Mon projet mon avenir
L’exploitation de Jean-Sébastien et Marine mise sur la paille de seigle !

Après leur passage sur M6, les jeunes agriculteurs ont vu les commandes exploser.
Après leur passage sur M6, les jeunes agriculteurs ont vu les commandes exploser. (©La Paille d'O)

Dans la famille de Jean-Sébastien Schils, on est agriculteur depuis plusieurs générations. « Depuis tout petit, je suis fier de cet héritage familial et j’ai toujours su que je reprendrai le flambeau pour m’occuper des cultures », explique le jeune homme de 33 ans. Marine Schils, elle, n’est pas issue du milieu agricole, ni du département du Calvados mais de l’Eure. « Pourtant, j’ai toujours voulu être agricultrice », indique-t-elle. Tous deux se sont installés en couple en 2020, à Ifs, dans la plaine de Caen, en double activité pour la jeune femme.

Pour « pérenniser » leur installation agricole et leur exploitation, les jeunes agriculteurs ont décidé de « valoriser la paille produite sur la ferme », en fabriquant des pailles de boisson en paille de seigle sachant que les grains, eux, sont transformés en farine et en pain au Moulin de Thibo et Caro, paysans boulangers bio. Une idée qui a peut-être germé suite à la loi Agec (anti-gaspillage pour une économie circulaire), visant le « zéro plastique » à l’horizon 2040, votée la même année que la reprise de la ferme.

Jean-Sébastien et Marine ont plusieurs objectifs. D’abord : « diversifier leurs productions– une quarantaine d’hectares de céréales (blé, seigle, triticale, avoine) et une vingtaine de lin textile et de prairies – ainsi que leurs revenus agricoles pour pouvoir vivre à deux sur la structure et avoir une vision à plus long terme ». Et ensuite : contribuer à « l’économie circulaire, plus respectueuse de l’environnement », montrer qu’il est possible d’entreprendre dans l’agriculture, mais aussi s’inscrire dans « une agriculture locale », alliant « tradition et innovation ». Aujourd’hui, les pailles en paille paraissent innovantes alors qu’autrefois, elles étaient couramment utilisées.

Une production artisanale et locale

La paille de seigle présente de nombreux avantages, comme en témoignent les exploitants sur leur site web La paille d'O. Elle est 100 % naturelle : cultivée en agriculture biologique, la plante, qui résiste bien au froid et aux maladies, ne reçoit aucun engrais ni produit phyto. Les tiges ne sont pas non plus traitées une fois récoltées. Autres atouts du seigle : les tiges donnent des pailles de boisson résistantes, ne se détériorant ni au contact d’un liquide, ni au lavage même au lave-vaisselle. Elles sont donc réutilisables une dizaine de fois, et biodégradables (on peut les composter). De plus, la longueur des tiges permet de fabriquer plusieurs pailles et son diamètre d’aspirer facilement les boissons.

L’initiative s’est concrétisée un an plus tard, après la moisson. La récolte, manuelle la première année, s’effectue maintenant avec une faucheuse-lieuse, l’important étant de couper les tiges à la base pour en conserver l’intégralité, puis de les regrouper en fagots, ramassés eux manuellement, à la fourche, puis stockés sous un hangar.

La fabrication des pailles (tri, découpage, calibrage, nettoyage), elle aussi artisanale et manuelle, est réalisée par l’Esat (établissement de service d’aide par le travail pour les personnes en situation de handicap) de Saint-André-sur-Orne. Elles sont ensuite emballées par une entreprise de la région et commercialisées, en circuits courts (en ligne et magasins, sur les marchés et foires…) depuis le printemps 2022, en boîte de 30 (7 €) et en vrac (à partir de 9 € pour des 13 cm ou 19 cm), sous la marque « La paille d’O ».

Coups de pouce financiers

Ce nom vous dit peut-être quelque chose ? Parce que les deux producteurs ont pitché leur projet, en janvier dernier, dans l’émission « Qui veut être mon associé » sur M6. Et ont réussi à lever 70 000 € auprès de trois investisseurs pour 24 % de parts sociales, espérant par ailleurs bénéficier de leurs conseils dans les domaines industriel et commercial que des exploitants agricoles maîtrisent moins.

Cet argent va leur permettre de « continuer à développer leur activité » autour de « deux pôles stratégiques » – sa mécanisation et la recherche & développement – dans le but de « faciliter les différentes étapes de fabrication des pailles et d’étendre la gamme de produits ». Parce que les jeunes agriculteurs ont encore plein d’envies en tête : ils veulent « décliner la paille sous toutes les formes possibles » (assiettes, gobelets, couverts, etc.), à partir d’un biomatériau, pour « remplacer le carton ». Et pourquoi pas concevoir des panneaux isolants pour l’écoconstruction.

Ci-dessous un reportage de M6 sur La Paille d'O, diffusé sur Youtube :

Davantage de visibilité, et un boom des commandes

C’est pourquoi ils ont aussi lancé une collecte sur la plateforme de financement participatif Miimosa. Celle-ci vise à investir dans un troisième axe stratégique : « la structuration de la production », via l’installation et l’aménagement de locaux, des bungalows, pour produire et stocker les pailles sur l’exploitation, puis les « expédier et recevoir les clients et partenaires », avec un bureau pour le travail administratif. Budget total : 12 000 € HT (4 200 € HT par bungalow de 4 m2, 5 300 € pour ceux de 6 m2, 2 000 € de frais de raccordement EDF et 500 € de terrassement). Jean-Sébastien et Marine souhaitaient, en outre, « booster » la communication et le marketing : logo, charte graphique, packaging, site internet…

Leur participation au programme télévisé leur a fait gagner en visibilité, avec un boom de fréquentation de leur site web (il a même planté !) et des commandes (100 000 pailles, soit 10 fois plus que la production mensuelle ; le stock prévu a été écoulé en une heure !), ceci auprès des particuliers comme des professionnels.

Un succès qui a fait boule de neige sur les réseaux sociaux et dans les médias. Car au-delà des pailles, leur témoignage sur l’agriculture et ses difficultés a touché les téléspectateurs et suscité de nombreux messages de soutien. À noter : Jean-Sébastien et Marine ont également été lauréats de la première édition du concours Sima farming awards, en 2022, dans la catégorie « nouveaux marchés ». Leurs défis pour la suite : réussir à suivre et maintenir la hausse des ventes, et toucher une autre clientèle : les restaurateurs notamment, voire l’étranger.

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