![]() la Fao tient à prévenir des émeutes de la faim compte-tenu du contexte actuel. (© Terre-net Média) |
La Fao s'attend à ce que la récolte céréalière 2010 soit la troisième la plus importante jamais enregistrée. Quant aux prix du blé, s'ils se sont envolés de 5 % de juillet à août, notamment dans la foulée des incendies en Russie et des restrictions aux exportations imposées par Moscou, ils restent inférieurs de 38 % à leur record de juin 2008, relativise encore la Fao. Surtout, relève Victor Lopes, de la Standard Chartered Bank, à la différence de 2007-2008, « les prix du riz, très important en Afrique subsaharienne, mais aussi du pétrole, crucial pour l'acheminement des denrées, sont à peu près stables ».
Un autre chantier en suspens est celui de la régulation des marchés financiers liés aux matières premières
Malgré ces différences, la crise mozambicaine « permet de tirer, une nouvelle fois, la sonnette d'alarme », estime Abdolreza Abbassian, analyste à la Fao. Plusieurs responsables internationaux ont en effet prévenu, ces dernières semaines, que toutes les leçons des émeutes de 2008 n'avaient pas été tirées. « Les pays sont insuffisamment préparés » à une éventuelle hausse généralisée des prix, lançait ainsi dès la mi-août le rapporteur spécial de l'Onu pour l'alimentation Olivier de Schutter. Pour Abdolreza Abbassian, les marchés des matières premières agricoles « sont encore trop dépendants des aléas climatiques » et les Etats, importateurs comme exportateurs, doivent « apprendre à mieux gérer les stocks ». « L'agriculture a été négligée pendant 30 ans en Afrique, ce qui l'a rendue très dépendante des importations », note Victor Lopes. « Depuis deux ans, des efforts sont faits par plusieurs pays pour accroître la production nationale. Mais on est encore loin du but. »
Un autre chantier en suspens est celui de la régulation des marchés financiers liés aux matières premières, que la France souhaite faire aboutir en 2011, lorsqu'elle présidera le G20. Président du Conseil de la Fao, Luc Guyau affirmait fin août à l'Afp que la hausse des cours du blé était « beaucoup plus spéculative qu'en 2007 ».
Pour Abdolreza Abbassian, « la spéculation a certainement un impact sur la volatilité des prix ». « Lorsqu'il y a une instabilité sur les marchés financiers, comme c'est le cas actuellement, les produits alimentaires, surtout le blé, deviennent des valeurs refuges aux yeux des spéculateurs », résume Philippe Hugon. Les investisseurs se jettent sur ces produits en pariant sur une hausse des cours, très probable dans un monde où il y aura de plus en plus de bouches à nourrir. Mais cet économiste souhaite aussi que l'on déconnecte davantage « les prix intérieurs des prix mondiaux ». « Malgré les violences de 2008, beaucoup de pays n'ont pas mis en place un mécanisme interne de stabilisation des prix », dit-il. « On le voit avec le Mozambique: l'augmentation du prix du pain me paraît incompréhensible au regard du niveau de vie de la population ».