
L’abondance est le fléau de l'année pour les scopeurs. Les bonnes récoltes de céréales à paille, de maïs et d’oléoprotéagineux, pas toujours de qualité, seront commercialisées avec des différentiels de prix très importants par rapport à la campagne précédente. Pour le blé panifiable, il sera de près de 25 %. Et pour le blé non panifiable, qui sera en concurrence directe avec les autres céréales destinées à l’alimentation animale, ce même différentiel atteindra 40 % (ou 30 € par tonne). Le coût du travail de tri et d’alottement des organismes stockeurs pour rendre leur blé commercialisable sera en partie supporté par les céréaliers.
Interrogé ce 17 septembre 2014, le président de l’Association générale des producteurs de blé (Agpb), Philippe Pinta, s’attend, dans ces conditions, à une nouvelle baisse des revenus des scopeurs en 2014 alors qu'ils ont déjà reculé en 2013. Cette année, ils pourraient même être inférieurs à leur niveau de 2009. Ils étaient alors de 9.700 € par actif non salarié.
Pour Philippe Pinta, « c’est la faiblesse durable des cours et la qualité des céréales moissonnées qui expliquent cette situation. Même si elles diminuent par rapport à 2013, les aides Pac n’auront qu’un faible impact par rapport à la chute du chiffre d’affaires à laquelle s’attendent déjà les céréaliers ».
Voici les réponses de Philippe Pinta aux trois questions posées par Terre-net Média.
Terre-net Média : « Quelles revendications formulez-vous dans ces conditions pour que les céréaliers ne soient pas trop pénalisés ? »
Philippe Pinta : « Lorsque nous avons rencontré Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture avec une délégation de représentants professionnels (Fnsea, Apca, Coop de France entre autres), nous lui avons demandé d’entamer des démarches pour que les céréaliers perçoivent le 16 octobre prochain une avance de leurs aides Pac au titre de 2014. De nombreux producteurs seront confrontés à des difficultés de trésorerie pour financer leur campagne. Nous souhaitons aussi que le gouvernement favorise la conclusion de contrats d’exportations avec quelques pays méditerranéens (Egypte, Maroc, Algérie). »
Terre-net Média : « Et fiscalement, quelles sont vos attentes ? »
Philippe Pinta : « Il faut donner aux scopeurs les moyens d’atténuer la volatilité de leur revenu en rendant les sorties de dotations pour aléas plus souples. C’est en cette période de faiblesse des cours que les céréaliers ont tout intérêt à réinjecter dans leur compte d’exploitation une partie de leur épargne professionnelle ».
« Nous comptons aussi sur le gouvernement pour qu’il n’accentue pas la pression réglementaire et qu’il rende la Mae "zone intermédiaire" plus opérationnelle (nous reviendrons ultérieurement sur ce sujet) ».
Terre-net Média : « En revanche, la conjoncture des céréales n’est-elle pas favorable pour nouer de nouvelles relations commerciales avec les filières animales ? »
Philippe Pinta : « Aux prix actuels, les éleveurs ont tout intérêt à contractualiser leur approvisionnement sur 18 mois, au-delà de la récolte de 2015. Spéculer sur des baisses à venir ne serait pas très opportun. Leurs coûts de production vont fortement diminuer. Quant aux céréaliers, ces derniers pourraient compléter leur activité en se lançant dans la production de volailles. Les investissements sont contenus et ils valoriseraient mieux leurs céréales, en particulier les années difficiles ».