Quand ils s’attaquent à un sujet, autant dire qu’ils ne le font pas à moitié ! En préparation de leur congrès annuel, qui se tiendra du 27 au 30 mai 2018 à Cannes, les notaires de France ont planché sur les enjeux liés au territoire, dans un document de synthèse de 1 000 pages. « Les points traités dans notre rapport seront approfondis au cours du congrès, afin de trouver les propositions susceptibles de devenir des textes de loi », rappelle Emmanuel Clerget, président des notaires de France et notaire à La Charité-sur-Loire, en introduction du document.
Leur épais rapport aborde quatre thématiques bien distinctes. La première est consacrée à l’agriculture. « À qui appartient la terre ? À qui devrait-elle appartenir ? Comment la rendre prospère en respectant le sol ? Voilà les questions auxquelles nous tentons de répondre », explique Antoine Bouquemont, le rapporteur général pour ce 114e congrès.
« Portage du foncier, rôle des Safer, accaparement des terres, sociétés agricoles, décryptage juridique des aides, toutes ces questions concrètes ont été abordées en prenant en compte les réalités locales », poursuivent Guillaume Lorisson et Rachel Dupuis-Bernard, respectivement président et rapporteure de la commission « Demain l’agriculture ». Avec Antoine Bouquemont, ils ont présenté leurs travaux sur le stand des notaires de France au Salon de l'agriculture à Paris, mercredi 28 février.
« C’est la contribution du notariat à l’intérêt général »
Les notaires de France ne comptent pas défendre une « dérégulation totale » mais plutôt une « libéralisation raisonnée » de la législation pour « favoriser la coexistence de différents modèles agricoles », de la grande ferme céréalière à la permaculture, en passant par les structures familiales et les coopératives.
Mais leur regard sur l’agriculture reste très critique. « Le système d’aides et de régulation est à bout de souffle ». « Les Safer contrôlent toute la mutation rurale et sont promues au rang de promoteurs fonciers. Or les problèmes d’accaparement des terres agricoles sont récurrents et l’appropriation du foncier reste un enjeu majeur », expliquent-ils. « A force de réguler, le système est en train de se nécroser. »
Les notaires critiquent aussi le cadre actuel du contrôle des structures. « Il est indispensable de lui fixer de nouveaux objectifs pour accompagner l’agriculture vers demain. » Ils proposent notamment d’augmenter le niveau de compétence exigé et d’inclure la multifonctionnalité du territoire pour davantage tenir compte des activités indirectement liées à l’exploitation agricole (entretien du paysage, agritourisme, etc).
De la même manière, 50 ans après sa création, le statut du fermage, cadre d’ordre public régissant les relations entre propriétaires bailleurs et locataires, ne semble plus adapté aux yeux des notaires. « Bail cessible, fond agricole, etc : il faut remettre en marche des outils déjà existants. » Les notaires demandent surtout un « choc de simplification des aides qui faciliterait un usage raisonné ».
L’ensemble du rapport des notaires « Demain l’agriculture » doit encore être amendé d’ici leur congrès fin mai 2018. Les notaires de France devraient dévoiler six ou sept propositions législatives d’envergure quelques semaines avant l’événement.