Droit à l'essai en Gaec
Le point sur l'extension du dispositif à toute la France

Le droit à l'essai permet de tester, pendant un an, la compatibilité de futurs associés au niveau du travail sur l'exploitation, de sa conduite technico-économique, de la vision stratégique, mais aussi sur le plan relationnel. (©Fotolia)
Le droit à l'essai permet de tester, pendant un an, la compatibilité de futurs associés au niveau du travail sur l'exploitation, de sa conduite technico-économique, de la vision stratégique, mais aussi sur le plan relationnel. (©Fotolia)

En juin 2019, Gaec & Sociétés avait présenté, à son réseau, son intention de déployer dans tout le pays le droit à l'essai avant de s'associer en agriculture, que ce soit pour l'installation d'un jeune agriculteur, ou le regroupement d'exploitants déjà en place, d'une même famille ou non, afin de créer ou conforter des société agricoles. Instauré en 1991 en Haute-Savoie sous le nom "d'année d'essai", le dispositif est utilisé depuis longtemps également dans la Savoie voisine. Il fait partie des propositions formulées par le CESE en juin 2020 pour favoriser l'installation et la transmission agricoles.

Il y a quelques semaines, c'était à nouveau le thème du congrès de l'association, cette fois pour dresser le bilan de tests réalisés dans huit départements, sur la base du volontariat : dans les Côtes-d'Armor, le Finistère, l'Ille-et-Vilaine et le Morbihan depuis 2020, le Jura, l'Ain, la Saône-et-Loire et le Tarn depuis 2021. La Haute-Loire, elle, devrait l'expérimenter en 2022. L'objectif est de mieux cerner les atouts et contraintes de la démarche, pour pouvoir l'adapter.

« Mieux cerner les atouts et contraintes de la démarche »

En Bretagne, engagée dès la première année dans l'expérimentation − la seule menée à l'échelle régionale d'ailleurs − et qui concentre la moitié des départements pilotes, les résultats sont prometteurs. C'est pourquoi Gaec & Sociétés a choisi une ville bretonne, Guingamp, pour les dévoiler à ses adhérents : sur cinq projets d'association hors cadre familial, quatre se sont en effet concrétisés.

Dans cette vidéo publiée sur Youtube, Nathalie Darras, conseillère en relations humaines à la chambre d'agriculture de Bretagne, explique comment elle a accompagné les projets en test. Philippe Clapin et Guirec Ollivier, deux agriculteurs qui y ont participé, témoignent :

Cliquer sur le curseur pour lancer la vidéo.

Rappelons que le droit à l'essai permet à de futurs associés de tester pendant un an, renouvelable et avec la possibilité d'arrêter à tout moment, leur compatibilité au niveau du travail sur l'exploitation, de sa conduite technico-économique, de la vision stratégique d'entreprise, mais aussi sur le plan relationnel. Ceci avant de s'engager définitivement. En s'appuyant sur son expérience, la Haute-Savoie observe 40 % "d'année d'essai" qui n'aboutissent pas sur une association. 

40 % des projets n'aboutissent pas

Le but de ce dispositif est, en effet, d'éviter les départs précoces d'associés, voire les dissolutions de Gaec, dont la mésentente entre membres est l'une des principales causes, y compris au sein d'une même famille, ce qui limiterait par conséquent le recours à la médiation. Rachat de parts, partage des investissements réalisés, baisse des aides Pac, séparation de troupeaux... Les conséquences peuvent effectivement être lourdes, financièrement et humainement. Et inversement, cela facilite l'installation et la transmission d'exploitation, en société, notamment entre tiers.

Éviter départs d'associés et dissolutions de Gaec.
Les conséquences peuvent être lourdes, financièrement et humainement

À savoir : pendant la période d’essai, les avantages fiscaux accordés aux Gaec ne s'appliquent pas, le traitement fiscal, social et juridique (statut) reste individuel comme la gestion de la comptabilité, ou celles des aides Pac. De même, pour les aides à l'installation, dont la DJA (dotation jeune agriculteur). Chacun reste, s'il l'est, propriétaire de ses bâtiments, ses terres, son matériel, son cheptel. Sont mis en commun : le travail bien sûr, ainsi que l’assolement et les productions, ce qui suppose un arrangement avec ceux qui les collectent.

Un cadre national fixant, notamment, statut et rémunération

En janvier dernier, le ministère de l'agriculture a publié une note de service sur le droit à l'essai pour les associés de Gaec, détaillant principalement le rôle des DDTM (à noter : tout test du dispositif doit leur être notifié pour qu'elles puissent en informer les services concernés). Mais Gaec & Société espère un cadre national pour 2022 qui définisse, et donc harmonise sur l'ensemble du territoire, le statut (stagiaire, apprenti, salarié en CDD, autre ?) et la rémunération des agriculteurs bénéficiant de cette démarche. L'association propose que celle-ci, quel que soit le lien familial, soit égale au Smic, sans surcoût de cotisations sociales. Autre suggestion : que l'accompagnement relationnel, estimé à plus de 2 000 € par associé, soit pris en charge au moins en partie. L'extension du droit à l'essai à d'autres types de société est également à l'étude : EARL, SCEA... 

Aucune base juridique dans le code rural.

Pour le moment, cet outil n'a pas de base juridique définie dans le code rural : seul un contrat de fonctionnement est rédigé entre les deux parties. Un accompagnement, individuel et collectif, est assuré par des conseillers spécialisés en relations humaines, autour du projet, de l'organisation du travail, des interactions entre personnes, avec une formation sur le travail en groupe et un bilan au terme de la période. Il s'agit surtout d'apprendre à se connaître et à communiquer. Précisons que tout projet doit être validé en CDOA, qui effectue des points réguliers, y compris sur les expérimentations menées.

Le financement global du dispositif doit aussi être précisé. Pourraient y contribuer des fonds provenant, par exemple, des Régions (comme pour le test breton), de Pôle Emploi, des programmes d'accompagnement à l’installation et à la transmission en agriculture (Aita) ou des Comptes professionnels de formation (CPF). En parallèle de ce travail d'harmonisation et de cadrage, les expérimentations se poursuivront, notamment en Bretagne avec cinq nouveaux projets d'association, familiale pour changer. Mais selon Gaec et Sociétés, et les départements et régions impliqués dans les tests, il faut que l'État et les organisations professionnelles nationales (chambres d'agriculture France, MSA, FNSEA, JA...) se mobilisent sur le sujet.

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