Si le contexte de croissance économique fragile, qui freine la consommation française, et le manque de visibilité inquiètent Dominique Chargé, c’est parce que les coopératives agricoles sont « particulièrement sous pression », détaille le président de la Coopération agricole ce 3 septembre.
« Produire en France coûte plus cher que dans la moyenne de l’Europe », explique-t-il, évoquant les coûts de production à la hausse depuis cinq ans, mais aussi une redevance eau qui a bondi de 115 % l’année dernière, et le poids des impôts de production qui représente en France près de 4 % du PIB. « Cela vient affecter nos marges, nos résultats et nos capacités de production à un moment où nous avons des besoins d’investissement importants face au double enjeu économique et écologique ».
Doubler les capacités d’investissement
Au regard des enjeux de développement de la production, de restructuration des filières, de modernisation du parc industriel, d’adaptation au changement climatique, et d’attractivité des métiers, les investissements réalisés et prévus par les coopératives se révèlent insuffisants. Après avoir investi 3,5 milliards d’euros en 2024, et 3,6 milliards en 2025, les coopératives prévoient d’investir 10 milliards sur les 10 prochaines années.
50 % de ces investissements sont destinés à la compétitivité : gagner en capacité de production, et innovation produit pour répondre à l’évolution de la consommation, et 30 % sont fléchés vers les transitions agroécologiques, notamment la décarbonation des filières et la transition énergétique. Les 20 % restants concernent la maintenance des appareils de production. Néanmoins, « les besoins identifiés aujourd’hui sont du double des capacités des coopératives », alerte Dominique Chargé.
Si des leviers de financement existent déjà, comme le fonds pour les industries agroalimentaires, la Pac, l’épargne coopérative, « nous avons besoin de travailler sur de nouvelles formes d’investissements », explique le président de la Coopération agricole.
Les coopératives sont ainsi à l’initiative d’un dispositif financier inédit, le fonds Coop Agri, doté de 300 M€. Il doit permettre aux coopératives d’accéder à des financements classiques plus facilement, en intervenant en levier de fonds propres, sur des durées de 8 à 12 ans. Le lancement opérationnel est prévu au premier semestre 2026.
Redonner de la valeur à l’alimentation
Enfin, il apparait nécessaire, pour les coopératives, d’activer le levier de la valeur de l’alimentation. Or, les dépenses alimentaires des Français sont passées de 30 % à 16 % entre 1960 et aujourd’hui, avec des prix tirés vers le bas qui favorisent les importations.
La Coopération agricole a listé plusieurs solutions : sortir de la guerre des prix, mettre en place une exception agricole dans la commande publique, appliquer des lois Egalim, réformer le droit de la concurrence, renforcer le dialogue avec la société, lutter contre la concurrence déloyale, interdire la publicité comparative sur les produits alimentaires.
Ces évolutions apparaissent plus que nécessaire pour soutenir l’investissement des coopératives en faveur de la transition. « Leur fragilisation entrainera la fragilisation de l’ensemble des territoires et de nos capacités de production », rappelle Dominique Chargé, qui appelle les députés « à la responsabilité pour ne pas concourir au désordre, mais à l’accompagnement de nos capacités de productions », et les distributeurs et les consommateurs « à entrer dans une logique de l’importance de leur acte d’achat et de consommation ».