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Les filières les plus abouties, celles valorisant les fibres de chanvre et de lin, existent depuis plus de vingt ans mais les professionnels du bâtiment commencent seulement à s’y intéresser, en particulier pour l’isolation et la rénovation.
Blaise Dupré, directeur du Codem (Construction durable et éco-matériaux), confirme l’absence d’un marché bien structuré pour ces matériaux. « Le stade de la marginalité est dépassé mais il reste quelques freins : craintes vis-à-vis de la résistance des fibres végétales, manque d’expérience pour la pose, surcoûts… La filière y répond en adoptant une démarche qualité digne des grands industriels », commente-t-il.
Pallier les écarts de production
Guillaume Jolly, du pôle de compétitivité Industries et agro-ressources, évoque à ce titre l’importance du respect des normes techniques, en vigueur dans le secteur du bâtiment, pour que les fibres végétales puissent rivaliser avec les fibres synthétiques. Nicolas Dentin, directeur de Natur’lin et liniculteur, assure que les isolants à base de lin affichent au moins les mêmes performances de protection contre le froid que les laines de roche ou de verre et, en plus, une capacité à maintenir la fraîcheur l’été.
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Lin 2000, coopérative de teillage de l’Oise, a fondé Natur’lin en 2007 afin de diversifier les débouchés pour les fibres courtes du lin, appelées "étoupes", coproduits des fibres textiles qui représentent 10 à 15 % de la plante. En 2009, la coopérative du Vert-Galant (Seine-Maritime), la coopérative linière du Nord de Caen (Calvados) et le teillage privé Vanwynsbergue (Eure) ont rejoint le capital de Natur’lin. Le partenariat entre des producteurs de quatre secteurs différents permet de pallier d’éventuels incidents climatiques affectant la récolte de l’un ou de l’autre.
Les quatre teilleurs représentent environ 8.000 ha de lin pour un potentiel de production, en bonnes conditions, de 5.600 t d’étoupes, « un volume très supérieur à ce dont Natur’lin a besoin, concède Nicolas Dentin, mais confortable vu les écarts de rendement selon les années et les perspectives de développement de la filière ». En 2010, Natur’lin a transformé 80 à 100 t d’étoupes de lin. « Nous espérons atteindre 2.000 à 4.000 t valorisées dans l’isolation d’ici cinq ans », poursuit le liniculteur.
Améliorer la recette
Nicolas Defransure, technicien à Lin 2000, explique que la coopérative cherche à toujours mieux valoriser les coproduits, au même titre que les produits, pour améliorer la recette de ses adhérents. Les surfaces en lin ont fortement diminué en cinq ans du fait de la chute des cours. Cependant, l’épuisement des stocks, couplé à la faible production de 2010, favorise déjà la hausse des prix et va redonner de l’intérêt à la culture.
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Nicolas Defransure explique que « le prix des étoupes suit celui de la fibre textile. L’objectif est de pouvoir garantir un prix de 70-80 cents/kg pour les étoupes, soit un produit brut de 500 €/ha pour le producteur, sur 3.000 €/ha prévus en 2011 pour le lin, desquels il faut ôter 1.000 €/ha de frais de teillage. »
Pour Nicolas Dentin, un bon niveau de valorisation des coproduits participe à une meilleure gestion des crises et contribue, par la même occasion, à garantir son approvisionnement. « L’idéal serait de pouvoir couvrir les charges fixes de teillage de la coopérative par la vente des coproduits. » Nicolas Defransure reste sceptique quant à l’atteinte de cet objectif sans pour autant le considérer comme impossible. Il ajoute qu’« aujourd’hui, la coopérative valorise 5 % des étoupes. L’idéal serait de transformer la totalité à un prix garanti sur dix ans par exemple, afin d’aboutir à une filière rémunératrice durablement. »
A voir aussi : la vidéo sur le teillage du lin à la coopérative Lin 2000 |
Cet article est extrait de Terre-net Magazine n°3. Si vous ne l'avez pas reçu chez vous, retrouvez Terre-net Magazine en ligne en cliquant ICI.
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