Apporter de l’aide et un accompagnement spécifique aux agriculteurs en difficulté, tel est l’objectif de l’association Atex (Appui technique aux exploitations agricoles), créée en 1983, sur le département de l’Eure et qui s’est étendue à celui voisin de la Seine-Maritime en 2018.
Orienté vers l’association par un des membres partenaires (une banque, une coopérative, un centre de gestion, etc.) qui a repéré ses difficultés, l’agriculteur en situation délicate doit appeler de sa propre initiative l’Atex pour pourvoir débuter un suivi individualisé. Ce suivi est validé par un comité Atex réunissant tous les partenaires para-agricoles du dossier présenté, soit une vingtaine de membres, et un conseiller lui est alors attribué.
Un nombre d'adhésions en croissance
En 2022, 28 nouveaux exploitants ont adhéré à l’Atex, un chiffre en hausse par rapport à 2020 et 2021. 30 % avaient pour principale activité l’élevage bovin lait, 26 % les cultures céréalières, 19 % les bovins viande. La typologie des exploitations suivies sur les dix dernières années (251 adhérents) est globalement la même : 32 % d’éleveurs laitiers, 24 % de céréaliers, 18 % d’éleveurs allaitants…
Pour quelles raisons se retrouvent-ils en difficulté ? Contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce ne sont pas les difficultés financières qui ont poussé en priorité à demander de l’aide en 2022. « Pour 30 % des nouveaux adhérents, c’est d’abord lié à des désaccords sur l’exploitation, des conflits entre associés, au sein du couple exploitant, etc., explique Stacy Vaudé, conseillère à l’Atex. 15 % ont fait des choix stratégiques qui n’étaient pas les bons, 15 % ont des dettes fournisseurs, 11 % ont décroché au niveau informatique/administratif et 11 % connaissent un manque de rentabilité ».
« Nous sommes comme des médecins généralistes, explique Stacy Vaudé. On écoute l’agriculteur, on cible les problèmes de l’exploitation, qui peuvent être liés au management, à la bureautique, à la technique…, grâce à un audit que l’on établit lors des premiers rendez-vous. On réalise alors un tableau de trésorerie avec l’exploitant, on étudie le fonctionnement de son exploitation. On lui explique ensuite les marges de progrès possible et on définit un plan d’action pour régler ses difficultés. Cela peut passer par de la médiation et de la conciliation entre les associés, avec les salariés et les partenaires de l'entreprise. On organise aussi des rendez-vous pour améliorer la gestion, sa technique mais aussi des entretiens avec des avocats, des assistantes sociales de la MSA... Pour le coté administratif, on facilite le travail des comptables et autres organismes administratifs. Et enfin, on remet en route les relations avec les partenaires de l’exploitation comme les coopératives, etc. ».
Au début, un rendez-vous par mois est fixé avec l’agriculteur pour l’aider dans sa prise de décision, puis le suivi est allégé (4 à 5 rendez-vous par an) quand la situation s’améliore. Le suivi dure en moyenne 5 à 7 ans, mais cela peut aller jusqu’à 10-15 ans.
Des agriculteurs plutôt âgés qui ont décroché
Les agriculteurs en difficulté sont plutôt âgés, avec une moyenne d’âge de 47 ans sur les années 2014 à 2022 : 40 % des adhérents avaient plus de 51 ans, 35 % entre 41 et 50 ans, 20 % entre 31 et 40 ans et 5 % moins de 30 ans. « Nos adhérents, ce sont plutôt des générations d'agriculteurs qui ont des difficultés à s'adapter au numérique, qui sont avant tout "paysans" », constate la conseillère Atex.
Sur la dernière décennie, la surface moyenne des adhérents était de 90 ha. 17 % des exploitations adhérentes à l’Atex avaient + de 150 ha, 37 % entre 76 et 150 ha, 35 % entre 11 et 75 ha et 11 % moins de 10 ha.
Depuis 1983, ce sont 750 exploitations qui ont été suivies par l’Atex et 185 qui le sont encore actuellement. « Environ une exploitation en difficulté sur deux réussit à redresser sa situation et sort du suivi de l’Atex, indique Stacy Vaudé. Si on compte aussi les cessions volontaires, quand c'est l’objectif de l’exploitant, on arrive à 88 % d’exploitants sortis des difficultés. »
Alors que l’association s’apprête à célébrer ses 40 ans, l’assemblée générale extraordinaire devrait acter son changement de nom : elle deviendra alors « Réagir », comme les structures des autres départements en France, adossées aux chambres d’agriculture. Elle restera cependant totalement indépendante en étant financée, comme actuellement, par ses partenaires.