Alors qu’Emmanuel Macron a remplacé l’inauguration du Salon de l’agriculture par une visite dans une ferme de Côte d’Or, la Coordination rurale a, de son côté, décidé de monter à Paris pour mettre en avant les difficultés de l’agriculture. Si le syndicat va, comme les autres organisations, rencontrer le président de la République cette semaine, une mobilisation est prévue à Paris le 4 mars pour « parler du malaise agricole, des fermes qui ferment », a expliqué Bernard Lannes, président de la Coordination rurale, lors d’une conférence de presse le 25 février.
Car entre la pression économique, sociétale, le sentiment d’isolement et de manque de reconnaissance, les agriculteurs ont besoin de se projeter, notamment via la nouvelle Pac actuellement en cours d’élaboration, explique-t-il. Un manifeste contenant les propositions du syndicat sera ainsi remis aux parlementaires, évoquant des points clés comme l’installation ou encore l’harmonisation des aides entre les régions. La mobilisation de jeudi prochain sera également l’occasion d’alerter sur les conséquences de la disparition des fermes et des agriculteurs, en matière d’alimentation, de biodiversité, de paysages.
Conf de presse @coordinationrur
— Coordination Rurale (@coordinationrur) February 25, 2021
Bernard Lannes :
On veut mettre en avant la réalité de notre quotidien et non une image édulcorée.
On veut alerter le consommateur sur la disparition des agri et donc la délocalisation de son alimentation, la perte de sa souveraineté alimentaire
Allo Agri, une nouvelle plateforme d’écoute
Pour agir concrètement auprès des agriculteurs en détresse, la Coordination rurale a ainsi créé une association, Allo Agri, « une association sociale, de solidarité et d’écoute qui se veut une passerelle entre toutes les associations », explique Max Bauer, président de l’association et secrétaire général adjoint de la Coordination rurale. Aujourd’hui expérimenté en Occitanie, en Auvergne-Rhône-Alpes et en Provence-Alpes-Côte-d’Azur, le numéro vert gratuit (08 05 38 19 19) a vocation à s’étendre très rapidement sur tout le territoire national. Depuis décembre, cinquante dossiers ont été enregistrés sur la plateforme, et la moitié ont trouvé une issue favorable.
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Bernard Lannes : "Allo Agri est aujourd'hui en expérimentation en Occitane, Auvergne Rhône-Alpes et Paca.
Par ce biais, on veut recréer du lien.
C'est un devoir de ne pas laisser les agriculteurs en détresse de côté, de remettre de l'humanité." pic.twitter.com/fcA7MgrGjQ
« Il y a aujourd’hui un paquet d’agriculteurs qui échappent à tous les radars, il faut envoyer quelqu’un pour pousser la porte et tendre la main, c’est notre devoir d’humanité de ne pas laisser ces gens de côté », ajoute Bernard Lannes.
Un retour de valeur nécessaire pour les agriculteurs
Parallèlement, alors que les négociations commerciales s'achèvent cette semaine, les agriculteurs attendent toujours le retour de valeur promis par la loi Egalim. Ce qu’Emmanuel Macron a fait avec les États généraux de l’alimentation, « c’est très bien, mais il s’est arrêté au milieu », estime Bernard Lannes. Il faut selon lui se pencher davantage sur l’alimentation hors domicile, industrielle, et avoir plus de transparence sur ce qu'il s’y passe. Pour l’instant, les agriculteurs « restent la variable d’ajustement » de ces négociations commerciales.
Conf de presse @coordinationrur
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Bernard Lannes :
"Améliorer les relations entre les acteurs de la filière est crucial mais cette politique présentée comme phare est accessoire.
Les agri seront encore la variable d'ajustement.
Demander des aides tout le temps ce n'est pas tenable" pic.twitter.com/FPCiwlC6b4
De même, si on n’a jamais autant consommé de viande bovine d’origine française avec les confinements et la crise sanitaire, cette hausse de consommation ne s’est pas répercutée sur les éleveurs qui connaissent également des difficultés à valoriser les mâles. Si la Coordination rurale salue le discours du ministre de l’agriculture, invitant la restauration collective à servir du broutard et du jeune bovin, Alexandre Armel, secrétaire général, propose d’encourager la production de bœuf dans les zones d’élevage extensif, avec un accompagnement dans le cadre de la nouvelle Pac.
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Bernard Lannes :
"Améliorer les relations entre les acteurs de la filière est crucial mais cette politique présentée comme phare est accessoire.
Les agri seront encore la variable d'ajustement.
Demander des aides tout le temps ce n'est pas tenable" pic.twitter.com/FPCiwlC6b4
Une solution qui permettrait de réduire les importations de viande mûre, et qui possède aussi des avantages écologiques. « Dans ces zones-là, c’est bien l’agriculture qui maintient les paysages, et une ferme fermée en élevage ne se rouvre pas », regrette Bernard Lannes, qui évoque l’idée de contrats avec le ministère de l’écologie sur ces sujets de préservation de l’environnement et de la biodiversité, pour donner une visibilité aux agriculteurs. La position de la ministre de la transition écologique, Barbara Pompili, dans le cadre de la polémique sur les menus végétariens à Lyon agace d'ailleurs le syndicat. « Qui sert de bouc émissaire ? Encore une fois, les éleveurs », regrette Bernard Lannes.
La Coordination rurale devrait évoquer l'ensemble de ces sujets avec le président de la République demain après-midi.