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De nombreux effets positifs de l’agroforesterie sont régulièrement mis en avant, en faveur de la fertilité biologique du sol, la qualité de l’eau, la biodiversité ou pour pallier les conséquences du changement climatique. « La technique motive d’abord pour les bénéfices agronomiques apportés par l’association entre arbres et cultures, notamment sur la qualité des sols », témoigne Fabien Liagre d’Agroof, bureau d’études spécialisé en agroforesterie. Il évoque par exemple un taux de matière organique de 50 % plus élevé en parcelle agroforestière qu’en culture pure.
Limiter les fuites d'azote
À l’inverse, on lui oppose la baisse de rendement de la culture intercalaire. « Je ne peux pas dire le contraire mais celle-ci n’intervient qu’en deuxième partie de vie des arbres. Elle dépend des systèmes et peut être compensée par l’effet protecteur de l’arbre en conditions climatiques difficiles. Et surtout, c’est là que les atouts de la présence des arbres sont le plus visibles : stockage du carbone, fixation des nitrates. » Sur ce dernier point, en effet, « lorsque les arbres approchent de leur taille adulte, le filet racinaire mis en place est capable de limiter voire de supprimer toute fuite d’azote dans le système, ce qui en fait un excellent outil pour protéger les zones de captage ». Fabien Liagre invite cependant à rester mesuré en tenant du caractère relatif des bénéfices de la présence des arbres, ceux-ci dépendant de manière importante des composantes du système.
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Améliorer globalement le système
Séverin Lavoyer, vice-président de l’Association française d’agroforesterie, confirme la volonté pour ceux qui se lancent d’« améliorer globalement leur système notamment du point de vue de la fertilité avec l’augmentation de la teneur en CO2 des sols ». Ensuite, viennent la protection de la ressource eau, la réduction des intrants. Il relativise à son tour, par exemple quant à l’impact sur la biodiversité, « pas obligatoirement positif, car il peut également conduire à l’arrivée de nouveaux ravageurs ». Fabien Liagre évoque également l’augmentation de la biodiversité en précisant qu’elle n’intervient pas de manière systématique. Il semble cependant que « les lignes d’arbres offrent gîte, nourriture et refuge aux auxiliaires ». L’objectif est de parvenir à un équilibre entre ravageurs et auxiliaires permettant de limiter les risques.
Protection contre les coups de chaud
Enfin, selon Christian Dupraz, chercheur en agroforesterie à l’Inra de Montpellier, la présence des arbres permet d’atténuer les stress hydriques et thermiques au printemps, notamment parce qu’ils procurent de l’ombre et évitent les coups de chaleur. « Toutes les cultures d’Europe ont été sélectionnées en pleine lumière, mais il existe également des génotypes adaptés à l’ombre ou semi-ombre au moment du remplissage des grains. Aussi, il reste encore des progrès génétique à faire, qui permettraient d’adapter les cultures pour des systèmes agroforestiers. L’Amérique et la Chine se sont d’ores-et-déjà lancées dans cette sélection génétique. »
Nicolas Méliet (Gers) : « Résoudre les problèmes d’érosion » Nicolas Méliet cultive 1.200 ha en agriculture biologique dans le Gers pour son compte et celui de cinq clients. Il assure également les opérations de triage, séchage, stockage et la commercialisation des productions. « Je m’occupe de tout, du semis à la commercialisation. » Ses premières plantations agroforestières ont trois ans. Dix à vingt hectares doivent suivre cette année avec un objectif de couverture de cinquante à cent hectares l’année prochaine. « J’ai voulu par ce biais résoudre des problèmes d’érosion et de structure de sol. J’ai choisi toutes sortes d’essences, adaptées aux caractéristiques de mes parcelles : cormier, noyer, cerisier, chêne… destinées à la production de bois d’œuvre. La mise en place est récente mais elle a déjà permis de faire disparaître les ravinements, les effets coulée de boue. » Quant aux baisses de rendement attendues en cultures intercalaires, il prévoit que la réduction de l’érosion, la hausse de la teneur en matière organique, l’amélioration de la structure du sol, viendront compenser le phénomène le moment venu. Au-delà de l’intérêt agronomique, Nicolas Méliet évoque le plaisir visuel, les bénéfices en termes d’image, et n’oublie pas la constitution d’« une source de revenu complémentaire à moyen terme » dont devrait plutôt profiter son fils. |