Orges d’hiver et escourgeons : jusqu’à quand semer ?

Orges d’hiver et escourgeons : jusqu’à quand semer ?
Inondations dans des champs
Luc Pelce, d’Arvalis-Institut du végétal, témoigne à Auxerre et à Dijon, de cumuls de pluies respectivement de 86
et 87 mm entre le 25/09 et le 15/10, proches de ceux enregistrés en 1984, 1993 et 2000. (© Terre-net Média)

Avec un cycle plus court que celui du blé, les orges d’hiver et escourgeons sont d’autant plus pénalisés sur les semis tardifs. Un retard au semis d’un mois ne se traduit que par un retard d’une semaine à l’épiaison et moins de cinq jours à maturité, ce qui les rapproche aussi de probables périodes plus échaudantes. Par ailleurs, ces espèces sont moins robustes au niveau de l’enracinement, en particulier en présence d’excès d’eau, et beaucoup moins plastiques au niveau des compensations s’opérant autour de la fertilité des épis. Enfin, elles sont plus sensibles au gel hivernal à un stade jeune de 2 à 3 feuilles. Selon la bibliographie, les orges semblent en difficulté lorsque les températures minimales sous abri passent sous - 6 à - 8°C, contre - 10°C pour les blés. Traduit en termes de risque, par exemple en Bourgogne, si on sème entre le 10 et le 20 octobre, on s’expose à un risque de gel destructeur une année sur cinq. En décalant le semis fin octobre, on élève ce risque à une année sur deux.

Ne pas dépasser fin octobre, en augmentant les densités de semis

Les références expérimentales ne sont pas très nombreuses pour statuer clairement sur la limite de fin de date de semis des orges d’hiver et escourgeons. Néanmoins, il semblerait qu’au-delà du 25-30 octobre, la relation entre rendement et date de semis soit franchement baissière, en tout cas beaucoup plus que celle observée sur le blé. Par rapport à des semis réalisés sur la première quinzaine d’octobre, la réduction de rendement serait de l’ordre de - 10 % (entre 0 et - 30 % selon les situations) sur fin octobre - début novembre, jusqu’à - 40 % pour quelques références issues de semis de fin novembre à mi-décembre.

Retarder la date de semis, c’est évidemment augmenter la densité de semis (tableau 1). Outre un tallage qui sera plus limité sur un semis tardif, des conditions d’implantation un peu limites peuvent être de nature à provoquer des pertes significatives à la levée, d’autant plus que la durée de cette dernière sera plus longue. Pour information, à Dijon, un semis du 15/10 lève en moyenne le 24/10 alors qu’un semis du 30/10 lève le 16/11.

 

Tableau 1 : Densités de semis pour les orges d’hiver et escourgeons en Bourgogne et Franche Comté.
Tableau 1 : Densités de semis pour les orges d’hiver et escourgeons en Bourgogne
et Franche Comté. (© Arvalis)

 

Cependant, aussi bien pour les orges que pour les blés, il s'agit de semer sur un sol indemne de mauvaises herbes. Cette recommandation a d’autant plus de valeur cette année que les relevés de graminées adventices sont massives. Et si on essaie de trouver des points positifs à des semis retardés par la force des choses, il est probable que les risques de développement des bio-agresseurs se réduisent d’autant (adventices, ravageurs, verse, maladies).

Pertes de rendement de 10 %

En Auvergne, Centre, Ile-de-France, Limousin, les ingénieurs de l’Institut envisagent pour le moment des pertes de rendements maximales de 10 % par rapport au potentiel initial. La fin des périodes "optimales" de semis des orges d’hiver est liée à la sensibilité au froid de l’espèce à des stades précoces. Avant le début du tallage, on considère que l’orge est plus sensible au gel que le blé tendre. On cherche donc à avoir atteint ce stade critique avant l’arrivée de gelées inférieures à - 8°C. Concrètement, on peut calculer "à rebours" la date à ne pas dépasser pour éviter que la culture ne rencontre un épisode de gel avec le stade début tallage : on définit la date du gel à - 8°C le plus précoce (en décile 2 : 1 année sur 5 ou en médiane : 1 année sur 2), et on se renvoie 400°Cjour plus tôt (selon une hypothèse d’automne froid ou médian). C’est ce qui apparaît sur les cartes ci-dessous :

 

Lecture des cartes : par exemple en région Auvergne, si on sème entre le 11 et le 21 octobre, on s’expose à un risque de gel destructeur 1 année sur 5. Le seuil de risque de gel 1 année sur 2 n’est atteint pour la région Auvergne que pour les semis postérieurs au 21 octobre.

Lecture des cartes : par exemple, en région Auvergne, si on sème entre le 11 et le 21 octobre, on s’expose à un risque de gel destructeur 1 année sur 5. Le seuil de risque de gel 1 année sur 2 n’est atteint pour la région Auvergne que pour les semis postérieurs au 21 octobre. En région Centre, sur les départements 18, 28, 41, 45 (et 36 sur la moitié Est), si on sème entre le 11 et le 21 octobre, on s’expose à un risque de gel destructeur 1 année sur 5. Le seuil de risque de gel 1 année sur 2 n’est atteint pour la région Centre que pour les semis s’échelonnant avec un gradient Est-Ouest du 10 novembre à début décembre. Cliquer sur les cartes pour les agrandir. (© Arvalis)  

 

Pour évaluer les conséquences d’un gel précoce, on peut se référer à un essai mené sur la station de Boigneville sur la campagne 2010-2011 : la température chute fin novembre jusqu’à - 8°C, sans neige. Attention, l’année 2010-2011 a été marquée par une forte sécheresse et des carences induites en azote ; les compensations n’ont sans doute pas pu se mettre en place.


Essai mené à Boigneville pour évaluer les conséquences d'un gel précoce en orge d'hiver. 
(© Arvalis)

 

A retenir :
• Dans plusieurs zones, nous allons dépasser la date normale de semis des orges/escourgeons.
• Le plus gros risque est de s’exposer, en semant tard, à un gel précoce.
• En moyenne, les pertes de rendement observées sur des semis tardifs sont modérées (10 %), avec une variabilité liée à différents facteurs : conditions d’implantation et climat hivernal, type de sol, conditions climatiques de fin de cycle (échaudage, stress hydrique).
• Un retard d’un mois au semis peut se traduire par un décalage de l’épiaison d’une semaine.
• Augmenter les densités de semis de 20 à 30 grains/m² par rapport aux références de semis au 15 octobre.
• Les références historiques ont été acquises essentiellement sur la variété la plus sensible au gel : Esterel.

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