Signe de la tension dans le monde agricole, qui multiplie les actions depuis un mois, une salariée de la Chambre d'agriculture de Rodez est morte sur une exploitation laitière dans l'Aveyron, après avoir été poussée dans une mare alors qu'elle procédait à une démarche de conseil, selon le ministre de l'agriculture Stéphane Le Foll. En attendant les détails de l'enquête, Stéphane Le Foll n'a toutefois pas souhaité « faire de lien entre ce fait gravissime et le contexte que l'on connaît ».
A Rennes, selon un bilan de la préfecture de région à la mi-journée, environ 480 engins agricoles et une centaine de remorques venant de Bretagne, de la Manche ou de la Mayenne, participent à la manifestation, qualifiée de « vitrine de la détresse du monde agricole », par les organisateurs.
La rocade de #Rennes totalement bloquée et vide de toute circulation. #agriculteurs pic.twitter.com/ziXe7ONWtY
— Anthony Rigollé (@thony911) 17 février 2016
Selon la FRSEA (Fédération régionale des syndicats d'exploitants agricoles), entre 500 et 600 engins agricoles sont mobilisés. La rocade rennaise est fermée depuis 11 h et jusqu'à 17 h. Sur certains d'entre eux, les agriculteurs ont suspendu des pancartes ou des banderoles, proclamant « L'amour est dans le prix, partageons les marges », ou encore « Plein le cul des normes ». Sur un autre tracteur, une pancarte en faveur des éleveurs de porc proclame « Pour votre bien-être, mangez français ! ».
Une vingtaine de tracteurs s'est dirigée vers la préfecture de département, en dépit d'un engagement des responsables agricoles de ne pas quitter la rocade. La manifestation répond à l'appel de la FRSEA et des JA (Jeunes agriculteurs) de Bretagne, dont les représentants nationaux doivent rencontrer le Premier ministre Manuel Valls dans l'après-midi.
Les #agriculteurs manifestent sur la #rocade de #Rennes ce mercredi. Un millier de #tracteurs selon les syndicats. pic.twitter.com/LhOx5lbVv8
— Tanguy de Lanlay (@tanguydl) 17 février 2016
Pas de routes dépotoir
Le patron de la FNSEA Xavier Beulin devrait lui demander une baisse de 10 points des charges sociales, de 45 à 35 %, une mesure chiffrée à 600 millions d'euros, pour permettre à l'agriculture française de redevenir compétitive face aux concurrents européens. « Il faut qu'on obtienne des avancées sur les baisses de charges mais aussi des prix rémunérateurs », a déclaré à l'AFP Didier Lucas, président de la FDSEA des Côtes-d'Armor. « On veut aussi que les banques jouent le jeu et réaménagent les prêts » consentis aux agriculteurs, « le temps que la crise passe », a ajouté Claude, un producteur de lait, en route vers Rennes.
Plus de 300 policiers et gendarmes sont déployés pour assurer la circulation des véhicules sur les déviations. Pour les organisateurs, l'objectif est clair : maintenir la pression sur l'État et la grande distribution. Plusieurs hypermarchés sont d'ailleurs bloqués par des agriculteurs dans l'agglomération toulousaine, dans l'Allier ou dans l'Ain. Dans ce dernier département, des éleveurs ont également déversé mardi soir des immondices devant l'entrée d'un site d'un logisticien suisse sous-traitant de Carrefour. Une plateforme logistique du groupe est également bloquée dans le Rhône.
Les agriculteurs demandent aux grandes et moyennes surfaces de sortir de la logique de la baisse des prix pour permettre aux producteurs de récupérer des marges. Ils souhaitent aussi que l'Etat œuvre à une simplification des normes, à la baisse des charges, mais aussi à la levée de l'embargo russe ou à l'étiquetage sur l'origine des produits, comme l'a rappelé lundi Xavier Beulin, alors que se réunissaient à Bruxelles les ministres européens de l'agriculture. Les organisateurs ont exhorté leurs troupes à manifester « dans le respect des biens et des personnes ». « La rocade de Rennes ne doit pas devenir le dépotoir de la Bretagne : tout déchargement se fera sous la responsabilité pleine et entière du chauffeur », ont-ils averti.