Une évacuation sans brutalité mais dans la douleur

Quatre gendarmes, spécialement équipés de crochets et de filets, s'apprêtent à monter. Mais les jeunes, dont trois filles, finissent par descendre non sans avoir copieusement insulté les gendarmes et les journalistes présents. « On revient, vous savez », lance une occupante en posant pied à terre. Ce sont les derniers résistants, qui s'étaient perchés à 12 mètres de haut. Plus d'une heure après l'arrivée et la mise en place des forces de l'ordre tout autour du « Fort », dernier site occupé où devait être construit le projet de retenue d'eau, deux zadistes demandent à négocier avec le préfet.

« Vous étiez au courant, vous le saviez, nous sommes là pour appliquer les ordonnances (...) de la justice », leur répond un officier de gendarmerie. Sans se démonter, les deux jeunes, visages peinturlurés en vert, jettent des cartes de Pokemon sur un bout de matelas gonflable devant les gendarmes, impassibles. L'artiste-sculpteur Joe, lunettes jaunes, lit une règle de ce jeu. Il leur récite ensuite un poème de Léo Ferré sur la mort. Silence de mort en face. « Il faut peut-être, pour qu'ils comprennent, que l'un de nous se sacrifie », se confiait-il, mi-sérieux, à une journaliste de l'Afp dans la matinée.

Un gros nettoyage en perspective

Au loin, sur la seule petite route traversant la « zad », un groupe de gendarmes arrive accompagné d'une vingtaine de zadistes qui vivaient un peu plus loin, aux lieux-dit « La Pinède » et la « Métairie », certains depuis 18 mois. Une épaisse fumée noire s'élève dans le ciel : un feu s'est déclaré « accidentellement », explique un zadiste, devant la « Métairie neuve », un ancien corps de ferme transformé en dortoir. Six des nouveaux arrivants s'assoient, entourés d'une ribambelle de chiens et de chiots tassés dans un sac à commissions devant le Fort. « Nous n'avions pas le choix, nous avions les animaux» , lance l'un d'eux. Un de leurs ânes paniqué erre en brayant. Un chevreau court d'un zadiste à l'autre en bêlant. Trois oies cacardent et barbottent dans une flaque de boue, tandis que Gertrude, la porcine noire vietnamienne qui avait occupé la tente de Joe a depuis longtemps pris la fuite.

Un homme spécialisé dans le traitement des animaux récupère un chien pris entre gendarmes et zadistes qui résistaient au sol. Entretemps, le cercle des gendarmes se resserre autour de l'avant-dernier groupe de résistants qui s'entremêlent les uns aux autres sur le lieu même de la mort du jeune Rémi Fraisse le 26 octobre des suites d'une grenade offensive de la gendarmerie. A quatre ou cinq gendarmes par récalcitrant, les forces de l'ordre séparent les zadistes qui hurlent. Ils se relèvent plus loin, sans blessure, et répondent aux questions des gendarmes. Certains sont menottés. Mais l'atmosphère est calme. Un fracas de tôles froissées et de troncs d'arbres broyés se fait entendre dans la vallée: à l'extrémité de la zad, un bulldozer bleu des gendarmes démonte déjà un des barrages zadistes.

Entretemps, les agriculteurs qui avaient fait le siège toute la semaine s'impatientent tout autour de la zad, car les gendarmes leur interdisent l'accès. « Si à 14h, ça n'a pas bougé, on y va, c'est sûr », s'énerve un agriculteur. « Demain, on viendra pour nettoyer leur bordel. Qui d'autre va le faire sinon ? », lance un autre, talkie-walkie à la ceinture.

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