« Une explosion de la contamination des jeunes enfants existe », liée à « leur consommation d'aliments de la vie courante tels que les céréales du petit déjeuner, les pains et leurs dérivés, les pommes de terre », affirment les Unions régionales des professionnels de santé-Médecins Libéraux (URPS) et leur structure nationale dans un communiqué.
Ces organisations ont adressé lundi au Premier ministre, ainsi qu'aux ministres de la santé et de l'agriculture, un courrier, consulté par l'AFP, pour exprimer leur « grande inquiétude devant la contamination au cadmium des Français, particulièrement des femmes et des enfants ». Cette contamination « est très largement imputée à l'épandage d'engrais phosphatés contenant trop de cadmium », ont souligné ces médecins.
Les études nationales nutrition santé (ENNS) en 2006 et ESTEBAN en 2014-2016 montrent un « doublement de la contamination moyenne des Français (0,57 µg/g contre 0,29 µg/g) », tandis que les enfants âgés de 6 à 10 ans présentent des niveaux de cadmium supérieurs à ceux des 10-18 ans et dépassant la valeur moyenne des adultes, a rappelé l'URPS. Interrogé par l'AFP jeudi sur le sujet, le ministère de la santé n'a pas répondu dans l'immédiat.
« Les enfants ont des taux déjà astronomiques »
« Les enfants ont des taux déjà absolument astronomiques, et les femmes sont plus contaminées que les hommes, notamment parce qu'un quart d'entre elles ont des carences en fer », a expliqué le Dr Souvet.
« Car quand vous avez un déficit en fer, l'absorption intestinale du cadmium peut être multipliée par quatre », a-t-il précisé. Les fumeurs – la cigarette en contenant – et les personnes exposées aux rejets d'activités industrielles comme la métallurgie sont aussi plus imprégnées, selon l'Anses.
Jeudi, l'Anses a indiqué à l'AFP qu'elle devrait publier « en fin d'année » ses travaux en cours visant à évaluer l'exposition humaine au cadmium, afin de définir « des leviers d'action pour réduire l'imprégnation de la population française ». L'URPS, qui va distribuer des documents d'information dans des cabinets médicaux, milite pour la mise en place de « stratégies de dépistage des pathologies » chez les personnes les plus à risque.
Défendre le bio
Plus de 16 000 articles scientifiques attestent que le cadmium – un « métal toxique omniprésent dans notre environnement qui peut contaminer les sols, l'eau ou encore l'air », selon l'Anses – « s'accumule dans l'organisme au fil des années » et est « l'un des plus grands toxiques existants », relaient ces médecins.
Des études ayant montré un risque accru de pathologies cardiovasculaires, de mortalité par cancer et de mortalité globale en lien avec la contamination au cadmium, cette dernière doit être « la plus faible possible », a plaidé l'URPS. Et l'organisation a interpellé le gouvernement : « Y a-t-il eu une diminution de la dose maximale autorisée de cadmium à 20 mg/kg d'engrais phosphatés, comme le préconise l'Anses dans son rapport 2021 ? ».
Pour réduire cette contamination, « il faut privilégier l'alimentation bio : c'est un appel aux autorités, il ne faut pas assommer cette filière », a déclaré à l'AFP le Dr Souvet. Les médecins ont exhorté l'exécutif à « soutenir très fermement l'alimentation biologique, notamment dans les écoles ». Car elle est « soumise à de nombreuses attaques », ont-ils déploré, alors qu'« outre (s)es avantages nutritionnels, la contamination au cadmium y est inférieure de 48 % en moyenne ».
En mai, le ministère de l'agriculture a annoncé amputer de 15 millions d'euros le budget de l'Agence Bio, qui promeut le secteur, plongeant dans l'incertitude une filière déjà mise à mal par le recul de la consommation de produits bio après un bond pendant la pandémie de Covid-19.
Pour Santé publique France, le cadmium est « un problème de santé publique » et il y a un « lien probable avec la flambée du cancer du pancréas », a rappelé l'URPS. Interrogé par l'AFP jeudi, le ministère de la santé n'a pas répondu dans l'immédiat.