A Bergerac (Dordogne), où le thermomètre est descendu à -5,1 degrés dans la nuit de samedi à dimanche, un record pour un mois d'avril, Eric Chadourne, viticulteur et président de l'interprofession des vins de Bergerac et Duras a été frappé par la durée du gel: « trois ou quatre heures » entre -3 et -5 degrés dans la nuit de samedi à dimanche.
« Il va y avoir de la casse », prédit ce vigneron qui a mis son éolienne en route dès 22H30 samedi pour brasser l'air autour de ses vignes, et ainsi essayer d'empêcher le gel de détruire les jeunes pousses tout juste apparues.
« La vallée de la Garonne a été particulièrement touchée dans la nuit de samedi à dimanche et on a enregistré de nombreux records de températures à la baisse », confirme Tristan Amm, prévisionniste à Météo-France.
En moyenne, en France, les températures dimanche étaient 6 degrés au-dessous de la moyenne de saison, selon Météo-France. Une vague d'air polaire venue de Scandinavie qui touche surtout une diagonale du froid allant du nord-est du pays au sud-ouest, favorisera les gels nocturnes, surtout lorsque le ciel sera dégagé lundi et mardi, indique Météo-France.
Dans la nuit de samedi à dimanche, le thermomètre est descendu à 0,3 degré à Toulon, ville méditerranéenne où le précédent record de froid pour cette période datait de 1958 (+1,1 degré). A Brest, il est tombé à -2,4 degrés, contre -2,3 degrés en 1978, selon Météo-France.
L'organisme prévoit de nouveau de « fortes gelées » la nuit de dimanche à lundi, sur la même diagonale, de l'Alsace aux Pyrénées en passant par le Centre-Est et le Massif Central. « Dans la région de Nevers, les températures pourront descendre à -7 degrés », indique M. Amm.
Il met en garde aussi contre le risque de verglas sur les routes dans les mêmes régions.
Le gestionnaire du réseau électrique RTE a aussi prévu une situation tendue lundi matin, pour la même raison, en appelant entreprises et particuliers à freiner leur consommation d'électricité, notamment entre 07H00 et 10H00, en particulier pour les appareils électroménagers.
« Il faut guetter toute la nuit »
Côté agriculture, dans le Tarn-et-Garonne, Pierre Bonnet, arboriculteur du nord du département a passé une nuit blanche samedi avec des températures descendues à -4 degrés sur ses terres. « La différence avec l'an dernier est que cette température est la même dans les bas-fonds des champs que sur les coteaux » dit-il à l'AFP, craignant pour les variétés précoces de prunes.
Dans le même département, Béatrice Lamanerie, arboricultrice à Lizac, a lancé à minuit l'aspersion sur ses arbres, une technique « basée sur l'arrosage »: Les fruits y gagnent une enveloppe de glace qui les protège.
Toujours dans le Sud-Ouest, le vignoble de Saint-Emilion a aussi été touché, « mais il n'y aura pas les mêmes dégâts » que l'an passé, la vigne étant moins avancée que l'an dernier, espère Jean-François Galhaud, président du conseil des vins de Saint-Emilion.
Même espoir à Chablis, où Stéphane Aufrère, installé à Fleys, espère que les bourgeons, un peu plus en retard que l'an passé, vont résister au froid.
Il a déjà passé la nuit dernière pour « chauffer » ce qu'il peut et « prépare la nuit qui vient ».
« Nous chauffons deux hectares sur vingt » à l'aide de grosses bougies réparties entre les rangs de vigne pour empêcher le froid de saisir les plantes. « Nous n'avons ni les moyens ni le personnel pour protéger toute notre vigne », dit-il à l'AFP.
Dans la vallée du Rhône aussi on se prépare.
« Il n'y a pas eu trop de dégâts pour l'instant mais ils annoncent plus de froid pour les nuits à venir, ça s'annonce compliqué jusqu'à mercredi », relève Elodie Merlin, qui exploite 3 ha d'abricotiers à Bourg-les-Valence (Drôme).
Le gel lui a déjà fait perdre la récolte de trois variétés ces dernières semaines. Son mari dort sur place pour surveiller les vergers: « Il faut guetter toute la nuit, les alarmes sonnent tout le temps... ».