Pour entrer en vigueur, ce texte devrait être voté dans les mêmes termes par l'Assemblée nationale, ce qui semble peu probable, le gouvernement y disposant de la majorité absolue. Il a été accueilli favorablement par tous les groupes, les sénateurs Les Républicains (LR) lui apportant « une abstention positive » tandis que les centristes, « compte tenu des enjeux », ont proposé que cette réforme soit intégrée dans le budget de la Sécurité sociale (PLFSS). Cette proposition de loi a « vocation à faciliter le parcours de reconnaissance et d'indemnisation des maladies » liées aux produits phytosanitaires, a dit son auteur Nicole Bonnefoy. « Elle vise en premier lieu à protéger et défendre les malades des produits phytosanitaires, au premier rang desquels les agriculteurs, trop souvent montrés du doigt pour l'utilisation de produits dont ils sont les plus nombreux à souffrir des effets nocifs », a-t-elle ajouté.
Citant plusieurs rapports, elle a affirmé que « les maladies liées aux expositions aux produits phytosanitaires faisaient l'objet d'un phénomène massif de sous-déclaration et de sous-reconnaissance ». Ainsi, selon l'Agence nationale de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), « plus d'un million de personnes sont professionnellement exposées en France aux pesticides », tandis qu'entre 2002 et 2010, « seulement 47 maladies professionnelles de ce type ont en tout et pour tout été reconnues ».
En revanche, pour la ministre de la Santé Agnès Buzyn, « nos connaissances sont insuffisantes sur les effets de ces produits » et « la plupart des pathologies concernées peuvent avoir des causes multiples ». Elle a aussi reproché aux auteurs du texte de prévoir « une indemnisation systématique sans reconnaissance préalable des responsabilités ». « Cela, précisément, déresponsabiliserait les industriels », a-t-elle dit.
Soulignant qu'un rapport proposait « un nouveau dispositif d'indemnisation », elle a estimé qu'il fallait « prendre le temps d'analyser ses conclusions, sachant qu'est soulignée l'absence de certitudes scientifiques sur le lien de causalité entre exposition et maladie ». « Mais j'ai bien entendu le signal que vous donnez », a-t-elle assuré. Les sénateurs ont par ailleurs adopté des amendements du sénateur socialiste de Guadeloupe Victorin Lurel proposant d'associer la ministre en charge des Outre-mer notamment à la définition de la liste des pathologies qui ouvrent droit à l'indemnisation. Les sénateurs ultramarins ont en effet souligné la situation des victimes des épandages massifs de chlordécone et de paraquat en Guadeloupe et en Martinique.