de l’article 9 du projet de loi. Il traite de la gestion des risques en agriculture.
« Pourquoi rendre obligatoire l'assurance récolte? Est ce que les assureurs ne vont pas monter les tarifs? En 26 ans, je n'ai jamais eu de coup dur même en 2003 avec la canicule. Ma meilleure assurance c'est l'irrigation. Un bon entrepreneur sait gérer ses risques, s'il ne sait pas le faire, il n'a qu'a être salarié ! », écrit ainsi Padebol.
Avoir un effet contreproductif
En Commission, les sénateurs ont justement tenu à apporter un amendement au texte sur ce sujet, considérant que « les techniques de gestion des risques sont aussi des techniques de prévention ». Cette gestion « ne peut se limiter à un développement de l'assurance sans réflexion sur les moyens de prévention », explique cet amendement. « Cela pourrait à terme avoir un effet contreproductif en déresponsabilisant les exploitants agricoles qui seraient indemnisés quels que soient leurs efforts de prévention des risques», commentent les parlementaires.
Un texte enrichi par les agrisurfeurs et les sénateursCertains agriculteurs font des propositions et souhaitent enrichir le projet de loi. Niko 56 constate que « a priori le renouvellement des générations en agriculture est absent de la Lma. Faut-il le considérer comme un enjeu secondaire? Les jeunes veulent de la lisibilité pour s'installer, en quoi la Lma répondra à leurs attentes ? » Le projet de loi étudié en commission est l'occasion de porter des revendications syndicales comme par exemple l’instauration d’une Tva sociale et d’ajouter à cette occasion un nouvel article. Dans un amendement additionnel de l’article 3, « il est proposé que la couverture de l'ensemble des charges sociales et prestations soit assurée par la création d'une taxe sur l'ensemble des produits (alimentaires) vendus sur le territoire national. » « A compter du 1er janvier 2011, le financement de la couverture sociale des professionnels, chefs d'entreprises et des salariés travaillant dans les secteurs de l'agriculture, de la pêche et de l'aquaculture sera assuré par la perception d'une taxe prélevée sur le chiffre d'affaires des structures de vente de produits alimentaires vendus sur le territoire national. Le taux de cette taxe sera fixé chaque année par le Parlement lors du vote du budget de la Sécurité sociale. » En revanche, le statut d’agriculteur-entrepreneur envisagé dans l’article 11 du projet de loi a été supprimé par la commission sénatoriale. |
En commission, les sénateurs ont ainsi passé au crible le projet de loi de modernisation de l’agriculture et ont retenu au total 163 amendements. Certains modifient le texte qui leur a été soumis, d’autres l’enrichissent (voir encadré). Mais le texte n’a pas été modifié dans le fond.
« Obtenir un niveau de prix à la production au moins égal aux coûts de production incluant la rémunération du travail »
Ainsi, les auteurs de l’un de ces amendements « estiment que les clauses des contrats de vente écrits doivent aussi comporter la mention de la durée minimale du contrat », d'autres souhaitent une durée comprise entre 3 à 5 ans. Un autre amendement « porte sur la spécificité du régime interprofessionnel et limite l'application du contrat réglementaire dans le cas où l'accord interprofessionnel ne prévoit pas de contrat type ».
L’agrisurfeur Pino ne peut que se réjouir en apprenant qu'un amendement déposé mentionne que « les modalités de détermination du prix doivent permettre d'obtenir un niveau de prix à la production au moins égal aux coûts de production incluant la rémunération du travail ».
Ses auteurs estiment « qu'il est nécessaire de préciser que les modalités de détermination du prix doivent permettre d'obtenir un prix couvrant au moins les coûts de production agricole car autrement les contrats n'auront aucun utilité, les producteurs devant toujours se soumettre au pouvoir de négociation de leurs acheteurs. L'Etat aura un rôle important à jouer pour garantir ce prix plancher. » Si cet amendement est adopté au Sénat, ce sera un grand pas pour les agriculteurs pour obtenir enfin des prix rémunérateurs !
« Les propriétaires ruraux avant les paysans ! » (Confédération paysanne)L‘adoption du Grenelle 2 et la mise aux débats, ce jour au Sénat, du projet de loi de modernisation agricole (Lma) démontrent la volonté de soutenir ceux qui détiennent la terre plutôt que ceux qui la travaillent :
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