L'Union nationale de l'apiculture française (Unaf), partie civile, a fait appel de ce non-lieu, daté du 1er avril et conforme aux réquisitions du parquet de Paris de mars 2012, ont ajouté ces sources. Le dossier sera donc de nouveau examiné par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris.
L'information judiciaire, ouverte en 2001, en pleine polémique sur ce produit phytosanitaire, portait notamment sur des faits éventuels de tromperie, escroquerie et de destruction du bien d'autrui, en l'occurrence le cheptel apicole. Le groupe Bayer n'avait pas été inculpé mais placé sous le statut de témoin assisté, intermédiaire entre ceux de témoin et d'inculpé.
Dans son ordonnance de non-lieu, consultée par l'AFP, le juge d'instruction relève notamment que « la communauté scientifique n'a pas démontré l'existence d'un lien de causalité entre l'introduction du Gaucho dans les cultures agricoles et l'augmentation de la mortalité des abeilles ». Dans ce contexte, « appréhender les troubles du cheptel apicole sous l'angle pénal apparaît d'emblée malaisé », ajoute-t-il, en soulignant les autres facteurs qui interviennent dans la mortalité des abeilles. Ces autres facteurs peuvent être des parasites comme le Varoa, le frelon asiatique ou la perte de diversité des cultures.
Les apiculteurs ne contestent pas la multiplicité de ses causes mais soutiennent que les produits phytosanitaires en sont la principale. « Une fois de plus, cette décision qui blanchit de toute faute pénale les fabricants de pesticides agricoles montre à quel point les juges peuvent être dans l'ignorance du cynisme des réalités économiques, scientifiques et administratives qui gouvernent le marché des pesticides agricoles », a réagi dans un communiqué le président de l'Unaf, Olivier Belval. « Cette décision est un très mauvais signal en défaveur de la protection des abeilles et de l'environnement », a ajouté Olivier Belval.
En France, l'autorisation du Gaucho a été retirée en 1999 pour le tournesol et en 2004 pour le maïs, en raison des risques pour les abeilles. La substance chimique du Gaucho, l'imidaclopride, fait aussi partie des néonicotinoïdes dont la Commission européenne a suspendu l'usage pendant deux ans au printemps dernier sur certaines cultures. Les plaignants accusaient également Bayer d'avoir caché la toxicité réelle du pesticide lors de l'obtention des premières autorisations de mise sur le marché. Mais pour des experts judiciaires sur lesquels s'appuie le juge, « les éléments objectifs du dossier ne permettent pas de dire que la société Bayer a été à l'origine d'une rétention d'information ».
En juillet 2012, la Cour de cassation avait déjà confirmé un non-lieu rendu en 2009 par une juge d'instruction de Saint-Gaudens (Haute-Garonne) au bénéfice de Bayer et Basf dans l'affaire du pesticide Régent, accusé lui aussi par les apiculteurs de provoquer une surmortalité des abeilles. L'usage du fipronil, la substance active du Régent, a également été restreint par la Commission européenne en 2013. La France avait pris une mesure similaire en 2005.