Josiane Delteil exploite 150 ha de SAU à Monferran-Savès dans le Gers. Jusqu’à 2014, en plus de 73 ha de céréales, d’ail violet de Cadours et de noyers, elle cultivait 15 à 20 ha de tournesol, 20 ha de soja et 20 ha de pois. « Je fais du pois depuis vingt ans. C’est une culture que j’aime beaucoup, un très bon précédent. Cependant, depuis quelques années, je déplore une baisse de rendement. En 2013 et 2014, en conditions très favorables, je n’ai pas dépassé 25 q/ha, contre 35 de moyenne et jusqu’à 45 les bonnes récoltes. »
Josiane Delteil pressent alors la nécessité de réduire la fréquence de retour du pois dans la rotation. « Tous les quatre ans, c’est trop. » Quelle culture adopter ? « Je pense au maïs mais en l’absence de capacités d’irrigation suffisantes et de cueilleur, j’écarte cette solution. Et puis le maïs est plus sensible. Il supporte mal le report d’un tour d’eau même d’un ou deux jours. Et s’il fallait intervenir le dimanche, dans les maïs hauts, je ne pourrais pas déplacer les enrouleurs sans l’aide de mon salarié. Et pourquoi pas le sorgho que mon père cultivait déjà il y a vingt ans, moins sensible au stress hydrique ? »
Une parcelle de 14 ha irrigables pour commencer
Les discussions au sein de son Ceta finissent de la convaincre. « Au travers d’échanges, j’ai su que certains freins avaient été levés en matière de désherbage du sorgho et du choix variétal. » Josiane Delteil trouve conseil auprès d’un ingénieur d’Agro d’Oc, l’union des Ceta du pays d’Oc, et d’un voisin qui cultive du sorgho depuis longtemps.
« J’ai de l’eau pour 50 ha par campagne. Je raisonne mon assolement en fonction. » Soja, pois et aujourd’hui sorgho sont semés en zones irrigables. Pour ce dernier, l’agricultrice choisit une parcelle de 14 ha située sur des coteaux séchants. « Côté génétique, je veux une variété avec un haut potentiel pour valoriser l’irrigation. De plus, sa date de récolte doit permettre le semis de blé à suivre, fin octobre - début novembre. Je voulais donc une variété qui arrive assez tôt à maturité pour être récoltée au 15 octobre et éviter au maximum les frais de séchage. »
Arack, variété de sorgho grain demi précoce, a donc été semée les 5 et 6 mai au semoir monograine derrière un couvert de féveroles détruit un mois plus tôt. « Il faut juste changer le disque semeur pour le sorgho. » La structure avait été préparée en septembre à l’aide d’un déchaumeur pour une reprise facile à la herse plate au printemps. Au niveau des intrants, « j’apporte 120 kg de PRP sol en septembre, puis 320 kg d’urée en trois fois ». Un traitement herbicide combinant antigraminées et antidicot vient à bout des adventices. L’intervention a eu lieu le 9 juin, au stade 2-3 feuilles. « Le sorgho a accusé le coup mais un arrosage bien placé derrière l’a revigoré. » Côté irrigation justement, trois tours d’eau, le 27 mai, le 24 juin et le 9 juillet ont suffi. À la différence du pois, le sorgho consomme de l’engrais et n’en restitue pas. Par contre, il n’a besoin ni d’insecticide ni de fongicide quand le pois demande deux ou trois passages de chaque.
à celle du pois. (©Terre-net Média)
Gagner plus qu'avec le pois
Josiane Delteil choisit de stocker pour vendre quand elle le souhaite. « J’ai vendu la moitié de ma récolte début septembre à 145 €/t. » Elle livre ensuite à la coopérative Arterris pour une utilisation en alimentation animale. « Je mise sur un rendement de 80 q/ha. Mon objectif est de gagner plus qu’avec le pois. Impératif ! Parce qu’en pois je ne suis pas loin de perdre de l’argent. »
La récolte a eu lieu dans les temps, mi-octobre, et dans de bonnes conditions. « Mais les résultats sont décevants : 61 q/ha. » Différentes raisons peuvent l’expliquer. « Je pense avoir opté pour une densité trop forte au semis, 350 000 grains à l’hectare. Pour 2016, je prévois 50 000 voire 100 000 gr/ha de moins. La culture a aussi pu subir le contrecoup du désherbant, combiné en plus à un orage très fort et une forte chaleur. Enfin, le choix d'un engrais type 18-46, à 100-150 kg/ha, après ce stress aurait été plus pertinent que l'urée. » En pois, la tendance se confirme. Josiane Delteil doit se contenter de 20 q/ha cette année. La marge brute de la culture atteint 142 €/ha.
En sorgho, il manque quelques quintaux mais la marge brute (hors coût de l’électricité pour l’irrigation) se tient, à 515 €/ha. « Je vais ressemer du sorgho la saison prochaine et même augmenter la surface, à presque 25 ha. Je vais aussi étudier, avec Arterris, la possibilité de semer une partie en sorgho blanc selon les contrats proposés. »