C’est une visite présidentielle au format « habituel », selon les termes du ministre de l’agriculture, qui démarre ce samedi 25 février, au premier jour du salon de l’agriculture. Un format « habituel » qui sous-entend, pour Emmanuel Macron, un grand marathon inaugural.
L’an dernier, au surlendemain de l’invasion russe de l’Ukraine, le chef de l’Etat n’avait fait qu’un passage express d’à peine plus d’une heure dans le hall des bovins. Cette année, Emmanuel Macron démarre sa visite vers 7h15 par un échange avec les acteurs de la filière pêche et devrait rester jusque tard dans la soirée pour, selon l’Elysée, « rencontrer un maximum de professionnels agricoles », dans un exercice qui relève autant, si ce n’est plus, d’une séquence de communication politique.
L’entourage du Président l’assure : « Ce salon ne sera pas dédié aux crises », même si, comme l’a fait Marc Fesneau en conseil des ministres ce mercredi, il s’agit de rappeler les dispositifs et enveloppes budgétaires déjà annoncés pour faire face aux difficultés sectorielles : 639 M€ pour faire face aux conséquences de la guerre en Ukraine, aides conjoncturelles face aux aléas climatiques de 2022 (gel, grêle, sécheresse), plan de soutien au secteur avicole confronté à la grippe aviaire, plan d’aide aux agroéquipements, plan d’accompagnement des betteraviers, qui ne pourront pas se prémunir de la jaunisse avec un traitement aux néonicotinoïdes.
Jusqu'au dimanche 5 mars, l’édition 2023 du salon de l’agriculture sera surtout « dédiée à conforter, accélérer la vision des transitions de l'agriculture française », avec, pour Emmanuel Macron, trois chantiers prioritaires.
Economiser l’eau et optimiser la ressource disponible
Première grande « transformation » agricole sur laquelle le Président souhaite avancer : la gestion de l’eau. Un décret est en cours de rédaction pour faire évoluer la législation sur les sédiments des cours d’eau et ouvrages existants de retenues d’eau. « L’objectif est de pouvoir mobiliser 37 millions de mètres cube d’eau supplémentaires dès cet été ».
Selon le ministre de l’agriculture, 30 % d’eau supplémentaire pourrait être disponible si on dévasait les réserves existantes. L’enjeu est donc d’assouplir la réglementation sur les opérations de curage, actuellement soumises à autorisation sous conditions. Le projet de décret pourrait être prêt d’ici fin mars 2023.
L’Elysée veut aussi faciliter la réutilisation des eaux usées, utilisées notamment par l’industrie agroalimentaire, en agriculture, pour ainsi réduire d’autant les prélèvements d’eau dans le milieu naturel.
La question de l'eau est d'autant plus urgente la France pourrait de nouveau connaître de nombreuses restrictions d'eau dès le mois de mars faute de pluie depuis le tournant de l'hiver, après la sécheresse historique de l'été dernier.
Il s’agit aussi de terminer la mise en œuvre du Varenne de l’eau, avec « en 2022, la première année d’un système assurantiel réformé ». Un nouveau dispositif d’assurance récolte pour lequel Crédit agricole Assurances revendique des souscriptions en forte hausse.
Une « nouvelle approche » sur l’usage des produits phytosanitaires
Emmanuel Macron veut revoir l’approche des professionnels sur l’usage des produits phytosanitaires, estimant, selon l’Elysée, que le plan Ecophyto 2 « ne permettait pas d’aider à trouver des solutions alternatives aux produits déjà interdits ou qui pourraient être prochainement interdits, comme le S-métolachlore.
Le Président devrait ainsi annoncer « un cadre pour une nouvelle approche d’accompagnement des agriculteurs dans la définition de solutions ». Au ministère de l’agriculture, Marc Fesneau regrette la « désynchronisation des avis et décisions » prises par les différentes parties prenantes – politiques, scientifiques, civiles – au sujet des phytos. « L’interdiction ne génère pas de solution », a-t-il insisté mercredi matin devant la presse spécialisée, évoquant le cas du prosulfocarbe, lui aussi critiqué et menacé d’interdiction. « Si on interdit le prosulfocarbe dans les mois à venir, je n’aurai pas de solution » à court terme.
« Inventer l’élevage de demain »
« Les systèmes d’élevage herbager sont les plus impactés par le réchauffement climatique et les sécheresses à répétition », estime Marc Fesneau. Et évidemment, « il n’est pas question d’irriguer les prairies ». Dès lors, Emmanuel Macron veut « inventer l’élevage de demain », selon les termes de ses conseillers, en fixant « un cap sur l’élevage en France en 2030 ».
« Qu'est-ce que c'est ? À quoi ça ressemble ? Comment on le construit ensemble ? Comment on intègre les nouveaux enjeux de climat ? » Telles sont les questions posées par l’Elysée, mais aussi par les représentants de la filière bovine, impatients d’entendre le Président sur la concurrence internationale déloyale subie à cause d’accords commerciaux sans clause miroir.