La grande distribution essaie de montrer patte blanche

Ces engagements des distributeurs sont accueillis assez fraîchement.
Ces engagements des distributeurs sont accueillis assez fraîchement. (©Adobe Stock)

Michel-Edouard Leclerc au pied de ballots de paille pour signer au nom de E.Leclerc un contrat d'achats de « presque 300 millions de litres de lait français annuels » : il s'agit du « plus fort engagement de la distribution française, et peut-être même à l'échelle européenne », assure jeudi le médiatique représentant du leader du secteur.

Alexandre Bompard, patron du numéro deux du secteur Carrefour, promet au patron du syndicat agricole FNSEA Arnaud Rousseau de « ne commercialiser aucune viande en provenance du Mercosur » en France, même si son groupe est bien implanté au Brésil ou en Argentine.

Thierry Cotillard, patron du numéro trois du secteur Intermarché, qui après avoir promis de ne plus vendre de fraises et cerises lors des fêtes de fin d'année, a affiché son soutien aux producteurs laitiers.

Dans la continuité de Carrefour, son enseigne a aussi annoncé jeudi prendre « l'engagement de ne pas commercialiser de viande bovine, porcine et volaille issue des pays d'Amérique du sud dans ses rayons traditionnels », c'est-à-dire la vente à la découpe notamment.

Intermarché promet aussi de « supprimer à terme les viandes en provenance des pays du Mercosur présentes dans les plats transformés de ses marques propres ».

Ne pas vendre de viande du Mercosur

Mais ces engagements des distributeurs sont accueillis assez fraîchement. Le petit concurrent spécialisé dans l'agriculture biologique, Biocoop, a ainsi raillé ces engagements récents en disant s'engager pour sa part depuis sa création en 1986, ne commercialisant par exemple que des fruits et légumes de saison.

Pour l'expert de la grande distribution Philippe Goetzmann, le fait que les enseignes « annoncent l'une après l'autre refuser de commercialiser de la viande du Mercosur dans leurs rayons traditionnels est aussi évident que ridicule », dit-il sur le réseau social X.

« Elles ne commercialisent déjà pas ou si peu de viandes issues d'autres pays d'Europe, pourtant souvent moins chères. Pourquoi alors envisageraient-elles de vendre des viandes sud-américaines ? Le sujet n'est pas là », estime-t-il. « Si nous importons de la viande du Mercosur, cela concernera les produits industriels (avec mention origine hors UE) et la restauration, notamment fast-food ».

Dans son message, Alexandre Bompard qui est aussi le président de la Fédération du commerce et de la distribution (FCD) a d'ailleurs appelé « en particulier les acteurs de la restauration hors domicile » à se joindre à son engagement, glissant que ce secteur représente « plus de 30 % de la consommation de viande en France » et que sur ce volume, « 60 % est importée ».

« Attention à l'effet boomerang »

« Attention à ne pas partir dans une surenchère du vide et attention à l'effet boomerang... », a aussi commenté le directeur de la rédaction du média spécialisé LSA, Yves Puget, sur X.

Les supermarchés ont multiplié ces dernières semaines les marques de soutien au monde agricole, qui manifeste régulièrement son mécontentement devant ses magasins ou ses entrepôts. Jeudi, des centrales d'achat des grandes enseignes ont encore été ciblées en Charente, Corrèze, dans le Lot-et-Garonne, les Landes, le Tarn et le Tarn-et-Garonne.

Cette succession d'annonces peut se lire à plusieurs niveaux : il s'agit d'abord d'éviter autant que possible de possibles dégradations de magasins de la part d'agriculteurs protestataires.

Ensuite, les supermarchés tentent de s'inscrire dans un soutien très consensuel au monde agricole tout en esquivant les accusations régulières émanant notamment du monde politique, d'être parmi les grands responsables de la crise agricole française.

À l'approche des négociations commerciales

Enfin, prendre le parti des agriculteurs met la pression sur leurs fournisseurs agro-industriels alors qu'approche la période houleuse lors de laquelle la grande distribution négocie les conditions de vente d'une partie des produits commercialisés lors de l'année suivante dans ses magasins.

Intermarché demande notamment aux industriels « d'appliquer le même niveau de soutien au monde agricole ». Quelques semaines plus tôt, la déléguée générale de la FCD, Layla Rahhou, avait appelé sur LinkedIn à « remettre de la transparence dans les négociations commerciales, face au jeu opaque des grandes multinationales pour préserver et augmenter leurs marges ».

Hasard du calendrier, Carrefour a écopé vendredi d'une amende de 10,3 millions d'euros pour non-respect du délai légalement imparti pour négocier avec ses fournisseurs en 2024, a indiqué la Répression des fraudes (DGCCRF).

Le groupe a annoncé vouloir la contester « sur tous les terrains juridiques possibles », et assure qu'il est « seulement reproché » à sa centrale européenne Eureca « d'avoir signé avec quelques jours de retard des contrats avec de grandes multinationales qui avaient tout intérêt à jouer la montre et qui n'ont pas grand-chose à voir avec le monde agricole français ».

Son concurrent E.Leclerc avait été sanctionné pour la même raison cet été, à hauteur de 38 millions d'euros.

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