Au siège de l’OCDE à Paris, 45 ministres de l’agriculture se sont réunis les 7 et 8 avril 2016 pour débattre et faire des propositions afin d’améliorer, par des politiques publiques, le système alimentaire mondial. Pour que ce dernier soit « productif, durable et résilient », les participants ont conclu une « déclaration commune » invitant notamment les pays à mieux collaborer entre eux pour définir des politiques de lutte et d’adaptation au changement climatique en faveur des exploitations agricoles. « Il faut s’orienter vers une agriculture plus résistante aux chocs climatiques, sanitaires et économiques, au travers d’une politique de gestion des risques plus complète et la recherche d’une plus grande autonomie des exploitations », conclut-on au ministère de l’agriculture.
Pour Stéphane Le Foll, qui co-présidait la réunion avec son homologue américain Tom Vilsack, la solution passe par la promotion et le développement de son « projet agro-écologique qu’il a mis en place en France », pour « combiner la performance économique et environnementale des exploitations à la mise en place de stratégies collectives, tant à l’échelle locale qu’internationale ». Le ministre de l’agriculture n’a pas manqué de mettre en avant, comme il l’a fait lors de la COP21 en décembre dernier à Paris, l’initiative du « 4 pour 1 000 » visant à stocker davantage de carbone dans le sol pour absorber la hausse des émissions de gaz à effet de serre.
Mais alors que se négocie depuis de longs mois un important accord entre l’UE et les Etats-Unis – le fameux TTIP ou Tafta – comment entrevoir la multiplication des accords commerciaux bilatéraux incluant les productions agricoles ? Seront-ils bénéfiques pour un meilleur système alimentaire mondial ? Ou, à l’inverse, seront-ils contradictoires à la mise en place de politiques publiques efficaces ? A vrai dire, difficile à déterminer. Et c’est sans doute pour cela que la déclaration commune des ministres a veillé particulièrement à ménager la chèvre et le chou.
Le bel exercice de la prochaine Pac
D’un côté, les ministres se sont « accordés à reconnaître que les échanges étaient un outil essentiel pour faire en sorte que les produis de base et les produits alimentaires puissent être distribués efficacement aux lieux et moments où ils sont nécessaires (…) et pour développer les débouchés économiques ouverts aux producteurs. » En d’autres termes, la multiplication dans le monde d’accords commerciaux fera partie des politiques publiques, quitte à mettre en difficulté des filières agricoles, comme pourrait l’être la filière viande si le TTIP venait à être conclu en l’état.
A la lecture des mots employés – « nous nous sommes accordés à reconnaître que… » - la question de l’impact des échanges commerciaux sur l’agriculture semble avoir été un sujet de débat voire d’opposition.
De l'autre, si les politiques publiques doivent donc « inclure le développement du commerce », avec des échanges mondiaux contribuant au réchauffement de la planète, elles devront « dans le même temps, promouvoir des objectifs environnementaux élevés ». « Nous devons trouver un moyen pour intégrer des politiques sectorielles et environnementales qui encouragent une utilisation durable de l’eau, des terres, des forêts, des sols et de la biodiversité, ainsi qu’une atténuation du changement climatique et une adaptation efficaces. »
« Nous aurons également besoin de mesures internes qui ne déconnectent pas les producteurs des prix mondiaux, mais qui leur assurent un filet de sécurité afin qu’ils aient le temps de s’adapter aux évolutions des marchés », complètent les ministres.
En la matière, la prochaine réforme de la Pac pour 2020 sera un très bon exercice pour tenter d’améliorer la protection des producteurs. Pour la France et l’Europe, la prochaine étape à cette réunion de l’OCDE se déroulera fin mai lors d’un conseil informel des ministres de l’agriculture à Amsterdam. Il s’agira, justement, de débattre des premières orientations sur la prochaine Pac.