Au Pays Basque, le fragile laboratoire de l'agriculture « paysanne »

Petite taille, production de qualité, viabilité : la ferme de Peyo Bereterbide, comme celles qui l'entourent dans les collines verdoyantes autour de Saint-Jean-Pied-de-Port, est montrée en exemple par la Confédération paysanne, le troisième syndicat agricole, farouche opposant de l'industrialisation de l'agriculture.

En fait, le Pays Basque dans son ensemble constitue un « laboratoire de l'agriculture paysanne », que le syndicat rêve de voir s'étendre, explique Laurent Pinatel, le porte-parole de la Confédération. Les Pyrénées-Atlantiques sont un des bastions du syndicat, avec 50 % des voix aux dernières élections. L'agriculture paysanne, ce n'est pas forcément du bio et des circuits courts mais « une agriculture qui respecte la nature, le paysan et le consommateur », viable économiquement et créatrice d'emploi, résume Michel Berhocoirigon, fondateur d'une Chambre d'agriculture locale « alternative » à la Chambre classique, perçue comme trop productiviste.

Le Pays Basque compte une ferme pour 64 habitants, contre 1 pour 128 en moyenne en France. Ces exploitations, de 28 hectares en moyenne, soit deux fois plus petites que dans le reste du pays, sont axées en majorité sur l'élevage de brebis laitières, auxquelles s'ajoutent souvent quelques vaches.

Solidarité en moyenne montagne

Une configuration visiblement attractive : en 2013, le département des Pyrénées Atlantiques est celui qui a enregistré le plus de nouvelles installations, selon la Mutualité sociale agricole. Parmi les facteurs, « l'attachement profond des Basques à la terre et à la ferme familiale », explique Jean-Paul Duhalde, représentant local de la Confédération.

Mais aussi la solidarité qui s'est nouée du fait des conditions de travail en moyenne montagne : pour faucher l'herbe sur ses terres pentues, très difficile d'accès pour les machines, Peyo Bereterbide fait appel aux agriculteurs de la vingtaine de fermes de la commune. Et vice versa. « Sans cela, les prairies seraient abandonnées, comme sur la colline d'en face, où il n'y a plus que des ronces » alors que du maïs y poussait autrefois, explique le paysan aux yeux bleus translucides.

Le cahier des charges très strict de l'Aop Ossau Iraty, qui concerne la moitié du lait produit au Pays Basque, joue aussi dans le maintien de petites fermes nombreuses. En exigeant que les brebis soient nourries à l'herbe produite sur la ferme, elle empêche que les exploitations s'agrandissent sur une surface qui deviendrait ingérable pour un agriculteur seul, même avec l'aide des voisins. Un « écosystème » vertueux, explique Ana Bados, de la Confédération paysanne : comme les agriculteurs sont nombreux, les commerces, écoles et services le sont aussi, en comparaison d'autres zones rurales françaises. Ce qui favorise l'installation des jeunes.

Départs non compensés

« J'avais peur de manquer de vie sociale en revenant de Los Angeles. Mais en fait c'est un milieu où l'on rencontre beaucoup de gens nouveaux », confirme Nadia Ansolabehere, 35 ans, qui vient de reprendre les 200 brebis de son oncle, abandonnant son emploi de professeur d'espagnol qui l'avait conduite aux Etats-Unis. Mais la frêle jeune femme brune, dont le troupeau traverse chaque matin le village d'Anhaux, redoute de se retrouver isolée à l'avenir. Trois fermes ont disparu ces dernières années dans l'idyllique vallon, faute de repreneur. Car les installations ne compensent pas les départs : un quart des fermes du Pays Basque ont disparu entre 2000 et 2010. Et certains agriculteurs ont troqué leurs pâturages contre des élevages hors-sol.

Les adeptes des petites fermes s'inquiètent de la réforme de la Politique agricole commune (Pac), elle « pousse à l'agrandissement, car plus on a d'hectares, plus on touche d'aides », qui représentent la majorité du revenu des agriculteurs, estime Ana Bados. La solution pour Laurent Pinatel : « Faire bouger le curseur de la Pac », afin qu'elle prenne davantage en compte les emplois induits et moins le nombre des bêtes ou des hectares.

Inscription à notre newsletter

NEWSLETTERS

Newsletters

Soyez informé de toute l'actualité de votre secteur en vous inscrivant gratuitement à nos newsletters

MATÉRIELS D'OCCASIONS

Terre-net Occasions

Plusieurs milliers d'annonces de matériels agricoles d'occasion

OFFRES D'EMPLOIS

Jobagri

Trouvez un emploi, recrutez, formez vous : retrouvez toutes les offres de la filière agricole

Réagir à cet article