
Loin des propositions techniques sur la gouvernance des coopératives ou sur le financement de l'installation, Jeunes agriculteurs a, cette année, pris de la hauteur pour son traditionnel rapport d'orientation.
Profitant de l'année internationale qu'a consacrée l'Onu en 2014, le syndicat s'est concentré sur l'agriculture familiale lors de son 48e congrès, du 3 au 5 juin à Saint-Brieuc. Thème difficile à aborder, de l'aveu des représentants régionaux du syndicat.
Jeunes agriculteurs n'avait pas la prétention de définir ce qu'est l'agriculture familiale tant les modèles agricoles, en France comme à l'international, sont divers. Ils le sont d'autant plus avec le développement des modèles sociétaires. Mais pour le syndicat, le caractère familial implique un modèle d'exploitation viable qui permette une juste rémunération, qui soit transmissible à des jeunes et qui assure une « indépendance et une autonomie décisionnelle de l'exploitant ». Entre l'agriculture de subsistance et l'agriculture « de firmes », ce modèle familial reste le seul capable de répondre aux nombreux défis que doit relever le secteur.
Par ailleurs, Stéphane Le Foll, attendu pour clôturer le congrès jeudi 5 juin en milieu de journée, pourra être satisfait de voir la logique de double performance économique et environnementale des exploitations qu'il défend reprise par le syndicat dans sa vision des modèles agricoles de demain.
Des aides contracycliques dès 2020
Néanmoins, force est de constater que les barrières sont nombreuses à la pérennité d'un modèle familial rémunérateur et transmissible. Outre un meilleur accès au crédit avec, comme le propose JA, le bénéfice de prêts à taux zéro ou de caution portée par les collectivités, le syndicat veut « redonner du sens à la Pac » lors de la prochaine réforme en 2020. Il s'agirait, selon lui, de remplacer le système de droits à paiement à l'hectare par des aides contracycliques évoluant en fonction des cours du marché. JA se fait ainsi volontiers le relais des idées de Momagri.
Le rapport d'orientation 2014 est d'ailleurs l'occasion de pointer les carences de la Pac 2015-2019. « Le second pilier doit aller plus loin sur les dispositifs d'aides à l'installation, la préservation du foncier, la gestion des risques et l'aide à l'investissement.» JA estime ainsi qu'avec les économies liées aux aides contracycliques, celles à l'investissement pourraient être « multipliées par 5 ».
Les néfastes accords bilatéraux
L'agriculture familiale est aussi menacée, selon le syndicat, par la signature d'accords bilatéraux et de partenariats économiques avec les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique. « Dénoncer les accords commerciaux avec le Canada ou les Etats-Unis, pour lesquels l'UE est en position de faiblesse, c'est bien. Dénoncer les partenariats avec les pays africains où l'UE est en position de force, c'est encore mieux. »
Mais JA seul, voire le syndicalisme agricole européen, ne semble pas en mesure de peser sur les négociations. C'est d'ailleurs une autre carence que regrette le syndicat : l'absence de représentation syndicale agricole à l'échelle internationale. Mais JA veut se retrousser les manches pour porter ses propositions en faveur de l'agriculture familiale à tous les niveaux, jusqu'aux plus hautes sphères mondiales. Avec un métier d'agriculteur qui n'est toujours pas pleinement représenté à l'Organisation mondiale du travail, le syndicat a du pain sur la planche.