Constructeurs, concessionnaires et pouvoirs publics sont confrontés à des organisations criminelles internationales aussi difficiles à appréhender que les trafics de stupéfiants. Les principaux groupes criminels agissant sur le territoire français et européen (la France n’est pas la seule touchée) sont aujourd’hui identifiés. Ils viennent de Roumanie et de Lituanie.
Des réseaux difficiles à démanteler
Extrêmement bien organisés, ces réseaux de vols de tracteurs sont difficiles à démanteler. Les intermédiaires sont nombreux, du repérage, aux vols en passant par le transport, le maquillage des machines, la création de nouveaux papiers, l’expédition dans le pays de revente, la revente, etc…
Mais les choses avancent à l’image du démantèlement d’un réseau roumain en janvier 2014, responsable du vol de 42 machines sur le territoire français. Il aura fallu deux ans d’enquête. Les pouvoirs publics sont structurés et disposent aujourd’hui d’une véritable "force de frappe" sur le territoire européen.
En France, l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante (Ocldi) rattaché à la gendarmerie nationale, mène des opérations d’ampleur européenne : de la collecte d’informations aux interpellations.
Dans les prochains mois
« Nous sommes en capacité de limiter les actions de ces organisations criminelles », explique le Colonel Bayard, chef de l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante. « A voir les chiffres en recul sur 2014, nous pensons que notre action commence à porter ses fruits. Actuellement, nous enquêtons sur quatre dossiers qui devraient, nous l’espérons, déboucher sur du démantèlement de réseau dans les prochains mois ».
Les réseaux agissent principalement le long des frontières françaises et des axes autoroutiers afin de pouvoir quitter le pays le plus rapidement possible. Deux zones se distinguent particulièrement : elles se situent le long des axes routiers de la façade ouest de la France (de la Normandie à l’Aquitaine) et sur une zone nord-est non loin des frontières allemandes, luxembourgeoises et belges. Une fois la frontière passée, les machines sont « maquillées » et rejoignent leur pays de « commercialisation ». Elles alimentent soit les marchés locaux (Roumanie et Lituanie) et une partie des pays frontaliers soit la Russie.
Une économie de marché criminelle
« Ces réseaux cherchent à opérer rapidement, ils privilégient les sites aux accès faiblement sécurisés et opèrent 9 fois sur 10 en concessions agricoles. Ils cherchent des tracteurs faciles à démarrer et s’attachent parfois à certaines marques pour fournir les marchés de revente. Il est toujours plus facile de revendre un tracteur lorsqu’il existe un réseau de revendeurs et un service après-vente dans le pays de destination » commente le Colonel Patrice Bayard. « Leur objectif est de faire de l’argent. Ils sont à la recherche d’une rentabilité maximale pour dégager le plus de bénéfice possible. C’est une véritable économie de marché criminelle qui est en place. »
Au-delà de ce travail d’enquête et de destruction de réseau criminel, l'Ocldi entame aujourd’hui une collaboration avec les constructeurs de tracteurs et les concessionnaires agricoles via l’Axema et le Sedima (syndicats des concessionnaires agricoles).
Le travail avec le réseau de distribution consiste principalement à renforcer la sécurité des sites de stockage de machines afin de limiter les vols et à transmettre des messages d’alerte lorsque certains groupes criminels sont actifs. Côté constructeurs, l'Ocldi cherche à faciliter les échanges autour de la traçabilité des machines afin que les autorités roumaines puissent par exemple identifier les machines volées en France et présentes sur leur territoire.