« Quelles soient orientées productions végétales ou animales, les grandes exploitations génèrent-elles plus de risques ? » Telle était la question que s’étaient posés les représentants de l’institut Lasalle-Beauvais et de Groupama Paris Val-de-Loire, qui fêtaient, jeudi 25 juin, le premier anniversaire du lancement de la chaire d’enseignement et de recherche « management des risques en agriculture ». La réponse apportée par Antoine de Lombardon, avocat spécialisé en droit de l’environnement appliqué au monde agricole, est normande. « Les risques ne sont pas forcément plus importants dans une exploitation de grande taille par rapport à une plus petite. En revanche, ils sont mieux connus. »
L’avocat prend l’exemple des plus grandes exploitations d’élevage. En France, « 18.000 fermes d’élevage sont soumises au régime d’autorisation au titre des installations classées ». Pour obtenir cette autorisation, le dossier mentionne de nombreux risques que des agriculteurs installés sur de plus petites structures ne sont pas obligés d’évaluer.
Selon lui, 111 accidents technologiques ont été recensés dans les exploitations agricoles en 2013. Il s’agissait d’incendies en très grande majorité (98 %). « A considérer que ces accidents ont eu lieu sur ces grandes exploitations, l’agriculture n’est finalement pas une activité très accidentogène », explique l’avocat, suggérant ainsi que les risques technologiques sont bien maîtrisés. Ceci dit, la pression sociétale face aux risques liés à l’activité agricole reste très forte. « 550 contrôles d’exploitations ont été réalisés par les différents services de l’Etat suite aux pressions du voisinage. »
Former les agriculteurs au management des risques
A l’instar des exploitations soumises à autorisation, les agriculteurs non soumis au régime des Icpe ont un besoin de mieux appréhender les risques technologiques ou économique. C’est d’ailleurs toute l’ambition de la chaire d’enseignement et de recherche « Management des risques en agriculture », créée il y a un an par l’institut privé de formation Lasalle-Beauvais, en partenariat avec Groupama Paris-Val-de-Loire.
« L'objectif est de développer de la recherche et de la formation autour de l'entrepreneur agricole face aux mutations technologiques, économiques et sociales », explique Eric Gelpe, directeur général de Groupama Paris-Val-de-Loire. Menée dans le cadre de la chaire d’enseignement, une étude de la perception des risques et de l’assurance par les agriculteurs de l’Oise et la Somme montre que ces derniers sont en recherche de conseils, et pas seulement de simples offres assurantielles, dont ils compareraient les prix et les prestations.
« Nous pensions que les agriculteurs se focalisaient d’abord sur le coût de l’assurance. Or, ils mesurent la performance d’une assurance via cinq critères : leur niveau de confiance, la qualité de la relation client, l’indemnisation en cas de sinistre, la transparence des contrats et la capacité de l’assureur à impliquer l’agriculteur », détaille Hanitra Randrianasolo-Rakotobe, qui coordonne la chaire d’enseignement.
Besoin de conseils
En matière de perception face aux risques et aux solutions d’assurance, la coordinatrice classe les agriculteurs en trois catégories : les « agri-managers » ayant un fort attrait pour la compétitivité, les nouveaux installés pluriactifs diversifiant souvent les activités, et les mutualistes « résidants », clients de longue date, pas toujours satisfaits mais accordant une grande importance au mutualisme. Chacune de ces catégories d’agriculteurs perçoit différemment les risques sur son exploitation. A charge pour les assureurs de proposer des solutions mieux adaptées à leurs besoins.
Le point commun entre ces trois catégories ? « Pour tous les agriculteurs, l’assureur ne doit pas se cantonner à un rôle de prestataire. Il doit devenir le partenaire des agriculteurs ».
Pour sa deuxième année de fonctionnement, la chaire d’enseignement et de recherche se penchera davantage sur les risques climatiques et économiques. A plus long terme, l’objectif est d’améliorer le conseil assurantiel, et de fournir aux futurs agriculteurs la culture du management ex-ante des risques. Autrement dit, évaluer les risques – climatiques, technologiques et économiques – de l’exploitation avant qu’ils ne se produisent pour mettre en place des actions permettant de les limiter.