Dès sa présentation officielle le 26 octobre 2015, le plan Ecophyto 2, qui avait fait l’objet d’une première présentation en janvier 2015 suite au rapport Potier, puis d’une consultation publique en juin, a suscité les critiques tous azimuts. Mais Stéphane Le Foll persiste et signe tant sur les objectifs de réduction de produits phytosanitaires que sur le calendrier et les moyens.
Devant la presse mercredi 4 novembre 2015, le ministre de l’agriculture a rappelé les objectifs, suite à l’échec de la première version du plan : réduire de 50 % le recours aux produits phytosanitaires en dix ans. Stéphane Le Foll veut atteindre cet objectif en deux temps. D’ici 2020, la généralisation et l’optimisation des systèmes de production économes et performants – soit la déclinaison de son projet agro-écologique pour la France – doit permettre une réduction de 25 %. Dans les cinq ans qui suivront, la réduction de 25 % supplémentaires « sera atteinte grâce à des mutations plus profondes des systèmes de production et des filières ».
« Moins de phytos, c’est possible ! »
Pour le ministre, cet objectif en deux phases est aussi clair que les moyens déployés pour y parvenir. Il compte d’abord s’appuyer sur les 3 000 fermes expérimentales Dephy pour accompagner 30 000 exploitations, soit dix fois plus, « dans la transition vers des systèmes de production économes en produits phytos ». Selon le ministère, les traitements phytosanitaires observés dans les exploitations de polyculture élevage du réseau Dephy ont baissé de 12 % entre 2012 et 2013, alors que, sur le plan national, la consommation avait augmenté de 9,2 % sur cette période.
Cet exemple suffit à convaincre le ministre que le recours moindre aux phytos est possible dans toutes les exploitations, quelle que soit l’évolution des conditions météorologiques. Parmi les moyens mis en avant par le ministre : la diversification des assolements et l’engagement dans des mesures agroenvironnementales incitant à la baisse de l’IFT, l’indice de fréquence de traitements.
Pour évaluer les efforts réalisés, les indicateurs de suivi mis en place dans la première version du plan sont conservés. Le Nodu (Nombre de doses unités) restera bien l’indicateur de référence mais s’y ajoutera un nouvel indicateur « prenant en compte les quantités de substances actives vendues pondérées par leurs effets évalués sur la santé humaine et l’environnement. En clair, le ministre de l’agriculture veut suivre un indicateur tenant davantage compte de la santé des utilisateurs et de l’impact sur l’environnement pour, in fine, mettre à l’écart « les produits phytos les plus dangereux ».
Pour les prescripteurs, 11 € d’amende par Nodu
La grande nouveauté d’Ecophyto 2 reste la mise en place, à partir du 1er juillet 2016, des certificats d’économies de produits phytosanitaires (CEPP) pour tous les prescripteurs. « Pour les responsabiliser, nous n'allons pas les sanctionner tout de suite, mais les inciter à faire des efforts », rappelle le ministre. Pour eux, l’objectif est de réduire de 20 % en cinq ans leurs ventes de produits phytosanitaires. Pour un prescripteur, toute baisse des ventes, de même que la mise en place d’actions incitant les producteurs à utiliser des alternatives notamment de biocontrôle, entraînera l’attribution de CEPP.
Au bout de cinq ans, les prescripteurs qui n’auront pas atteint l’objectif de réduction de 20 % se verront sanctionner à hauteur de 11 € par Nodu en trop. « Les 11 € correspondent à la marge brute moyenne d’un Nodu », explique le ministère. Autrement dit, ils ne pourront pas gagner de l’argent avec la vente de produits phytosanitaires qui ne ferait pas atteindre l’objectif. La sanction vise à inciter le prescripteur à privilégier la vente de produits de biocontrôle, qui lui permettra de ne pas être sanctionné, et donc de développer ses marges. L'idée est « qu'il n'ait pas intérêt à vendre du phytosanitaire inutile », insiste le ministre.
Reste que tout n'est pas encore calé concernant ces CEPP. Toutes les modalités précises devraient être arbitrées d'ici fin décembre 2015, notamment les actions d'incitation aux alternatives qui permettront de bénéficier de CEPP.