Marion Guillou : « L'agro-écologie ne fait pas baisser les rendements »

Marion Guillou, ancienne présidente de l'Institut de la recherche agronomique (Inra) est actuellement présidente du Conseil d'administration d'Agreenium, consortium destiné à construire une offre en recherche et enseignement supérieur agronomique français.

Pourquoi travailler sur cette transition agro-écologique ?

« Avec la raréfaction des ressources environnementales et le besoin accru de production agricole, on ne peut plus avoir comme objectif le seul volume en se disant qu'on corrigera les dégâts plus tard. On doit viser des modes de production alliant fourniture de produits pour l'alimentation ou le non alimentaire, et services pour l'environnement. C'est vrai en France comme ailleurs dans le monde. Certains pays soumis à des contraintes fortes ont déjà pris le tournant, comme le Maroc pour la gestion de l'eau ou le Brésil pour l'érosion des sols. Il y a des zones entières où le sol est devenu improductif pour mauvaise gestion. En France, il est prioritaire d'agir dans des zones plus fragiles : la Normandie pour l'érosion des sols, Poitou-Charente pour la gestion de l'eau, dans le Sud-Ouest où l'eau manque aussi en juillet. Dans certaines régions, on relève des phénomènes de disparition d'abeilles. Et toutes ces régions seront intéressées pour agir ».

 

Comment améliorer les choses ? 

« Certaines réponses apportées par les pratiques agricoles sont connues. En zone de montagne, le fait de garder des animaux et donc de l'herbe pâturée, est une manière de lutter contre l'érosion des sols. Si on n'avait plus d'éleveurs en montagne, il faudrait alors subventionner la présence de "vaches tondeuses" comme en Suisse. Mais surtout, il y a des pionniers, des milliers d'exploitations en France, qui ont souhaité aller plus loin plus vite. Et on peut s'appuyer sur eux pour caractériser de nouveaux systèmes de production combinant la double performance économique et écologique. Pour les grandes cultures, on peut ainsi couvrir les sols l'hiver, avec des lentilles par exemple, pour économiser de l'énergie et diminuer l'usage d'herbicides. A la fin de l'hiver, les lentilles meurent et laissent le sol propre - sans mauvaise herbe - pour y cultiver du colza. En élevage, il faut viser une meilleure autonomie en alimentation en mettant l'animal à l'herbe ou en organisant collectivement la cohabitation entre polyculture et élevage ».

 

N'y a-t-il pas une perte de rendement avec ces nouveaux systèmes ? 

« Non, globalement nos propositions améliorent les rendements en termes de qualité comme de quantité. En revanche, passer à ces systèmes requiert de la technicité et du temps de travail, de refaire de l'agronomie, de passer dans les champs pour surveiller l'arrivée des parasites. Certaines pratiques demandent en outre d'investir. La tension est donc moins entre économie et écologie qu'entre double performance et technicité, temps de travail et endettement. Les politiques publiques doivent s'attacher à alléger ces contraintes : la fiscalité pour alléger les investissements nécessaires ou l'exonération de charges étendue aux emplois en commun. Au-delà, le système de recherche, de formation dont l'enseignement agricole et de conseil doit valider et transmettre les nouvelles approches, adaptées à chaque terrain, à mettre en place ».

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