« A ce stade, on avait dit qu'on ne souhaitait pas prendre les fêtes de fin d'année en otage, parce qu'encore une fois, c'est le moment où les Français vont consommer nos produits dont on est fiers. Mais force est de constater que là, on est dans l'expectative, on ne sait pas où on va et on ne peut pas attendre. Donc, il est tout à fait possible qu'on se remette en action rapidement », a déclaré son président Arnaud Rousseau sur RTL. A la question « avant la fin de l'année ? », il a répondu « oui bien sûr ».
Si on n'a pas de gouvernement, si le Premier ministre n'est pas nommé, si nous n'avons pas d'interlocuteur, on ne peut plus attendre un an. Un an, c'est une période raisonnable pour obtenir des réponses. Nous n'en avons pas et nous ne nous voyons pas l'horizon se dégager », a-t-il expliqué.
« On fera le père Noël sur les routes »
Les agriculteurs considèrent que la censure et chute du gouvernement Barnier ont suspendu la concrétisation des promesses faites aux syndicats depuis les grandes manifestations de l'hiver dernier.
Pierrick Horel, président des Jeunes agriculteurs (JA), syndicat allié de la FNSEA, reconnaît une forme de « fatigue » dans la profession, « parce que ça fait un an qu'on est en mobilisation, que les agriculteurs ont vécu une année éprouvante sur les plans météorologiques et [des maladies] sanitaires ».
« Tout le monde a envie de profiter du moment des fêtes pour se ressourcer en famille », ajoute-t-il auprès de l'AFP. Toutefois, « si un nouveau Premier ministre explique que l'agriculture n'est pas une priorité, on fera le père Noël sur les routes », met-il en garde.
« Peur que ça dérape »
L’ensemble de leurs syndicats ont relancé à la mi-novembre un mouvement de protestation, en ordre dispersé mais avec en commun la revendication d’un meilleur revenu et l’opposition au projet d’accord de libre-échange UE-Mercosur, sur fond aussi de campagne pour les élections aux chambres d’agriculture, en janvier.
La FNSEA et son allié, Jeunes agriculteurs (JA), avaient prévu une mobilisation en trois temps devant culminer ces 9 et 10 décembre autour du thème des revenus.
Les autorités ont toutefois constaté un tassement de la mobilisation « à l’approche des fêtes de fin d’année », marquée par « une grande difficulté pour les organisations syndicales à mobiliser sur le terrain ».
Devant la vacance gouvernementale, la mobilisation s’est surtout traduite ces derniers jours par des actions devant des permanences de députés, murées ou visées par des déversements de fumier. Dans la ligne de mire, des élus du Nouveau front populaire (NFP) et du Rassemblement national (RN) ayant voté la censure du gouvernement. Mercredi, la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a condamné « fermement » ces actions qui ont visé, selon elle, plus de 30 députés en l’espace d’une semaine.
« Rien ne justifie la violence », a dit Arnaud Rousseau jeudi sur RTL. « Je ne cautionne rien qui atteigne aux biens et aux personnes. Je dis simplement qu’on ne peut pas pousser les gens à bout et s’étonner de réactions qui vont au-delà de ce qui serait raisonnable. Et je demande que soit entendue la colère agricole depuis un an (…) bien sûr qu’on a peur que ça dérape, et on n’a jamais eu aussi peur », a-t-il affirmé.
Nouvelles maladies animales décimant des troupeaux, mauvaises vendanges, récoltes de céréales par endroits, annonce d’un accord Mercosur-UE - qui doit encore être ratifié... Les motifs de colère s’accumulent, combinés à la traditionnelle revendication d’un revenu à la hauteur du temps passé dans les fermes.
Avec le gouvernement Barnier, les agriculteurs avaient notamment obtenu la promesse de prêts à taux réduits pour soulager les trésoreries, d’allègements sur la fiscalité des exploitants et sur l’emploi de saisonniers. L’Office français de la biodiversité, police de l’environnement, s’est aussi vu imposer un « port d’arme discret », à la satisfaction de la FNSEA et sa rivale la Coordination rurale (CR).
En dépit de la censure, la ministre démissionnaire Annie Genevard a annoncé la signature jeudi d'un premier prêt de soutien à la trésorerie, en faveur d'un jeune agriculteur de l'Oise.