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Terre-net Média : Pouvez-vous nous rappeler brièvement l'historique de l'homologation du Cruiser Osr ?
Denis Tardit : Le Cruiser Osr est un traitement de semences du colza qui assure une protection fongicide contre les fontes de semis et le mildiou, et insecticide contre pucerons virulifères, grosses et petites altises et tenthrèdes. Il a obtenu son homologation pour dix ans l’année dernière après une longue période consécrée à l’élaboration du dossier. Il doit s’agir du dossier le plus complet jamais réalisé pour un insecticide, avec notamment quatre années d’essais concernant l'exposition de ruches à des champs de colzas protégés avec du Cruiser Osr. Aucune variation du poids des colonies n'a d'ailleurs été observée... C’est donc la première campagne d’utilisation en France du produit et, plus largement, du thiamétoxame comme insecticide colza. Il a couvert 650.000 ha de colza, sans remontée d’aucun incident, avec, en plus, un taux de satisfaction des utilisateurs à un niveau rarement atteint. 85 % seraient prêts à l’utiliser à nouveau, quitte à changer de variété si leur préférée ne pouvait pas être traitée Cruiser Osr.
Tnm : Que pensez-vous de l'étude Inra-Acta qui a mené à la remise en question de l’homologation du Cruiser Osr ?
DT : La méthode employée n’a pas été validée, au sens scientifique du terme. Elle n’est pas officiellement reconnue dans le cadre d'une procédure d’évaluation des produits pour leur homologation au niveau européen. L’Anses a d’ailleurs reconnu que les doses employées et leur mode d’application ne sont pas représentatives et sont entre 4 et 13 fois supérieures aux doses rencontrées en pratique.
Tnm : Où en êtes-vous sur ce dossier aujourd’hui ?
DT : Nous avions deux semaines pour faire part de nos remarques aux autorités. Nous devons rendre aujourd’hui les éléments contradictoires à l’étude. Le ministre pourra alors rendre son verdict. Pour la campagne à venir, les ventes de semences pourraient avoir lieu avant que sa décision ne soit rendue officielle. Cependant, en cas d’interdiction, nous irons devant les tribunaux pour défendre notre dossier, un dossier conforme aux recommandations scientifiques.
Tnm : Quelles seraient les conséquences du retrait du Cruiser Osr ?
DT : Nous estimons que l’utilisation du Cruiser Osr permet de gagner 2-3 q/ha de rendement et de se passer de traitement foliaire. Son interdiction signifierait une perte de 100 à 120 €/ha de marge pour l’agriculteur. De plus, les traitements foliaires ont des niveaux de performances moindres et ne permettent pas d’assurer une bonne gestion des résistances. Encore un élément qui entamerait la compétitivité de l’agriculture française. Il n’est pas facile de développer la productivité et la compétitivité en France… Nous nous posons la question de la raison d’une telle décision. Comment peut-on travailler si on s’éloigne à ce point de la science ? Surtout que nous sommes persuadés qu’une suspension ne résoudra en rien le problème apicole et qu’un tel dossier n’aide pas les relations entre agriculteurs et apiculteurs. Surtout que Syngenta souhaite apporter sa contribution au problème des abeilles et travaille pour cela sur le varroa et la nosémose.