La fréquentation est en légère hausse (+ 0,64 %) par rapport aux 603.652 visiteurs de l'édition précédente, marquée par une visite mouvementée du président de la République dans un contexte de crise agricole. « Tout le monde a retrouvé la sérénité », a déclaré dimanche à l'AFP le président du Salon international de l'agriculture (SIA) Jérôme Despey.
Les organisateurs du Salon avaient élaboré une charte pour encadrer les visites politiques, en limitant notamment la taille des délégations et en encadrant les déambulations. Cette charte a été « bien respectée », a ajouté M. Despey, qui note « l'absence d'altercations majeures » lors de la venue du président mais aussi des ministres et des chefs de partis politiques. Le nombre de visites protocolaires est d'ailleurs passé de 83 à 88 cette année. « Il y a eu des échanges qui ont pu être animés lorsqu'ils ont rencontré les organisations syndicales ou des agriculteurs qui veulent avoir des explications sur le Mercosur (...) ou sur le sujet de leur revenu, de la simplification (administrative) ou des moyens de production », a-t-il constaté.
Après les huées et les violences qui avaient entouré la venue d'Emmanuel Macron en 2024, en pleine mobilisation des agriculteurs pour demander un « revenu décent » et de la « considération », la déambulation présidentielle a retrouvé ses allures de marathon. Samedi dernier, il a arpenté douze heures durant les allées, sacrifiant au passage obligé devant le box de Oupette, la vache Limousine égérie du salon.
Souveraineté alimentaire
Emmanuel Macron s'est posé en défenseur des agriculteurs, qui ne peuvent, a-t-il dit, être « la variable d'ajustement » du pouvoir d'achat ou d'accords commerciaux, comme celui récemment passé entre l'Union européenne et des pays du Mercosur.
Face à des syndicats inquiets, le président s'est engagé à tout faire « pour protéger cette souveraineté alimentaire française et européenne » dans un monde instable où Pékin, Trump ou Poutine peuvent faire trembler les secteurs des vins, cognacs, fromages ou blés français.
« On est frappés, on va devoir réagir », déclarait quelques jours plus tard le commissaire européen à l'Agriculture Christopher Hansen en visite au Salon, après la menace américaine d'imposer des droits de douane de 25 % à l'Europe.
Après le président Macron, c'est aussi une vision de la souveraineté alimentaire conçue comme un « réarmement » qu'a défendue la ministre de l'Agriculture Annie Genevard : « La France doit produire plus pour manger mieux, produire plus pour rester une puissance exportatrice ».
Cette vision a largement satisfait le premier syndicat agricole FNSEA, comme son rival de la Coordination rurale, qui n'ont de cesse de plaider pour moins de contraintes et de normes, et plus de « moyens de production » - notamment des pesticides et de l'eau.
Au contraire, la Confédération paysanne, le troisième syndicat agricole qui défend une « réelle transition agroécologique », s'est dite « extrêmement choquée ». La position du gouvernement constitue, selon elle, un « recul majeur » sur les questions environnementales « sans pour autant garantir des prix minimum » aux agriculteurs.
En signe de protestation contre la possible réintroduction en France d'un insecticide néonicotinoïde, toxique pour les pollinisateurs, des militants de la Confédération ont déversé vendredi des sacs d'abeilles mortes sur le stand de Phyteis, lobby de l'industrie des pesticides.
Agneau, tête de veau et grands patrons
Soucieux de tourner la page de la colère agricole, l'exécutif a mis en avant les engagements « honorés » depuis un an, avec notamment « 500 millions d'euros d'allégement de charges fiscales », et la toute récente adoption de la loi d'orientation agricole, attendue depuis trois ans par la profession.
Si « tous les problèmes ne sont pas résolus », le Premier ministre François Bayrou a salué un « climat très positif ».
Comme toujours, élus et responsables politiques se sont succédé dans les allées. Le communiste Fabien Roussel a mangé une tête de veau au petit-déjeuner ; l'écologiste Marine Tondelier a posé avec un agneau sur les genoux ; l'eurodéputé d'extrême droite et président du Rassemblement national Jordan Bardella a multiplié les selfies.
Le salon a aussi permis de renouer un « dialogue » entre l'Office français de la biodiversité (OFB) et la Coordination rurale (CR), qui avait auparavant appelé à la suppression de cette police de l'environnement.
Mercredi, plateau inédit : cinq patrons de la grande distribution, mais sans le leader du secteur E.Leclerc, ont présenté des « engagements » destinés à aider les agriculteurs sous l'impulsion de l'animatrice Karine Le Marchand.
Cette initiative a laissé sceptique le secteur agro-industriel, qui a ironisé ou dénoncé un « coup de communication », alors que parallèlement, le gouvernement regrettait « une tension extrême » dans la dernière ligne droite des négociations commerciales entre la grande distribution et ses fournisseurs.