« La saison de betteraves était pourtant mal engagée ! » explique Philippe Deloraine. ancien directeur d’une ETA. À la tête d’une exploitation au Mesnil-Martinsart près d’Albert (Somme), il consacre en moyenne une centaine d’hectares à cette culture. Mais cette année, seulement 85 ha ont été emblavés.
Bien que les semis se soient déroulés dans de bonnes conditions, les levées ont été lentes. Les cultures ont montré très vite un retard de végétation et se sont développées lentement. En cause, le retour des pluies après les premiers semis. La sécheresse estivale n’a rien arrangé.
« Les désherbages ont été efficaces », indique Philippe. « Côté maladies, la pression a été faible cette année, juste une attaque d’oïdium en juillet enrayée par un traitement fongicide en fin de mois, le premier de la campagne. Aucune conséquence, donc, sur le rendement. Seule la moitié de la sole a reçu un second fongicide ».
NON LABOUR ET BAS VOLUME
Pour rester compétitif, Philippe Deloraine pratique le non-labour. « Là aussi, je gagne en traction et en énergie ! » L’exploitant ne laisse rien au hasard. La diversité de ses cultures facilite la maîtrise des adventices et fait baisser le coût du désherbage. « Comme je cultive sur trois secteurs, j’ai des terres variées. » L’allongement et la diversification des rotations s’accompagnent également de gains non négligeables.
Au-delà des économies générées, l’agriculteur met en avant le côté écologique de cette stratégie. « J’avais mis en place un "plan eau agriculture", qui vient de se terminer. » Subventionné par l’agence de l’eau Artois-Picardie (AEAP), le programme aide les agriculteurs volontaires pendant cinq ans. En contrepartie d’une aide de 168 €/ha/an, ils s’engagent à réduire l’utilisation des herbicides : maximum trois applications et au moins un désherbage mécanique.
En prévision de la fin des quotas betteraviers en 2017 et pour rester compétitif, l’exploitant cherche en permanence à réduire ses coûts de production. C’est pourquoi il pratique aussi la pulvérisation à bas volume. La facture phytosanitaire est moins lourde. Les charges de mécanisation diminuent grâce à une utilisation plus longue du matériel. « Vous ne trouverez pas un tracteur de moins de 5 000 h chez moi ! J’ai un atelier bien équipé, l’entretien ne me coûte pas trop cher. Le semoir est amorti. Enfin, l’arrachage est réalisé par un entrepreneur. Son coût est donc connu », explique-t-il.
La saison n’est pas terminée
Dernier poste sur lequel l’agriculteur souhaite économiser : la semence. « Je joue le jeu. J’achète ma semence cher. La génétique continue d’améliorer les rendements. Si tel n’était pas le cas, je ne serais plus prêt à dépenser autant », annonce Philippe avec une légère insistance.
Cette année, malgré les inquiétudes en début de saison, les rendements sont finalement au rendez-vous et progressent même entre les premiers et les derniers arrachages, « Ils sont passés de 74 t/ha à 98 t/ha en raison des pluies tardives. J’ai rarement vu un tel rattrapage », souligne Philippe. Attention toutefois, la saison n’est pas terminée. L’enlèvement des betteraves est programmé sur cinq périodes et les derniers tas quitteront les parcelles de Philippe vers le 4 ou 5 janvier.
D’ici là, il faut protéger les silos. « Niveler les tas d’abord, puis pailler. Je mets de la paille à disposition et la coopérative se charge du paillage ! » explique Philippe. Effectivement, Tereos organise les chantiers.