Le titre IV (articles 58 à 84) a pour objet de moderniser l’urbanisme pour permettre une transition écologique des territoires. Ce titre est complexe et particulièrement riche comme l’a montré Maître Arnaud Gossement dans sa présentation du 21 janvier 2014. Pour atteindre ces objectifs, le texte de loi prévoit de faire des schémas de cohérence territoriale (Scot) de véritables outils de planification stratégique, couvrant à terme tout le territoire national (article 58). Les plans locaux d’urbanismes (Plu) et les cartes communales devront être compatibles ou mis en compatibilité avec les Scot (article L. 111-1-1. - III du Code de l’urbanisme). Le contenu des Scot évolue vers une prise en compte qualitative des paysages, venant ainsi conforter les ambitions du volet paysager de la future loi biodiversité qui reconnait les objectifs de qualité paysagère et officialise les atlas de paysages.
L’article L122-1-1 du Code de l’urbanisme précise que « Le schéma de cohérence territoriale […] comprend un rapport de présentation, un projet d’aménagement et de développement durables et un document d’orientation et d’objectifs. Chacun de ces éléments peut comprendre un ou plusieurs documents graphiques ». La loi Alur va modifier le contenu de ces différents éléments dans un sens qui risque d’impacter l’agriculture via le paysage. En effet, le projet d’aménagement et de développement durable du Scot fixe désormais les objectifs de « mise en valeur des paysages » (article L122-1-3 du Code de l’urbanisme). Le document d’orientation et d’objectifs quant à lui « peut préciser les objectifs de qualité paysagère » (article L122-1-5 du Code de l’urbanisme). Le règlement du Plu pourra, à son tour en vertu de la nouvelle rédaction de l’article L. 123-1-5. - II, « en matière de caractéristiques architecturale, urbaine et écologique : Identifier et localiser les éléments de paysage et délimiter les quartiers, îlots, immeubles, espaces publics, monuments, sites et secteurs à protéger, à mettre en valeur ou à requalifier pour des motifs d’ordre culturel, historique, architectural ou écologique, notamment pour la préservation, le maintien ou la remise en état des continuités écologiques et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation ».
De la protection à la préservation
Outre l’insertion des continuités écologiques, le texte passe de la « protection » à la « préservation » qui peut sous-entendre un entretien. Ces éléments du paysage (haies, bosquets, plantations d’alignement, zones humides), tout comme les continuités écologiques, peuvent apparaître dans les documents graphiques du règlement. « Les travaux ayant pour effet de modifier ou de supprimer un élément que le plan local d’urbanisme ou un document d’urbanisme en tenant lieu a identifié, en application du 7e point de l’article L. 123-1-5, comme présentant un intérêt patrimonial ou paysager » doivent faire l’objet d’une déclaration préalable. Ce dispositif, issu à l’origine de la loi Paysages, est un véritable enjeu pour les terres agricoles, espaces de production, sur lesquelles s’exprime le paysage banal.
Traditionnellement les Plu, et encore moins les Scot, n’avaient pas pour objet de décrire les pratiques de gestion agricoles. Néanmoins, sur le terrain, les Plu décident aussi d’interdire les traitements phytosanitaires, le drainage, des Scot choisissent leurs types d’agricultures (voir la Carte Villes-Campagnes du Rapport 2013 de la Saf) et demain ? Via le paysage, les continuités écologiques, va-t-on permettre à ces outils de droit de l’urbanisme de décider des choix de culture ? Ainsi, si l’évolution actuelle des textes, dont la loi Alur, confirme la volonté de préserver les terres agricoles d’une consommation excessive via les documents d’urbanisme et donc de leur confier l’avenir de ces terres, elle pourrait également dériver, via le paysage et les continuités écologiques, vers des objectifs d’entretien, car les paysages comme la biodiversité, ne sont pas statiques.