« Les institutions européennes sont en train d'examiner attentivement cet arrêt afin de définir les différentes options, notamment les travaux préparatoires en vue de faire appel », a réagi vendredi la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, dans un communiqué. « L'UE considère que les accords bilatéraux ne sont pas remis en cause. Elle confirme son engagement envers le partenariat avec le Maroc, qui est un partenaire primordial dans le voisinage sud », a-t-elle souligné. « Tous les travaux préparatoires ont commencé en vue de proposer au Conseil (qui réunit les 28 Etats membres de l'UE, NDLR) de faire appel », a précisé un haut responsable européen sous couvert d'anonymat.
Dans un communiqué de son ministère des affaires étrangères et de la coopération, le Maroc a « exprimé son étonnement au regard de cette décision concernant un protocole, qui comme tous les accords bilatéraux signés, est conforme à la légalité internationale ». Le ministère a appelé l'UE à prendre « les mesures appropriées en vue de trouver une issue définitive à cette procédure ». « Le Maroc suivra avec vigilance le déroulement d'une péripétie judiciaire à forte connotation politique et prendra, le cas échéant, les mesures qui s'imposent », ajoute le communiqué.
De son côté, la France s'est dite « favorable à ce que le Conseil de l'Union européenne forme un pourvoi à l'encontre de cette décision ». « Le partenariat entre l'Union européenne et le Maroc est primordial. La France considère que l'accord de libéralisation réciproque de certains produits agricoles en est un élément important », a souligné le Quai d'Orsay.
La justice européenne a « annulé » jeudi un accord « entre l'UE et le Royaume du Maroc relatif aux mesures de libéralisation réciproques en matière de produits agricoles, de produits agricoles transformés, de poissons et de produits de la pêche » car cela « approuve l'application dudit accord au Sahara occidental ». Le Tribunal de l'UE, situé à Luxembourg, a annulé « une partie seulement » de l'accord, a relevé le haut responsable européen, estimant qu'il s'agit d'une décision de justice « subtile et compliquée » et que les interprétations juridiques sur sa portée divergent.
Plusieurs Etats membres se sont montrés préoccupés, alors que les Européens ne veulent surtout pas se brouiller avec le Maroc, un allié précieux dans leur lutte contre la mouvance jihadiste dans le sillage des attentats de Paris. « C'est une victoire pour le Front Polisario et un échec non seulement pour le Maroc, mais aussi pour l'UE », a résumé un diplomate vendredi. Introduire un recours contre cette décision « peut être un geste politique pour apaiser Rabat », a-t-il ajouté. Mme Mogherini s'était entretenue dès jeudi matin avec le ministre marocain des Affaires étrangères Salaheddine Mezouar. Ils doivent également se rencontrer à Rome ce week-end.
Le Maroc contrôle depuis 1975 la majeure partie du Sahara occidental, un vaste territoire de moins d'un million d'habitants et propose un plan d'autonomie sous sa souveraineté. Mais le Front Polisario, soutenu par Alger, continue de réclamer un référendum d'autodétermination. C'est le mouvement indépendantiste qui a porté cette affaire à l'attention de la justice européenne.