Énergies renouvelables
La transition énergétique est-elle une aubaine pour l’agriculture ?

À Brion (Maine-et-Loire), sur l’exploitation d’Emmanuel Lachaize, la production d’énergie représente 40 % du chiffre d’affaires. (©Antoine Humeau)
À Brion (Maine-et-Loire), sur l’exploitation d’Emmanuel Lachaize, la production d’énergie représente 40 % du chiffre d’affaires. (©Antoine Humeau)

 

20% de la production d’énergies renouvelables provient de l’agriculture, selon les chiffres établis par l’Agence de l’environnement (Ademe) en 2017. Une part « qui pourrait doubler » table Olivier Dauger, administrateur de la FNSEA en charge des questions climatiques et énergétiques. Pas moins de 50 000 fermes produiraient des énergies renouvelables, en France.

1 - Installer des panneaux photovoltaïques

Le solaire est sans doute l’énergie la plus simple à produire. 11 000 fermes ont déjà installé des panneaux photovoltaïques sur leurs bâtiments. Les tarifs de rachat ont chuté au fil des ans, passant de plusieurs dizaines de centimes du kilowattheure (kWh) à 9,7 centimes (puis 4 centimes au-delà de 1 000h/an). Le coût des panneaux ayant lui aussi chuté, la rentabilité reste sensiblement la même, avec un rendement entre 5 et 6 % par an.

« C’est une hérésie de ne pas utiliser le toit des bâtiments pour y mettre davantage de panneaux ! » s’insurge Emmanuel Lachaize, exploitant à Brion, dans le Maine-et-Loire. Il en a installé 800 m², soit 170 kWc. L’un des avantages de la technologie est son faible coût de fonctionnement.

2 - Des méthaniseurs pour du gaz et/ou de l’électricité

La situation est tout autre côté méthanisation. La France compte aujourd’hui à peine 700 méthaniseurs agricoles, même si le ministère de l’Agriculture en voulait 1 000 en 2020. Certaines unités ont connu des déboires techniques, voire des accidents, d’autres ont été très mal accueillies par les riverains. Et puis le tarif de rachat du biométhane, autour de 90 €/MWh, a progressivement diminué de 10 à 15 % entre 2019 et 2022. Les dix premières années, la quasi-totalité des structures installées étaient en cogénération. C’est-à-dire que le gaz produit alimentait un énorme moteur entraînant une génératrice électrique. La chaleur n’était pas toujours valorisée.

Depuis peu, les « trois quarts des projets sont prévus en injection directe », constate Olivier Dauger. Dans ce cas, le gaz produit par l’installation est aussitôt injecté dans le réseau. Cette méthode offre moins de perte d’énergie et des coûts d’investissement et de fonctionnement plus restreints. L’exploitation d’Emmanuel Lachaize a accueilli un méthaniseur l’an dernier. Celui-ci assure désormais 40 % du chiffre d’affaires. « C’était un projet d’installation », raconte l’agriculteur. Il a permis l’arrivée d’un quatrième associé sur la ferme.

3 - Produire des agrocarburants

Qu’il s’agisse de micro-méthanisation ou de grosses unités collectives, gare aux abus, qui pourraient conduire la méthanisation à sa perte. Avec les effluents d’élevage, des cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive) sont utilisées dans les rations. Celles-ci sont produites pour leur fort pouvoir méthanogène. Parfois, des déchets de cultures alimentaires peuvent être valorisés, mais attention aux dérapages. « La fédération est en train de revoir le décret qui précise la définition d’une Cive », indique Olivier Dauger. Dans le contexte actuel de guerre en Ukraine, les « énergiculteurs » pourraient avoir de quoi se frotter les mains. « Le prix du gaz fossile a flambé, celui du gaz méthanier américain est le même, alors la nécessité de produire du gaz vert est une réalité très forte », s’enflamme le céréalier de l’Aisne.

4 - La biomasse, source de diversification

C’est sans doute pour la même raison que les agrocarburants, autre forme de valorisation de la biomasse, ont le vent en poupe. Le litre d’E85 est à peine à 1 € à la pompe, et nombre de collectivités territoriales subventionnent l’installation de boîtiers de conversion sur les véhicules. La production d’éthanol « permet à l’industrie betteravière de diversifier ses débouchés », soutient Olivier Dauger. Quant au diester, il « réduit notre dépendance au tourteau de colza ». Au risque de contribuer au renchérissement de l’aliment pour bétail. La « bioéconomie », en tout cas, semble avoir de l’avenir : bioplastiques, dentifrices, matériaux verts en tous genres... la FNSEA y croit. « Il faudra produire plus de biomasse, développer les rotations de trois cultures en deux ans, couvrir les sols, et faire attention à ce qu’il y ait un équilibre des usages », prévient Carole Lejeune, chargée de mission climat énergie à la FNSEA. Plus discrètement, la biomasse peut aussi être valorisée grâce aux haies, mais ce n’est guère rentable pour l’instant. Alors on compte plutôt sur un système d’aides publiques ou de paiements pour services environnementaux (PSE). Objectif modeste : maintenir les linéaires existants.

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