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Le Haut conseil des biotechnologies (Hcb) a rendu son avis sur l’étude menée par Gilles-Eric Séralini qui concerne les effets à long terme, sur la santé du rat, d’une consommation de maïs génétiquement modifié NK603. Instance d’évaluation, d’expertise et de concertation, le Hcb a été saisi le 24 septembre par les ministres de l’Ecologie, de l’Agriculture, de la Santé et de la Consommation, d’une demande d’avis relative à ces résultats. En préambule, le Hcb a précisé « entendre les interrogations que soulèvent les conditions de réalisation des études de toxicologie aujourd’hui requises pour évaluer les plantes génétiquement modifiées (Pgm), et prévient du travail qu’il mènera au cours des prochains mois sur ces modalités ».
Dans l’avis rendu le 19 octobre, « le comité scientifique du Hcb note que le dispositif expérimental, les outils statistiques utilisés et les interprétations données par les auteurs de l’étude, souffrent de lacunes et faiblesses méthodologiquement rédhibitoires, qui ne permettent pas de soutenir les conclusions avancées. L’étude n’apporte aucune information scientifique étayée quant à l’identification d’un éventuel risque sanitaire lié à la consommation de maïs NK603. De son côté, le comité économique, éthique et social recommande qu’une étude de long terme, indépendante, contradictoire et transparente, soit entreprise sur ce sujet sous l’égide des pouvoirs publics. »
L'Anses rejoint le Hcb
Un autre organisme public saisi par le gouvernement, l'Anses, a également réfuté ce lundi l'étude du Pr Séralini, tout en soulignant « le nombre limité de publications traitant des effets potentiels à long terme d'une consommation d'Ogm associés à des pesticides ». Les recherches du Pr Séralini « ne permettent pas de remettre en cause les évaluations réglementaires précédentes sur le maïs NK603 et le Round-up », estime l'Anses. Elle « appelle à la mobilisation de financements publics nationaux ou européens dédiés à la réalisation d'études et de recherches d'envergure visant à consolider les connaissances sur les risques sanitaires insuffisamment documentés ».
Inf’Ogm, association de veille citoyenne sur les biotechnologies, avait déjà soulevé ce problème dans un communiqué début octobre. Alors que la publication des résultats de l’étude menée par le professeur Séralini avait déclenché une vaste polémique, l’association considère le débat comme mal posé et remet en cause les procédures d'évaluation des Ogm. « L’importance de la contre-expertise dans le domaine scientifique est une des conclusions majeures du débat en cours. Inf’Ogm demande aux institutions françaises et européennes en charge de l’évaluation des dossiers d’autorisations de plantes génétiquement modifiées la publication in extenso et dans un format utilisable des données brutes des expériences menées par les "pétitionnaires" (i.e. les entreprises ou universités) contenues dans ces dossiers. »
Des critiques applicables à l’ensemble des évaluations menées jusqu’à présent
Inf’Ogm soulève également le paradoxe selon lequel « les études qui ont permis d’obtenir les autorisations commerciales d’Ogm ont été réalisées dans des conditions similaires à celle du professeur Séralini ». Enfin, et surtout, selon Inf’Ogm, la première question qu’il faut se poser, dans sa complexité, est celle du rapport avantages / inconvénients d’une Pgm.
Suite à ces deux avis, le gouvernement souhaite une « remise à plat du dispositif européen d'évaluation, d'autorisation et de contrôle des Ogm et des pesticides », a annoncé lundi le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, dans un communiqué. « Cependant, l'étude du Pr Gilles-Eric Séralini, selon le Hcb et l'Anses, n'est pas de nature à remettre en cause les précédentes évaluations. » En revanche, « le gouvernement retient la proposition formulée par l'Anses de renforcer les études sur les effets à long terme de la consommation des Ogm et des pesticides. Dans ce contexte, la détermination du gouvernement pour maintenir le moratoire en France des Ogm autorisés à la culture dans l'Union européenne est réaffirmée. »