Mercosur : Emmanuel Macron sur la défensive à Bruxelles

Il est rare de voir le président français hausser la voix dès son arrivée au bâtiment Europa où se tiennent les conseils européens. Mais l'heure est grave : la Commission européenne, soutenue par plusieurs pays, Allemagne en tête, pousse pour obtenir d'ici vendredi un feu vert des Vingt-Sept, à la majorité qualifiée, à cet accord de libre-échange avec le bloc latino-américain, pour le signer samedi au Brésil.

Or Emmanuel Macron demande le « report » de toute décision, sous la pression des agriculteurs, qui manifestent en France et dans la capitale belge, conjuguée à celle d'une classe politique française quasi-unanimement opposée à ce texte accusé de fragiliser le secteur agricole.

« Si aujourd'hui il y a une volonté de passage en force », « je vous le dis très clairement, la France s'opposera », a-t-il martelé jeudi matin devant la presse. « Le compte n'y est pas », « cet accord ne peut pas être signé » en l'état, a-t-il insisté. Le chef de l'Etat joue clairement sur le registre d'une France pays fondateur et poids lourd de l'Union européenne. « On doit être respectés », a-t-il lancé.

Minorité de blocage

« Personne ne peut ignorer ce que je viens de vous dire », a-t-il encore prévenu, avant d'invoquer son autoproclamé « bon sens un peu paysan » : « Je n'aime pas qu'on balade les gens, donc je ne vais pas balader nos agriculteurs ».

C'est un pari que fait Emmanuel Macron, celui que les partisans de cet accord avec le Brésil, l'Argentine, Paraguay et Uruguay, jugé favorable aux filières industrielles notamment allemandes, ne pourront faire fi de sa position.

La position de l'Italie, qui a aussi appelé au report mercredi, a renforcé celle de Paris, qui compte sur le soutien d'autres pays comme la Pologne ou la Hongrie.

Mais cette coalition se traduirait-elle par une minorité de blocage si un vote était malgré tout organisé jeudi ou vendredi ? Le dirigeant français ne s'est pas risqué à l'affirmer.

Et à Bruxelles, certains pays pro-Mercosur espèrent encore convaincre Giorgia Meloni de ne pas faire barrage - ce qui serait le camouflet ultime pour Emmanuel Macron, dont les relations avec la Première ministre italienne sont notoirement tendues.

D'autant que le bras de fer entre la France et l'Allemagne sur ce dossier s'étale sur la place publique, plombant l'image d'un couple réconcilié et à nouveau moteur en Europe qu'Emmanuel Macron et le chancelier Friedrich Merz mettent en scène depuis le printemps.

« Rouler sur la France »

De quoi alimenter, en France, les commentaires de ses opposants sur une supposée perte d'influence du française à seize mois de la fin de son mandat.

« La France, elle doit se faire respecter », a affirmé jeudi sur la chaîne TF1 le coordinateur du parti de gauche radicale La France insoumise, Manuel Bompard, tout en redoutant que les Européens considèrent que « la parole de la France n'a tellement plus de valeur aujourd'hui à cause d'Emmanuel Macron, qu'on peut en quelque sorte rouler sur la France au niveau européen ».

« Emmanuel Macron est-il capable de dire "non" à la Commission européenne ? Rien n'est moins sûr », a aussi tancé la leader du Rassemblement national Marine Le Pen, jugeant que son camp d'extrême droite était le « seul rempart » au sein de l'UE.

Même si un report était finalement accordé, le chef de l'Etat pourrait ne gagner qu'un court répit.

Bruxelles se hâte de répondre à ses trois exigences : une « clause de sauvegarde » en cas de déstabilisation des marchés agricoles, des « clauses miroirs » en matière de normes sanitaires et environnementales, et des contrôles sanitaires accrus à l'importation.

Emmanuel Macron, qui sur le fond considère l'accord commercial bon pour plusieurs filières, notamment viticole et industrielle, a reconnu jeudi que la réponse européenne à ces « conditions » avançait « dans la bonne direction ». Et a lâché du bout de lèvres que la France acceptera le texte quand elles seront remplies.

De quoi enflammer à nouveau le débat en France, où la plupart des partis veulent tout simplement enterrer l'accord avec le Mercosur.

Inscription à notre newsletter

COACHING

Coaching

Avec Charlie, mon coach agri, approfondissez vos connaissances, pilotez votre exploitation et optimisez vos décisions

MATÉRIELS D'OCCASIONS

Terre-net Occasions

Plusieurs milliers d'annonces de matériels agricoles d'occasion

OFFRES D'EMPLOIS

Jobagri

Trouvez un emploi, recrutez, formez vous : retrouvez toutes les offres de la filière agricole

Réagir à cet article