Il y a deux cents ans, naissait le sucre de betterave

Il y a deux cents ans, naissait le sucre de betterave

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Dans le Nord, de grandes familles sucrières sont alors nées, comme les Say ou les Béghin, héritiers d'une sucrerie fondée en 1821 à Thumeries. (© Terre-net Média)
Aujourd'hui, une grande majorité (95%) des quelque 25 kilos de sucre consommés chaque année par personne en France provient de la betterave, cette grosse racine blanche plantée sur près de 400.000 hectares dans l'Hexagone. "Mais du XVIe au début du XIXe siècle, on consommait essentiellement du sucre de canne importé des colonies, les Antilles et Saint-Domingue. C'était alors un produit de luxe, qu'on ne trouvait que chez les apothicaires et dans les couches les plus aisées de la population", rappelle Bertrand Du Cray, directeur général délégué du Centre d'études et de documentation du sucre.

Cette source d'approvisionnement se tarit brusquement lorsque Napoléon Ier décrète le blocus continental en 1806, refusant toute marchandise britannique sur le continent européen afin d'affaiblir la perfide Albion, dont la domination maritime entravait fortement le commerce avec les colonies. "Avec le blocus, il n'y a plus de sucre, or on a pris de mauvaises habitudes, donc on cherche une solution", résume en plaisantant l'historien de l'alimentation Marc de Verrière le Vayer.

"L'empereur lance un appel à rechercher. Le sucre est naturellement présent dans de nombreuses plantes, donc on fait des tests, par exemple avec la pomme de terre, mais c'est la betterave qui a le meilleur taux, puisqu'elle peut donner entre 15 et 20% de son poids" en sucre, précise-t-il.

Une filature de coton transformée en sucrerie au pied de l'actuelle Tour Eiffel

Un homme d'affaires, Benjamin Delessert, qui s'illustrera ensuite en créant les Caisses d'épargne, flaire la bonne affaire. Il a transformé en sucrerie sa filature de coton à vapeur à l'ouest de Paris, au pied de l'actuelle Tour Eiffel. Napoléon Ier lui rend visite le 2 janvier 1812. Une gravure, reproduite dans des manuels scolaires jusque dans les années 1960, le représente offrant un pain de sucre à l'Empereur. "On est en plein symbole nationaliste: Benjamin Delessert rend la France indépendante en sucre. C'est l'une des réussites agro-industrielles indéniables de la France", qui, grâce à cet héritage, est aujourd'hui le premier producteur mondial de sucre de betterave, souligne l'historien.

Quelques jours plus tard, Bonaparte ordonne une série de mesures pour lancer cette filière stratégique à ses yeux: planter 100.000 hectares de betteraves, distribuer 500 licences pour la construction de sucreries et des bourses pour étudiants. S'ensuit "une vraie guerre économique" opposant les producteurs de canne et de betterave. Ces derniers finiront par l'emporter, aidés notamment par l'abolition de l'esclavage en 1848 dans les colonies.

Du produit de luxe... aux bio-carburants

C'est dans les grandes plaines du Nord, autour de Lille et Arras, que l'industrie betteravière a pris ses quartiers, "la plupart du temps sous la forme de petits ateliers liés à des exploitations agricoles, dont la production est transformée sur place en sucre", selon M. Du Cray. De grandes familles sucrières sont alors nées, comme les Say ou les Béghin, héritiers d'une sucrerie fondée en 1821 à Thumeries (Nord).

En 2008, cinq sucreries sur trente ont dû fermer en France en raison d'une réforme imposée par l'Union européenne, attaquée par des pays comme le Brésil sur sa politique de maintien de cette industrie en dépit de son coût de production très supérieur au cours mondial. Et les grandes sucreries, qui fabriquaient déjà l'alcool du pastis et d'innombrables boissons, trouvent de nouveaux débouchés dans les bio-carburants.

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