Un bail rural verbal, est-ce valable ?
Oui. Il est possible d’exploiter des terres ou un bâtiment agricole sans contrat écrit, dès lors que le propriétaire et le locataire se mettent d’accord.
Même sans document signé, la loi reconnaît qu’il s’agit d’un bail rural si trois conditions sont réunies : le propriétaire (le bailleur) met à disposition des terres ou bâtiments, l’agriculteur (le preneur) y exerce une activité agricole (culture, élevage, verger, etc.), en échange d’une somme d’argent ou d’un avantage en nature (partie de la récolte, entretien, etc.).
Ce que l’on appelle un bail verbal agricole est donc valable. Mais en l’absence de contrat écrit, c’est le régime du bail rural type départemental qui s’applique automatiquement. Ce contrat-type, établi par arrêté préfectoral, définit les règles applicables par défaut dans le département concerné. Il est consultable sur le site de la préfecture ou de la DDT(M) (Direction Départementale des Territoires et de la Mer).
Le bail verbal reste soumis aux règles générales du statut du fermage (articles L.411-1 et suivants du Code rural et de la pêche maritime), cela signifie notamment :
le bail dure au moins 9 ans, il se renouvelle automatiquement à son terme, sauf si le propriétaire ou l’agriculteur y met fin dans les délais prévus, le loyer (ou l’avantage en nature convenu) doit respecter les plafonds fixés par la loi, si le bien loué est mis en vente, l’agriculteur bénéficie d’un droit de préemption, sous certaines conditions.
Quelles sont les conséquences de l’absence d’écrit ?
L’absence d’écrit pose plusieurs difficultés concrètes, surtout en cas de désaccord ou de changement de situation.
Preuve de l’existence du bail rural verbal
C’est à celui qui affirme qu’un bail rural existe (l’agriculteur ou parfois le propriétaire) d’en apporter la preuve. Cette preuve peut être constituée de tous les éléments possibles : versements de loyers, factures agricoles, échanges de messages, témoignages… Ces éléments ne garantissent pas à eux seuls qu’un bail sera reconnu. En cas de litige, c’est au juge de décider si les preuves sont assez solides.
Avec un bail verbal, il est aussi difficile de prouver depuis quand l’agriculteur exploite réellement les terres. Or, cette date est importante pour respecter certains délais légaux, comme le délai à respecter pour mettre fin au bail, ou encore pour permettre à l’agriculteur d’exercer son droit de préemption si le terrain est mis en vente.
Danger en cas de vente du bien loué
Si le terrain est vendu, le nouvel acheteur peut vouloir le récupérer. Pour rester, l’agriculteur doit prouver qu’un bail existe et qu’il s’impose au nouveau propriétaire.
Le plus sûr est d’avoir un bail avec une “date certaine” : par exemple, s’il apparaît dans un document de notaire ou est reconnu par un jugement. Ce type de preuve rend le bail opposable à l’acquéreur.
Autre option : si l’acheteur savait qu’un bail était en cours, il doit le respecter. Mais il faudra prouver qu’il en avait bien connaissance, en cas de conflit.
Transmission du bail plus incertaine
Un agriculteur peut transmettre son bail à un proche (enfant majeur, conjoint, partenaire de Pacs) ou l’apporter à une société agricole pour continuer à exploiter en groupe. Mais ces possibilités sont encadrées et soumises à plusieurs conditions.
Sans écrit, il devient difficile de prouver qu’un bail existe, de dire depuis quand il a commencé ou de prouver que l’exploitant a rempli tous ses engagements : payer le loyer, entretenir le terrain, travailler personnellement sur l’exploitation… Et sans ces preuves, la demande peut être refusée, même si la personne ou la société à qui l’on veut transmettre le bail remplit toutes les autres conditions.
Contrat-type imposé en cas de conflit
Tout ce qui a été dit oralement n’a aucune valeur en cas de conflit. Montant du loyer, durée du bail, travaux prévus… Si rien n’a été écrit, le juge ne pourra pas en tenir compte. C’est le contrat-type départemental qui s’applique automatiquement, même si le bailleur et le preneur avaient convenu d’autres choses à l’origine.
Peut-on mettre par écrit un bail rural verbal ?
Oui, c’est tout à fait possible, et même fortement recommandé. Un bail rural verbal est valable, mais sans écrit, il reste fragile. Le formaliser permet d’éviter les malentendus, de mieux se protéger en cas de conflit, et de simplifier certaines démarches (vente du terrain, transmission, succession…).
Le bail peut être rédigé à tout moment, même après plusieurs années d’exploitation. Il ne s’agit pas de tout changer, mais simplement de mettre par écrit ce qui existe déjà. Pour cela, il faut respecter les règles du contrat type départemental, qui s’applique automatiquement quand aucun écrit n’a été signé.
Enfin, si la relation entre propriétaire et exploitant s’est dégradée ou si des doutes subsistent sur les termes du bail verbal, il est fortement conseillé de faire appel à un avocat spécialisé en droit rural. Il pourra déterminer l’existence du bail, ses caractéristiques et les obligations du propriétaire et de l’agriculteur.