![]() Selon Fabrice Berton, agriculteur dans l'Aube, « les filières bio se structurent. De nombreux acteurs privilégient les ressources locales. Les débouchés vont se stabiliser et les prix avec. » (© Terre-net Média) |
« Je suis en bio depuis onze ans. La filière a beaucoup évolué ces dernières années, depuis 2007 surtout. » Fabrice Berton est agriculteur biologique sur 135 ha, en Gaec avec deux associés, à Donnement dans l’Aube. Il livre à Cercabio. Créée début 2011, cette entité compte seize adhérents et collecte 1.600 t, dont 1.100 t de céréales meunières, fourragères et d’oléoprotéagineux. « Nous avons décidé de créer notre propre structure à un moment où rien ne bougeait mais, dans les six mois, la coopérative du coin a monté une filière dédiée. »
C’est en effet à cette époque qu’Emc2, Champagne Céréales et Nouricia (ces deux dernières sont aujourd’hui regroupées dans Vivescia) décident de se lancer dans la collecte de productions végétales issues de l’agriculture biologique. Samuel Cathrinet, directeur de Bioveal, structure mise en place pour leur mise en marché, revient sur « la vague de conversions de 2009, les velléités environnementales et le développement des filières bio de transformation, qui ont motivé cette évolution ».
Maillage du territoire
« Le terrain, poursuit-il, attendait la structuration d’une filière de dimension régionale. » Samuel Cathrinet évoque ensuite les problèmes de gestion des volumes et d’optimisation de la logistique que peuvent rencontrer les « spécialistes de la bio ». « Les mutations du secteur imposent de réduire au maximum les charges. Nous profitons d’un réseau de silos et de magasins "d’appro" qui maille le territoire. »
Les cultures bio en France En 2011, les grandes cultures biologiques s’étendaient sur 192.077 ha (10 % de plus qu’en 2010), soit 1,6 % des surfaces nationales, contre 3,5 % pour l’ensemble des filières. En intégrant la luzerne, la sole bio couvrait 216.000 ha. En 2011/2012, la collecte de grandes cultures a été réalisée par 121 opérateurs. Elle atteint près de 186.000 t de productions bio et 52.000 t de C2 (deuxième année de conversion). Selon l’Agence bio, environ 85 % des surfaces en grandes cultures biologiques sont cultivées avec dix espèces différentes - blé tendre, mélanges céréales-légumineuses, triticale, orge, tournesol, maïs grain, féveroles, soja, avoine et pois protéagineux contre cinq en conventionnel. |
Fabrice Berton admet que la "coop" conventionnelle dispose de moyens logistiques qui font défaut à sa petite entité et que « les agriculteurs apprécient de pouvoir continuer à livrer au silo le plus proche ». Cependant, l’agriculteur considère Cercabio comme un regroupement de « spécialistes de la bio, en particulier des techniques culturales et de conservation de la qualité des grains ».
Il ne s’imagine pas intégrer une grosse coopérative, mais reconnaît les avantages qu’il pourrait y avoir à « travailler ensemble, profiter de ses silos, pour répondre aux besoins de certains adhérents, notamment ceux dépourvus de capacités de stockage ».
Une logique que partage Samuel Cathrinet : « Le mariage entre les deux approches, en dépassant les idéologies, peut donner quelque chose d’intéressant. Nous sommes déjà partenaires de la Cocebi (Coopérative céréalière biobourgogne). »
Mutualisation de moyens
Exemple d’entité ayant passé le cap, Agribio Union, créée dans le Sud-Ouest par cinq coopératives, compte 1.000 adhérents et collecte 30.000 t de céréales bio grâce à une vingtaine de points de stockage. Nicolas Lecat, son directeur, insiste sur la mutualisation de moyens au sein de sa structure, indispensable pour réussir à collecter de petits volumes, sur un grand territoire et pour 21 espèces différentes.
« Les rotations longues sont à la base des systèmes bio, comme la qualité est essentielle à la valorisation des productions. Nous devons adapter nos outils en conséquence. Les artisans de la bio doivent exploiter les possibles complémentarités avec les nouveaux arrivants en les encourageant à se délester de leurs certitudes pour se fier à l’expertise des spécialistes. »
Olivier Chaloche exploite 100 ha à Cortrat (Loiret), en système bio depuis 1998 : « S’engager à long terme » Olivier Chaloche possède 350 t de capacités de stockage sur son exploitation. « C’est incontournable en bio car souvent, il n’y a pas de collecteur spécialisé à proximité des exploitations. » L’agriculteur livre à Biocer, coopérative située en Normandie. « Je trie, ventile et allotte à la récolte. Biocer affrète un camion quand elle a besoin. » « Je ne suis pas contre les collecteurs mixtes, mais je préfère me tourner vers un organisme spécialisé. J’ai du mal à croire que les productions peuvent se croiser, être stockées à proximité les unes des autres, sans qu’il y ait de contaminations. De plus, je pense qu’une structure mixte répond aux attentes d’une minorité de ses adhérents ce qui l’empêche de développer une vision d’ensemble. Et le prix payé n’est pas toujours à la hauteur du marché. Une coop bio spécialisée privilégie une approche globale du marché, propose une réelle expertise et cible ses investissements. » Olivier Chaloche voit d’un bon œil l’intérêt des structures conventionnelles pour le bio. Un moyen, selon lui, de resserrer le maillage des opérateurs sur le territoire. Toutefois, il insiste sur la nécessité d’un engagement à long terme. |
Cet article est extrait de Terre-net Magazine n°19
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