Si la lutte contre le réchauffement climatique et la recherche de durabilité sont désormais stratégiques pour bon nombre d’États, les crises de ces dernières années – sanitaire, géopolitique…- viennent percuter les stratégies de transition. Comment ces dynamiques s’observent-elles dans le secteur agricole et alimentaire ? Le Déméter décline cette thématique dans son édition 2023 consacrée à « Agriculture et alimentation : la durabilité à l’épreuve des faits ».
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— IRIS (@InstitutIRIS) February 16, 2023
Sous la direction de @sebastien_abis et la coordination d' @Anais_Marie_
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Le climat, entre bien commun et source de conflictualité
Dans l’un des chapitres de l’ouvrage, Thierry Pouch, chef du service Economie des chambres d'agriculture, se demande si le climat, en tant que bien commun, pourrait permettre de dépasser la conflictualité générée par la mondialisation. « L’originalité de la période actuelle, c’est d’essayer de connecter le commerce à la question climatique », en mesurant notamment les conséquences directes et indirectes des flux commerciaux sur les émissions de gaz à effet de serre, explique-t-il. De ce point de vue, l’Union européenne ne cesse d’affirmer son leadership, en interne (à travers le Pacte Vert ou encore le réexamen de sa politique commerciale) comme en externe, en travaillant sur les mesures miroirs, l’ajustement carbone à la frontière, ou la lutte contre la déforestation. « Mais cette ambition se heurte selon moi au fait national qui pourrait retarder les perspectives d’une mondialité climatique, et à ses propres contradictions », ajoute Thierry Pouch, évoquant par exemple la stratégie européenne d’approvisionnement en métaux rares, source de pollution. Si le climat constitue un bien commun, il reste donc aussi source de conflictualité et source de pouvoir.
Plans stratégiques nationaux et contribution à la durabilité
Dans un autre chapitre, Marine Raffray, économiste aux chambres d’agriculture, compare les différents plans stratégiques de la nouvelle Pac, une Pac bousculée par les crises depuis 2018, mais qui s’inscrit aussi dans la dynamique du Pacte Vert élaboré par la Commission européenne en 2019. Ainsi, les divergences peuvent être assez fortes entre les pays. « On aborde une synthèse des 28 PSE avec une mise en lumière de choix très différents et des niveaux de contribution au Pacte Vert disparates », explique-t-elle. Par exemple, si l’UE se fixe un objectif de 25 % de la SAU en agriculture biologique à 2030, le PSN français établit son objectif à 18 % pour 2027, tandis que le PSN polonais vise 7 % de la SAU à horizon 2030.
La place de l’agriculture dans les politiques communautaires de l’Europe est également abordée, avec une interrogation sur le rôle de la souveraineté alimentaire, au regard des crises, dans la future Pac, mais aussi au regard de la démographie : compte tenu des changements à l’œuvre au niveau mondial, quel sera le poids de l’UE sur les marchés mondiaux, dans les relations internationales… L’enjeu étant, au final, de déterminer comment l’UE continuera à produire avec moins de ressources pour conserver sa place dans l’équilibre mondial.
Prix de l’alimentation et transition agricole
Est-ce que, de l’autre côté de la chaine alimentaire, les Français payeront plus cher l’alimentation pour soutenir la transition agricole ? Cette question de la conciliation entre réalité des marchés réalité des consommateurs est abordée par Philippe Goetzmann.
Lancement aujourd'hui du @Le_Demeter 2023.
— Philippe Goetzmann (@pgoetzmann) February 16, 2023
Ravi d'y avoir apporté ma contribution sur une sujet d'actualité, concernant prix, valeur et dépense alimentaire: Payerons nous notre alimentation plus chère demain ?
Conférence de lancement : https://t.co/MtfoI40bgy
« On entend tous qu’on ne dépense plus assez pour l’alimentation, mais on dépense 2,6 fois plus qu’il y a 60 ans, en euros constants », précise-t-il. Donc le discours prônant qu’il faudrait dépenser plus se heurte à une réalité économique qui amène le consommateur aujourd’hui à faire l’inverse, c’est-à-dire aller vers des consommations plus bas de gamme, et vers plus de produits importés. La question de la compétitivité coût et hors coût est également étudiée, entre les charges sociales, fiscales et normatives, mais également l’atomisation de la filière, qui entravent son efficacité économique, explique-t-il. Au-delà de la guerre des prix, c’est surtout un nouveau paradigme et une obligation d’inventer une autre façon de collaborer qui sera nécessaire pour concilier la contradiction entre les moyens des consommateurs, et les besoins d’augmentation de la valeur liée à la transition alimentaire, ajoute Philippe Goetzmann.
Le Déméter 2023 comporte 19 chapitres sur les enjeux stratégiques de l’agriculture et de l’alimentation. Pour en savoir plus, retrouvez la description de l'ouvrage sur le site de l'Iris.