Quelle est la situation sur le marché des huiles alimentaires ?
L'impact de la guerre en Ukraine sur le marché des huiles n'échappe à personne. L'Ukraine est en effet le premier producteur mondial de graines oléagineuses. De cette production dépendent près de 50 % des exportations mondiales d'huile de tournesol, aujourd'hui bloquées au port. À cette quantité, il faut ajouter les 30 % d'exportations d'huile de tournesol russe, touchées par des quotas décidés par Moscou. On mesure ainsi combien la filière des huiles est perturbée ! L'offre est débordée par la demande.
Non seulement les exports d'huile de tournesol sont perturbés, mais aussi ceux d'huile de colza ?
Il est vrai que l'Ukraine est aussi le troisième exportateur mondial d'huile de colza. Les stocks, là aussi, sont bloqués, sauf une quantité marginale qui transite par voie ferrée. Cette moindre dépendance des exportations ukrainiennes désigne d'ailleurs le colza comme piste sérieuse pour trouver dans le court terme des alternatives à l'huile de tournesol. Si l'usage du colza pour les biocarburants est revu à la baisse et que la sole augmente en Europe, il pourrait contribuer à compenser la pénurie d'huile alimentaire.
Les surfaces de tournesol, semées au printemps 2022, sont elles-mêmes en augmentation. N'est-ce pas suffisant ? Pourquoi cette importance du colza ?
C'est un fait, les surfaces de tournesol sont en hausse. Pour la France, on évoque près de 800 000 hectares en 2022, soit 110 000 hectares de plus qu'en 2021. C'est un progrès, mais tout relatif comparé à la baisse des surfaces qui seront récoltées en Ukraine cette année : 4 à 5 millions d'hectares contre 6,7 millions en 2021. Soit une baisse de production de 20 à 30 %.
Dans ce contexte, les producteurs de colza auront donc un rôle à jouer, en premier lieu au Canada (premier producteur mondial), mais pour ce qui nous concerne plus directement, en Allemagne et en France, premiers producteurs européens avec l'Ukraine.
Les semis de colza en 2022 seront donc déterminants pour l'approvisionnement de la filière ?
C'est bien le cas. Et comme chacun le sait, l'importance de l'emblavement dépendra des conditions climatiques. Si le temps est trop sec pour assurer une bonne implantation, les agriculteurs ne prendront pas de risque. Mais si la météo le permet, alors le colza sera prisé à la fois pour son intérêt agronomique et pour son intérêt économique. Le cours du colza a approché récemment les 1 000 €/t ! et vu le contexte, il restera élevé.
À quel point la recherche sur les variétés à haute teneur en huile pourrait-elle jouer un rôle ?
La teneur en huile est un axe de sélection majeur de la recherche variétale en colza chez Brevant. Il est clair que dans un contexte de déstabilisation du marché, la résistance aux maladies et l'optimisation de la teneur en huile des graines sont regardées de près, car ils sont deux facteurs d'optimisation du rendement. La variété BRV703, présentée en 2021 comme innovation européenne majeure pour sa tolérance au sclérotinia présente une teneur en huile supérieure à 46 %. Elle figurera sans doute parmi les semences les plus prisées en 2022.
Avons-nous déjà quelques projections pour les semis de colza en 2022 ?
Il faut rester prudent. Les premières tendances se consolideront après la récolte des semis 2021. Le rendement atteint encourage ou décourage les producteurs. Il s’agit aussi de réfléchir à son assolement, pour anticiper ses approvisionnements, les marges prévisionnelles et les exigences de diversification de la prochaine Pac. Avec la prudence qui s'impose, on peut supposer une progression de l'emblavement en colza de l'ordre de 100 000 à 150 000 ha, pour passer de 1,150 million d'hectares semés en 2021 à 1,3 million en 2022.
Nota bene : Nous vous rappelons que seul un conseiller indépendant est autorisé à vous apporter tout conseil adapté à votre parcelle.