Sur les réseaux, les agriculteurs tirent à boulets rouges sur la préparation du salon de l'agriculture par Emmanuel Macron. Et pour cause : la préparation du chef de l'Etat - et ses conseillers - pour sa visite inaugurale du salon de l'agriculture samedi 24 février vire, selon eux, au cynisme et au déni de la réalité de leurs difficultés et de leurs attentes.
Jeudi après-midi, l'Elysée annonçait qu'Emmanuel Macron participera à un « grand débat » sur un ring du hall 1, après avoir salué les propriétaires de l'égérie du salon, la normande Oreillette. Un débat pour lequel seraient invités tous les acteurs du monde agricole, des associations environnementales, de l'agroalimentaire ou de la distribution. Un débat auquel sont invités de nombreux représentants agricoles, mais aussi, entre autres, M. Bigard, Michel-Edouard Leclerc, des représentants de Générations Futures et des Soulèvements de la Terre.
« L'invitation par le PR (président de la République, ndlr) au #SIA d'un groupuscule dont la dissolution a été demandée par son propre gouvernement est une provocation inacceptable pour les agriculteurs. J'avais accepté de participer à un débat. Dans ces conditions, je refuse de prendre part à ce qui ne sera qu'une mascarade », a déclaré le patron du premier syndicat agricole, Arnaud Rousseau, sur X jeudi soir. Il a rapidement été rejoint par son homologue des Jeunes Agriculteurs, Arnaud Gaillot.
🔴 #Thread 1️⃣ Ce matin @rousseautrocy était l’invité du #FaceAFace avec @ApollineMatin 📺. Sur @RMCInfo et @BFMTV, le président de la #FNSEA a rappelé la détermination du monde agricole 🎙️ : "Non je n’irais pas grand débat. Je trouve que ce qui se passe est incompréhensible et le… pic.twitter.com/xOlfXscg2G
— La FNSEA (@FNSEA) February 23, 2024
Le rétropédalage a été enclenché par l'Elysée une heure plus tard avec l'annonce que le collectif, qualifié un temps d'« éco-terroriste » par Gérald Darmanin, n'était finalement plus invité « pour garantir la sérénité des débats ». Et vendredi en fin de matinée, l'Elysée admettait une « erreur » : « Il s'agit d'une erreur faite l'entretien avec la presse en amont de l'événement ».
« Cynisme et mépris »
Mais le mal est fait : vendredi matin, malgré ce rétropédalage, Arnaud Rousseau a confirmé que la FNSEA ne participera pas à cette séquence. Les JA n'iront pas non plus. Un peu plus tard dans la journée, la FNSEA a précisé qu'« aucun représentant » du syndicat majoritaire ne participera au débat proposé par l'Elysée.
La Coordination rurale n'enverra non plus aucun représentant national. Mais le deuxième syndicat agricole indique que des responsables locaux, comme Karine Duc, coprésidente de la CR du Lot-et-Garonne, prévoient de s'y rendre.
L'opposition politique a aussi vertement critiqué le choix de l'exécutif. « Décidément, Macron n'incarne rien d'autre que la confusion, le mépris et le désordre », a réagi la cheffe de file de l'extrême droite Marine Le Pen. Le président des Républicains Eric Ciotti a lui dénoncé un « "en même temps" macroniste (...) insupportable ».
Une question se pose désormais : une séquence censée répondre un tant soit peu aux attentes encore très fortes des agriculteurs, peut-elle avoir lieu sans l'organisation syndicale représentant plus de la moitié des agriculteurs ? Dans son argumentaire ce jeudi, l'Elysée précisait qu'Emmanuel Macron souhaitait un échange « le plus riche possible, à bâtons rompus, dans un état d'esprit républicain mais sans filtre ».
Il « aura l'occasion de refixer un cap pour l'agriculture française à horizon 2030 en conclusion de ce débat », qui devrait durer au moins deux heures et se tenir dans un « ring », traditionnel lieu de présentation des animaux, a précisé un conseiller présidentiel.
En attendant une visite très tendue, les tracteurs de nouveau à Paris
Les tracteurs défilent vendredi dans Paris à la veille de l'ouverture du Salon de l'agriculture alors que l'invitation des Soulèvements de la Terre à un débat avec Emmanuel Macron a relancé la colère des agriculteurs et forcé l'Elysée à admettre une erreur.**
Une trentaine de tracteurs sont installés dans le centre de Paris, place Vauban derrière les Invalides, après avoir traversé dans la matinée la capitale depuis l'ouest, dans un concert de klaxons et sous les applaudissements des passants, à l'appel de la Coordination rurale, 2e syndicat agricole.
La Coordination Rurale rentre dans Paris, pacifiquement, avec le soutien de 90% des français. Sauvons notre agriculture. #AgriculteursEnColere #SalonDeLagriculture #coordinationrurale@VeroLefloch@Senat@AssembleeNat@BFMTV@cnws@TF1@franceinter@Francetele@franceinfo pic.twitter.com/YNEh2aXH4Y
— Coordination Rurale (@coordinationrur) February 23, 2024
« On cherche à faire des choses symboliques, des choses qui ont du sens », explique Célestin, qui n'a pas souhaité donner son nom de famille. Au volant de son tracteur, le jeune homme de 19 ans estime que « ce qu'il nous faudrait, c'est des prix, la baisse des exigences environnementales et fiscales ».
Un autre cortège, à l'appel cette fois de l'alliance majoritaire FNSEA/JA, est attendu à Paris dans l'après-midi. Il a pour destination le parc des expositions de la Porte de Versailles, où le Salon de l'agriculture doit ouvrir samedi au public pour neuf jours.
Une fois sur place, des agriculteurs « veilleront toute la nuit jusqu'à l'arrivée du président de la République », selon la FNSEA.
#AgriSousPression Paris nous voilà …
— Amandine Muret Beguin 🌾 (@AMANDINEBEGUIN) February 23, 2024
À la veille d’ouvrir le SIA, le Compte n’y est pas. @EmmanuelMacron il est temps de considérer les agriculteurs à la hauteur de leur travail @FNSEA @JeunesAgri @FrseaIDF @JAregionIDF pic.twitter.com/3au1M6FvkL
Le président du Salon de l'agriculture, Jean-Luc Poulain, a confié à l'AFP s'attendre à des échanges « virils » lors de la venue d'Emmanuel Macron.