Port de Rouen - Terminal sucrier (©Port de Rouen)
Seconde partie de l'article portant sur la conférence « Accord de libre-échange UE/Usa : quelles conséquences pour l’agriculture et la Pac », organisée par l’Afja (1) le 4 juillet dernier.
Un prochain partenariat commercial entre l’Union et les Etats-Unis mettra face à face deux politiques de soutien reposant sur deux logiques différentes. Selon Thierry Pouch, économiste de l’Apca, le Farm Bill a en effet été conçu pour exporter tandis que la Pac a d’abord visé à assurer la sécurité alimentaire de l’Europe. Et la réforme de la Pac de 2014 est trop vertueuse (les aides resteront majoritairement découplées) pour rendre l’Europe agressive sur les marchés. Les Etats-Unis ont opté pour les aides contracycliques et pour des mécanismes assurantiels qui protègent les revenus des farmers.
L’équilibre d’un prochain accord commercial UE/ Etats-Unis pourrait par ailleurs être remis en cause par les politiques monétaires conduites dans les prochaines années, défend encore Thierry Pouch. Les Etats-Unis ont en effet l’intention de laisser le dollar se déprécier par rapport à l’euro pour être plus compétitifs. Ceci dit, les excédents commerciaux actuels de produits agro-alimentaires ont été réalisés indépendamment de la question des taux de change euro/dollar depuis des années.
Les productions animales redoutent ces négociations
Cependant, la première menace qui peut remettre en question l’équilibre de tout accord commercial à venir est la volatilité des cours des produits agricoles bruts dont les échanges ont été libéralisés. Ils varient beaucoup plus que les taux de change des monnaies. En revanche, un accord commercial UE/ Usa ne peut être envisagé sans une ouverture du cabotage américain à la concurrence.
En fait, au niveau européen et français, seule une analyse par filière agricole met en lumière les réels enjeux des négociations commerciales qui ont débuté ce 8 juillet. Et ce sont évidemment les secteurs en position de faiblesse, comme les productions animales, qui les redoutent naturellement le plus. Or ces positions de faiblesse sont d’abord inhérentes à l’organisation de ces mêmes filières au niveau national (prix de vente et organisation des filières) et européen (distorsions sociales, faibles soutiens) avant d’être liées à la concurrence américaine. Les campagnes lancées depuis quelques mois pour sauver l’élevage dénoncent d’abord la faiblesse des revenus des éleveurs liée avant tout à des choix politiques qui relèguent au second rang les filières animales.
Mais si, comme nous l’avons évoqué précédemment, cette période de négociations commerciales ne s'inscrira pas dans la renonciation de l’agriculture européenne et française puisqu’il sera possible de protéger certaines filières et certains produits sensibles, les Etats-Unis pourraient saisir les opportunités qu’offre une ouverture du marché européen pour développer des productions destinées à l'exportation respectant les normes imposées par l'Europe. « Les Usa n’ont pas l’intention de s’interdire de vendre des bovins qui sont élevés sans hormones ! », défend Edouard Bourcieu.