L’arrivée des financiers, une révolution !

L’arrivée des financiers, une révolution !


« Quand il n’y a plus de doute sur un marché, il n’y
a plus de volatilité », explique Jean-Philippe
Everling, directeur général de la société
Granit négoce. (© Coopérative de Bollène-Barjac)

Pour comprendre le phénomène de volatilité des prix des matières premières agricoles, il faut regarder l’organisation des acteurs des marchés au niveau mondial et analyser les différentes approches stratégiques. « Les sociétés de négoce franco-françaises ont souvent leur siège social en France. Des opérateurs physiques y gèrent entre 3 et 10 millions de tonnes de matières premières agricoles par an », expliquait à l’occasion de l’Assemblée générale de la coopérative Bollène-Barjac en décembre, Jean-Philippe Everling, directeur général de la société Granit négoce.

Ces sociétés françaises, de services, se retrouvent sur les marchés face à des multinationales, au siège social souvent localisé dans un paradis fiscal, et « qui commercialisent plus de 100 millions de tonnes par an de produits sur des marchés financiers ». Alors que « nos entreprises ont pour la plupart bâti une stratégie autour de l’origine France pour des clients réguliers et fidèles, les seconds s’approvisionnent partout dans le monde selon des stratégies beaucoup plus opportunistes. »

De nouveaux joueurs

Cependant, depuis 2007/2008, il faut relever un interventionnisme accru des Etats (Algérie, Egypte, Indonésie, Tunisie…) concernant les achats de céréales. Il faut y ajouter, comme facteur favorable à la volatilité, les interdictions ou quotas d'exportations de céréales mis en place ponctuellement et la volonté plus ou moins affichée « du G20 et de la Chine de vouloir gérer la volatilité ou les prix ». Cette volatilité « a attiré de nouveaux joueurs : les financiers », qui se sont rabattus sur les matières premières après la crise des sub-primes. « Ces financiers amènent de nouveaux indices et sortent le marché du traditionnel équilibre offre/demande. Cet indice dit de ‘panurgité’ du marché s’accompagne de l’arrivée de nouveaux fonds, même si la proportion (environ 5 % des échanges, ndlr) est encore faible. »

L’Europe et l’Afrique renferment 51 % des stocks disponibles de céréales

La volatilité des prix des matières premières s’explique, entre autres, par l’arrivée de financiers dans le négoce des céréales et l’augmentation de la population mondiale « parallèlement à la disparition d’un hectare de terre arable toutes les 7 secondes ». La situation pourrait rappeler 2007/2008. Pourtant, au niveau mondial en 2009, la production est estimée à 644 Mt (608 Mt en 2008) la consommation à 658 Mt et les stocks aux alentours de 180 Mt (contre 120 Mt fin 2007).
« Cette année, nous allons exporter 17 Mt de blé tendre. Chaque année, la variable d’ajustement est justement notre disponible exportable », explique Jean-Philippe Everling, directeur général de la société Granit Négoce. Reste que la part des stocks de blé non-disponible est importante avec 49 % des réserves situées en Chine et 19 % en Inde. Cependant, le ratio stock/consommation le plus bas est en Europe. « En réalité, 51 % des blés disponibles sont situés en Europe et en Afrique. C’est là, la véritable raison de la tension actuelle relevée sur les prix. »
Autre facteur d’explication de la volatilité : le soja. La chine représente en effet 60 % des importations mondiales de soja. « Quand l’Etat chinois dit qu’il veut freiner la consommation sur son marché, forcément, les opérateurs prennent peur. »
Le marché accueille trois nouveaux types d'acteurs : les spéculatifs traditionnels, les ‘index funds’ (investissements long) et les ‘hedge funds’, « très investis dans l’économie avec un comportement parfois destructeur ». Ils agissent au niveau des investissements ou locations de terres réalisés notamment dans le sud de l’Afrique, en Ukraine, en Amérique du sud. « Cela montre qu’ils croient à cette filière agricole qui devient un bon investissement à moyen terme. Jusqu’ici, ils avaient du mal à entrer sur les marchés agricoles compte tenu des liquidités nécessaires, de la cyclicité des récoltes, des peurs de la livraison et d’une certaine inélasticité de l’offre et de la demande. »

« C’est une révolution ! »

Ils sont de plus en plus présents sur le Cbot (Bourse de commerce de Chicago) mais encore peu sur le Matif (Marché à terme international de France). Autre changement de stratégie notable : ils se sont mis à produire et à acheter des sociétés de trading, comme le rachat de Conagra par Ospray (Soros) et d’Awb par le fonds australien Macquarie. « C’est une révolution ! Il va falloir apprendre à se protéger de ces nouveaux financiers agricoles. »

L’environnement agricole mondial est donc plus que jamais incertain et les marchés devraient rester très nerveux compte tenu des incertitudes qui pèsent concernant la situation financière mondiale, la croissance de la Chine, la réalité du rendement de maïs américain, la qualité de la récolte australienne et la parité euro/dollar.

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